Mafia The Old Country devait être le renouveau d’une saga culte. Cette préquelle s’est révélée être un petit succès, de quoi d’hors et déjà programmer une suite déjà annoncée par Hanger 13. Mais est-ce que tout est au beau fixe au sein de la saga Mafia, ou alors la franchise barbote avec les poissons ?
Dès les premiers trailers, Mafia The Old Country affichait de jolies promesses. En effet, exit les États-Unis, la saga revenait aux sources mêmes de la Cosa Nostra en prenant place en Sicile ! Le berceau du crime organisé en un sens, pour un préquel se déroulant bien avant les évènements de la trilogie initiale. Pour autant, Mafia est une franchise vidéoludique qui aura constamment soufflé le chaud et le froid, malgré un nom bien installé.
Don dès le premier opus
Mafia premier du nom (qui a eu droit à un joli remake par Hangar 13 en 2020) était initialement développé par Illusion Softworks/2K Czech (notamment par les anciens papas de Kingdom Come Deliverance). Sorti en 2002, le soft se voulait une réponse à GTA III, plaçant notre héros Tommy Angelo dans la ville fictive de Lost Heaven (globalement New York) durant les années 30.

Sur fond de Prohibition, de guerre de familles et de trahison intestine, Mafia impressionnait avant tout pour son excellent scénario sans concession (Red Dead Redemption s’en inspirera par ailleurs en terme de finalité), sa reconstitution d’époque et bien sûr son ambiance directement héritée du Parrain ou bien Les Affranchis.
Faux bac-à-sable
Mais derrière sa nature de GTA-like, Mafia se servait avant tout de son monde ouvert en vue d’une immersion de chaque instant. Contrairement aux jeux de Rockstar, les développeurs n’y ont pas inclus de quêtes annexes ou de possibilité d’exploration accrue. Un mantra également appliqué pour Mafia II, sorti en 2010 et se déroulant à Empire Bay (un mix de Chicago, San Francisco et Boston) entre 1945 et 1951 !
Un second jeu de belle tenue, reprenant globalement la même formule avec une facture technique actualisée, et un scénario de qualité. Mais c’est bien Mafia III qui aura opéré une vraie scission dans la franchise, alors que la saga est confiée au studio Hangar 13. Ce 3e opus se déroulant en 1968 à New Bordeaux (la Nouvelle Orléans globalement) profitait en 2016 d’un traitement original, presque crépusculaire pour le genre.

En effet, on y suivait un vétéran afro-américain de la guerre du Vietnam en lutte contre la Mafia, dans un GTA-like au monde encore plus vivant. Le scénario était travaillé, mais les problèmes techniques et de game design s’accumulaient malheureusement. De quoi ternir le nom de Mafia, malgré là encore la Definitive Edition du premier opus sorti quatre ans plus tard.
Retour aux sources siciliennes
Mafia The Old Country arrive donc plein de promesses, tel un retour aux sources abandonnant définitivement la structure libre de Mafia III. Et il faut dire qu’Hangar 13 réussit plutôt bien son pari via les prémices d’un scénario aux personnages réussis. Plongés entre 1904 et 1907 dans une Sicile au bord de l’implosion (le grondement de l’Etna se fait entendre tout au long du jeu avant le climax volcanique), nous suivons Enzo Favara.

Vendu enfant pour éponger les dettes de son père, notre héros part de rien, respirant constamment le souffre au sein des mines de l’Etna avant de fuir et d’être recueilli par Don Spadaro. Un canevas classique, mais cruellement efficace d’autant que la mise en scène de Mafia The Old Country est de qualité. Le soft digère globalement toutes les influences du genre, mêlant ensuite guerre de territoire, amour interdit et désir d’émancipation.
Malheureusement, Hangar 13 s’arrêtera au milieu du guet en terme d’intentions, opérant un véritable retour en arrière en terme de game design pur. La ville était un décor grouillant de vie dans les précédents jeux Mafia, ici la Sicile s’apparente à un open-world que l’on explorera simplement si on veut trouver des collectibles inutiles. De plus les décors souvent champêtres ne proposent quasiment aucun PNJ, placés au hasard suivant les missions.
La fin de la Mafia, encore…
L’ambiance est délectable à plus d’un titre ceci dit, et Mafia The Old Country se veut terriblement singulier par son simple setting magnifiquement recréé. Dommage là encore qu’Hangar 13 ne sache toujours pas optimiser un jeu : même sur PS5 Pro, le titre a du mal à tenir les 30 fps (y compris en mode Performance!) lors des séquences de course à haute vitesse.

C’est bien dommage, car Mafia The Old Country oscille entre 4 boucles de gameplay : gunfights scolaires, scène de conduite/à cheval plaisantes, infiltration sommaire (avec une IA débile de surcroît), et surtout des pugilats au couteau réussis où timings et contres sont importants pour triompher. Mais malgré cette diversité régulière, le titre de Hangar 13 se contente du minimum syndical, via un game design souvent obsolète semblant avoir 15 ans de retard !
Un bien triste constat donc, d’autant que l’intrigue de Mafia The Old Country se contentera finalement de nous amener en terrain connu, plutôt que de pleinement surprendre. Reste là encore sa période inédite, et les promesses d’une suite (à Lost Heaven ? Empire Bay ?) visiblement déjà en chantier. Pour autant, difficile de ne pas être déçu par la tournure d’une saga initialement culte, désormais reléguée à du simili-GTA-like programmatique, aux ambitions largement amoindries, et qui n’est désormais plus du tout une locomotive vidéoludique…

