Les producteurs est une comédie musicale humoristique en provenance de Broadway et mise en scène par Alexis Michalik.
Les producteurs, c’est « LE spectacle du moment ». La comédie musicale dont les affiches tapissent la capitale et qui remplit sans difficulté la magnifique salle du Théâtre de Paris. C’est aussi (et tout s’explique) une mise en scène signé Alexis Michalik, que l’on ne présente plus, et dont nous découvrions il y a peu la dernière création, Une histoire d’amour. C’est un succès annoncé donc. Et pourtant, pourtant…
Un producteur véreux parvient à manipuler son comptable pour le convaincre de monter avec lui une comédie musicale désastreuse à Broadway qui leur permettra d’échapper au fisc. Au menu : « des chansons pourries, des textes à pleurer. » Donné à Broadway à partir de 2001, ce spectacle multi-primé et resté à l’affiche plus de 6 ans débarque à Paris.
Du grand spectacle
Des décors qui tombent du ciel, des chorégraphies virevoltantes, des scènes de claquettes endiablées, des musiques entraînantes, des musiciens qui jouent en live depuis les balcons, un lâcher de confettis, un lancé de petites culottes… On ne peut pas le nier, Les producteurs est un véritable show, parfaitement rôdé et sans temps mort, dont l’énergie nous porte d’un bout à l’autre.
Quelques scènes sont particulièrement inventives et esthétiques. Notamment la chorégraphie des employés du cabinet comptable avec leurs chaises à roulettes et leurs visières fluo ; ou bien celle des mamies qui battent la mesure avec leurs déambulateurs ! On est surpris, on rit, et on se demande comment notre voisin a bien pu piquer du nez aussi souvent !
Les producteurs… à l’ancienne
Mais, si la forme est une vraie réussite, pour le fond c’est une autre histoire… Car, si Michalik apporte une touche de modernité à la mise en scène, cette comédie américaine de 1967 réalisée par Mel Brooks n’a pas franchement bien vieilli et rassemble ce qui ne s’apparente plus aujourd’hui qu’à des clichés et caricatures de mauvais goût. D’autant que le texte est assez faible et le second degré pas du tout évident. « Je ne vais pas faire pipi, je vais faire carrière »… On vous laisse juger.
Ainsi, outre quelques scènes de boulevard dénuées de toute finesse, on retrouve des personnages gays excessivement efféminées et maniérés, un personnage noir dont les attributs sont mis en avant par un legging ultra moulant, des comportements masculins machistes à souhaits, et un rôle féminin dont les attraits physiques semblent être la seule justification de sa présence. Cette réplique d’Ulla résume d’ailleurs assez bien l’esprit : « Faut pas être un génie, être à genoux ça suffit. » Bref, un humour d’une autre époque, plutôt malaisant…
Divertissant, sans plus
Ce sont d’ailleurs les hommes que l’on célèbre dans cette pièce. Les femmes, elles, sont soit vieilles et avides d’amour, soit potiches, soit absentes. Roxane le Texier n’en est pas moins excellente dans son rôle d’Ulla. On se prend aussi d’affection pour ce comptable un brin hystérique avec son doudou bleu – interprété par Benoît Cauden – qui se fantasme producteur.
Ce-dernier est encore loin de s’imaginer qu’il est sur le point de produire une comédie néo-nazie dans laquelle des comédiens déguisés en bière ou en saucisse célèbreront un Hitler tourné en ridicule avec son brassard pailleté et sa chorégraphie de claquettes ! Cette caricature irrévérencieuse du dictateur allemand nous a d’ailleurs fait penser à une scène très réussie de l’excellente pièce de Melody Mourey, Les crapauds fous.
Les producteurs nous ont donc fait passer un moment en demi-teinte et sans grands éclats de rire. Aussi, si vous aimez les spectacles musicaux, les mises en abyme, le second degré assumé ET la qualité : allez plutôt voir Encore une fois au Funambule Montmartre. Là au moins vous ne serez pas déçus.