Studio Canal propose depuis le 13 juillet en DVD, Blu-ray et VOD Goliath, écrit et réalisé par Frédéric Tellier. Après deux premiers films s’inspirant de faits réels (L’Affaire SK1 et Sauver ou périr), l’auteur-réalisateur revient avec un long-métrage qui s’ancre tout autant dans notre réalité, perdu entre une beauté artistique et une lourdeur narrative…
Goliath raconte l’histoire de France (Emmanuelle Bercot), militante, professeure de sport le jour, ouvrière la nuit ; de Patrick (Gilles Lellouche), obscur et solitaire avocat parisien spécialisé en droit environnemental ; et de Mathias (Pierre Niney), lobbyiste brillant et homme pressé, vont voir leurs destins bouleversés et entremêlés par l’acte d’une agricultrice désespérée.

Dans son film, Frédéric Tellier semble faire l’état des lieux de sa vision de la France et oppose les gentils et les méchants, les lobbies et la société. En découle une direction artistique brute, voire physique. L’utilisation des lentilles anamorphiques permettent de donner une véritable texture aux images. Le résultat visuel est séduisant, mais il prend encore plus de sens lorsqu’il contribue au fond du film.
La couleur au service du propos
En effet, Goliath est un film de point-de-vu. Les séquences qui tournent autour de Patrick et France sont crépusculaires. La photographie diffuse la lumière. Elle donne une impression de douceur, volatile et fragile, à l’image de ses protagonistes. On retrouve une forte utilisation de couleurs chaudes (orange, jaune, vert, avec des tons foncés infinis). Elles pourraient rappeler la campagne, la famille, la nature. Mathias partage également ces couleurs, mais seulement lorsqu’il est entouré de ses proches. À contrario, la majorité des séquences actives du personnages baignent dans le froid (bleu, désaturé et aux tons foncés moins prononcés), à l’image de son personnage.

Goliath permet également à Pierre Niney d’aller vers un rôle de contre-emploi. Son personnage, lobbyiste, manipulateur et froid n’a rien d’héroïque. Il permet au comédien de s’ouvrir à de nouveaux horizons avec une certaine maturité. Il incarne diaboliquement bien le Goliath éponyme, s’opposant parfaitement au David que pourrait représenter le personnage de Gilles Lellouche. Dès lors se dresse un jeu d’oppositions et de contrastes, sur la forme et sur le fond du film. Pourtant, Frédéric Tellier semble mieux exceller dans l’un que dans l’autre…
Passionné par son sujet
Du long-métrage semble émaner une véritable ambition écologique et environnementale. On sent que le réalisateur y a mis tout son coeur. Le film est vraisemblable, grâce à son utilisation des médias, ou encore les réseaux sociaux dans sa mise en scène. Il est également réaliste, notamment par son approche quasi documentaire à certains instants. Les figurants donnent un caractère et un poids à l’entité des agriculteurs. Le réel rattrape le film et on a sincèrement envie d’y croire, et pourtant…

Malgré un véritable travail de recherche, un film complet, Goliath souffre de son manque de divertissement… Certes, ce n’est pas le rôle du film mais en résulte néanmoins un long-métrage très explicatif et très exposé. Cependant, on retient une véritable qualité dans la rédaction et dans l’interprétation des dialogues, venant lisser le tout et pardonner les quelques soucis de rythme du long-métrage.
Ce souci semble venir de la complexité de son sujet. Le montage est pourtant maîtrisé, avec plusieurs grosses ruptures. On remarque d’ailleurs la présence de black screen qui chapitrent le film par instant. Ils sont d’ailleurs accompagnés par une bande originale plutôt efficace, s’autorisant parfois des dérives rock and roll inattendues, à l’image de la violence de la réalité.

Goliath est un film qui ne manque pas de sincérité. C’est une oeuvre engagée, portée par des artistes qui le sont tout autant. Studio Canal propose également un documentaire d’un peu plus d’une heure, réalisé par Chloé Stéfani intitulé David(s) dans les bonus de sa version physique. Il raconte l’histoire du film, de son processus de création, de production, de post-production jusqu’à sa sortie publique. On y voit le combat d’une famille, celle du septième Art, voulant mettre en lumière une folie écologique rappelant bizarrement notre réalité.
Dilemme…
Ce troisième long-métrage est un peu étrange à aborder. Il est rempli d’intentions artistiques et politiques, il semble délivrer un véritable message écologique et pourtant… Il parait à certains moments fragile. Goliath semble compliqué à aborder par son sujet, mais il demeure pourtant un film d’utilité publique et pourrait éduquer certains spectateurs. Très proche de la réalité, on aurait pourquoi pas aimé un peu plus de drame, à l’image de La Nuée réalisé de Just Philippot, ancré dans un total autre registre, mais évoquant lui aussi des problématiques écologiques.
Goliath est disponible en DVD, Blu-ray et VOD chez Canal Studio.
Avis
Goliath est un long-métrage aux intentions fortes, sur sa forme et sur son fond. Le tout peut paraitre un peu grossier, et rempli pourtant sa mission... Le film est oubliable, mais demeure intéressant par un sujet actuel, par sa beauté technique et visuelle, par ses dialogues, et enfin par son casting cinq étoiles.