Récemment sortis de l’intense Katana Zero, nous nous sommes dit qu’il serait de bon ton de nous ressourcer. C’est avec cette envie, ce besoin-là, que nous nous sommes tournés vers l’adorable trogne de Carto. Le charme est immédiat, et un téléchargement plus tard, nous nous y plongeons. Qui eut cru alors, qu’on en oublierait les sanglantes rixes de Zero.
Carto, développé par Sunhead Games et édité par Humble Games et X.D. Network Inc., est un Point & Click mâtiné de Puzzle Game. Vous y dirigez Carto, la cartographe la plus adorable de l’histoire de la discipline et avec comme but, au gré des rencontres, de retrouver votre “mémé”. Il n’en faudra pas plus pour que le titre signe une histoire étonnement réussie.
Carto-graphe
Carto, au contraire de son héroïne éponyme, est un jeu très bavard, prompt à se laisser conter au travers d’une galerie de personnages attachants. Tous ont une identité, de la forme à la couleur de leurs vêtements, de leur carrure à leur allure et jusqu’à chacune de leurs répliques, ils transpirent d’une humanité propre et débordante. Non contente d’être garnie de personnages mémorables, l’histoire donne à chacun d’eux un peu de matière, du temps pour les développer, mais aussi pour nous les faire retrouver, plus tard. C’est simple, on fini l’aventure le cœur un peu serré que tout cela se termine. On laisse tout ce petit monde, persuadé que la fin du jeu, ne signe pour autant pas la fin de leur aventure sans nous… chanceux qu’ils sont.
Pourtant, ne vous attendez pas à des doublages ou à de la motion capture “très très bien faits”, la performance de Carto est aussi dans sa simplicité, son économie qui ne sonne en rien comme austère. La qualité de son écriture, drôle autant que touchante, vient de ses échanges de répliques, de ses rencontres et de ses retrouvailles. Sachez qu’en signant, vous vous embarquez dans une aventure au penchant narratif évident, dans l’idée, assez proche d’un Point & Click.
Les forces narratives de Carto ne s’arrêtent cependant pas à son écriture et à son rythme, il y a aussi son lore. Attention, ce n’est pas le puits sans fond qu’est un CRPG (C comme Computer) à la Baldur’s Gates, mais c’est tout de même suffisamment fouillé pour être notable. Le jeu a la bonne idée d’utiliser comme sorte de Hub une bibliothèque contenant tous les récits de son monde. Il en ressort tout un tas d’anecdotes et d’approfondissements ici et là, qui à défaut de créer un monde très riche, ajoutent du mortier à une construction narrative déjà sans faille, où chaque miette de texte se lit avec plaisir.
Textures duvetées
L’autre point à aborder avant la partie gameplay, c’est sa réalisation visuelle. Carto est franchement très joli, à l’image de sa partie narrative : sobre mais d’une efficacité remarquable. Surtout qu’en plus d’être joli, l’espace de jeu est, comme nous le verrons plus tard, modulable à notre guise.
Les animations suivent cet esprit. Elles accompagnent discrètement les répliques des personnages avec beaucoup de justesse et une pointe d’expressivité. La partie sonore aussi joue discrètement mais solidement son rôle. Sans être mémorable, elle accompagne bien le jeu. Jouer à Carto, c’est être baigné dans une calme et une épure agréable. On s’y sent bien, porté par la même insouciance que son héroïne, lancé dans une douillette aventure.
À toi de jouer !
Parce qu’un jeu… c’est aussi un jeu, Carto se propose de vous entraver de mille petites façons. Au cœur de ses multiples entraves, une carte modulable à l’envie. Composée de petits carrés, il s’agira de judicieusement les positionner pour répondre aux nécessités du moment. Et si parfois, il existe bien des énigmes à base d’objets, très proches de ce que l’on peut retrouver dans un Point & Click, c’est finalement assez mineur et l’ensemble gravite surtout autour de cette carte agençable à notre bon vouloir.
Non seulement l’idée est originale, mais plus que tout, elle fonctionne ! Donnant lieu à tout un tas de puzzles variés, surprenants et pourtant jamais abscons. Cela est sans doute dû à la qualité exemplaire des énoncés et des indices. Tout est limpide, avec de quoi proposer un petit temps de réflexion sans pour autant bloquer le joueur bien longtemps. La qualité de son challenge est finalement bien plus proche de celui d’un bon Casual Puzzle Game plutôt que celui d’un Point & Click dont les solutions peuvent parfois paraître – même dans ses meilleurs représentants – assez tarabiscotées.
Carto, c’est une bonne idée qui se renouvelle de son début à sa fin. Un jeu construit sur presque un seul concept, mais qui bien exploré, donne lieu à un jeu sans mauvaises redites. Et de façon plus prosaïque, on pourrait même arguer qu’il s’agit d’une idée de puzzle game presque jouissive. En quelques pressions et coups de stick, pouvoir agencer sous nos pieds la carte du monde, c’est assez grisant comme concept !
En fait, on n’a que du bien à vous dire de Carto. C’est un titre inventif, réussi visuellement comme narrativement, et qui aboutit à une expérience cohérente et originale. C’est rare des jeux de cette qualité là, surtout pour un premier essai après deux jeux smartphones largement moins ambitieux. On vous le recommande vivement, chaudement, ardemment et autant de fois que nécessaire.