Depuis le 16 octobre et jusqu’au 19 janvier 2025, la Maison Européenne de la Photographie (MEP) présente son exposition Science/Fiction – Une non-histoire des plantes. Un récit vivant.
Dans les récits de science-fiction, l’aspect fictif des faits est toujours expliqué à partir d’un point de vue scientifique. La science devient le moyen de justifier des histoires imaginées par les auteurs. Il est ainsi possible pour le lecteur de visualiser un monde qui dépasse sa propre réalité. Et si les plantes étaient elles aussi capables de nous montrer qu’entre Science/Fiction il n’y a qu’un pas ? Ce petit pas qui relie l’observation et l’expérimentation, à la création et à la mystification.
A travers son exposition Science/Fiction – Une non-histoire des plantes, la MEP utilise le médium de la photographie pour tenter de répondre à cette question. L’image devient alors un moyen d’appréhender le vivant de deux manières différentes : d’un côté, on étudie le végétal, établissant un rapport de domination avec lui ; de l’autre, le végétal se libère et se place au-delà du réel. Construit en six chapitres, le parcours de l’exposition suit la construction du roman de science-fiction et relie entre elles les œuvres d’une quarantaine d’artistes de nationalités et d’époques différentes.
Chapitre I et II : la science
« La science est une fiction. Faire de la science- fiction est carrément inutile. »
Jean Painlevé
Ainsi s’ouvre le Chapitre I – L’agentivité des fleurs de l’exposition. Dans cette première salle, des photographies colorées d’Elspeth Diederix dialoguent avec celles en noir et blanc de Karl Blossfeldt. Bien que l’esthétique de l’image soit totalement différente, les deux artistes proposent une approche objectivante de la plante qui devient une matière brute à décomposer. La plante est observée sous tous les angles, agrandie et synthétisée. Le jardin n’est plus qu’un espace d’expérimentation où l’artiste exprime sa fascination pour le végétal.
Dans les salles suivantes se mêlent à la photographie, la vidéo et la pellicule. Des œuvres de Stan Brakhage, Anna Atkins, Sam Falls ou encore Max Reichmann sont présentes. La plante se transforme en danseuse, en insecte, en mosaïque ; l’abstraction fait son apparition ; les expérimentations sur toile ou pellicule donnent naissance à des œuvres qui se détachent du réel. Malgré tout, les artistes gardent cette approche scientifique, analysant le mouvement, la croissance et la matière végétale.
Dans le Chapitre II – Symbiose et contamination des artistes telles qu’Angelika Loderer, Rebekka Deubner, Anaïs Tondeur ou Angelica Mesiti présentent des échantillons d’écosystèmes. Que se passe-t-il si la plante est exposée à de la radioactivité ? Si elle est privée d’oxygène ? Si un mycélium se propage ? Autant de questions qu’abordent l’exposition à travers des productions artistiques variées et originales.
Chapitre III à VI : la fiction
“Quand la physique se bat pour nous libérer des liens physiques, l’esprit, lui, n’a déjà plus de limites.”
Peter Hutchinson
Et voilà que s’ouvre le chapitre Au-delà du réel présentant des plantes dont on ne sait si elles ont existé ou non. La frontière entre réel et imaginaire se floute, les végétaux se métamorphosent en créatures hybrides. Là, un paysage de Peter A. Hutchinson, ici les études botaniques de Ruperto et Heloft, là-bas une Lavandula Angustifolia de Joan Fontcuberta. La réalité devient fiction, création pure de l’esprit de l’artiste.
D’observateur nous passons à sujet observé dans le Chapitre IV – Les plantes vous observent. Tel un renversement, les plantes prennent peu à peu le dessus, se transformant en extraterrestres, en prédateurs, en une espèce dangereuse pour l’homme. Inspirées de récits, les photographies de Kalev Erickson jouent sur l’angle de prise de vue pour nous faire voir ce qui était caché. La monstroplante est partout…
Et puis… Dans les deux derniers chapitres, le rythme s’accélère, comme si l’histoire était encore à écrire, à inventer. Dans le futur, tout est possible et la plante se change en un moyen d’appréhender ce qui viendra. Réchauffement climatique, destruction de la nature par l’urbanisation… Les artistes prennent en compte ces réalités pour en proposer des alternatives. Les végétaux reprennent alors leurs droits, donnant naissance à des écosystèmes qui apparaissent dans des lieux invraisemblables. Jusqu’à l’œuvre ultime, une vidéo générée par IA qui nous montre une symbiose entre plantes et humains, qui a été mais qui n’est plus. Sauf si…
Science/Fiction – Une non-histoire des plantes fait dialoguer ses chapitres. Une exposition d’une grande richesse pensée comme un être vivant où chaque molécule interagit avec les autres.
Une exposition à découvrir jusqu’au 19 janviers 2025 à la Maison Européenne de la Photographie (MEP).
Avis
La MEP propose avec Science/Fiction - Une non-histoire des plantes une exposition où les végétaux sont étudiés d'un point de vue scientifique avant de reprendre leurs droits dans la fiction. Une magnifique découverte du vivant.