Le Horla est une adaptation du chef d’œuvre de Maupassant qui nous emporte dans les méandres de l’âme humaine.
Le Horla est un texte fascinant qui nous emmène là où la folie et le fantastique se frôlent, où le rêve et le cauchemar s’entremêlent. C’est le récit sous forme de journal intime d’un homme qui échappe à lui-même, en proie à une folie dont nous observons l’évolution à travers l’adaptation et la mise en scène très vivantes et intelligentes de Frédéric Gray, et l’interprétation généreuse de Guillaume Blanchard.
« Comme il est profond, ce mystère de l’invisible ! Nous ne le pouvons sonder avec nos sens misérables, avec nos yeux qui ne savent apercevoir ni le trop petit, ni le trop grand, ni le trop près, ni le trop loin, ni les habitants d’une étoile, ni les habitants d’une goutte d’eau… »
Une incarnation vivante
Guillaume Blanchard donne littéralement vie aux paysages qu’il décrit et dont on saisit d’abord les tonalités printanières. Mais cela ne dure pas, la lumière se fait bleutée et le vent se lève tandis que la pensée du narrateur se trouble. Les jours passent et la fièvre s’accentue. Fièvre du corps, mais aussi de l’âme tandis qu’une mystérieuse présence invisible se met à l’obséder…
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C’est alors la peur qui s’installe – parfois teintée de colère – dans une obscurité parfois totale où seuls les mots de plus en plus décousus résonnent. Guillaume Blanchard, totalement habité, nous livre une interprétation impeccable et captivante d’un bout à l’autre. Ainsi, on observe cet homme en pleine perdition qui s’interroge de plus en plus sur sa santé mentale. Et pour cause, la folie s’installe, doucement mais sûrement. Elle envahit peu à peu ses pensées, son corps, son esprit.
Mais est-ce bien elle ? Car chacune des apparitions d’Olivier Troyon – qui interprète en alternance avec Frédéric Gray tous les rôles secondaires de la pièce – vient distiller un peu plus de doute et d’angoisse…
Une mise en scène envoûtante, mais trop bavarde
La mise en scène travaillée et inventive de ce spectacle est à la fois l’un de ses points forts et peut-être à la fois son seul point faible. Car l’intention générale est bonne, et on se laisse volontiers séduire par ce décor fait de cadres suspendus qui semblent enfermer de plus en plus le personnage dans ses doutes, ses angoisses, ses hallucinations. Convaincants aussi ces jeux d’ombres qui sèment le trouble, et ces ambiances lumineuses qui vont jusqu’à faire planer sur certaines scènes une atmosphère fantasmagorique très réussie.
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Pour autant, l’ensemble gagnerait à être allégé de quelques effets sonores qui viennent inutilement paraphraser une émotion déjà exprimée, expliciter une ambiance déjà posée. Car, à trop vouloir en faire, ce qui fonctionne plutôt bien finit par un peu nous lasser. En effet, entre les nombreux bruitages, jeux de lumières, et les noirs à répétition, notre imagination se sent un peu à l’étroit et l’on a parfois du mal à se laisser pleinement transporter par le texte.
Un Horla qu’on aime un peu, beaucoup…
Cette adaptation n’en reste pas moins réussie, et nous offre un moment prenant et captivant en compagnie de deux comédiens qui sont clairement à la hauteur de l’œuvre de Maupassant. Et c’est un plaisir de redécouvrir ce texte riche de réflexions sur l’Homme, sa pensée, ses croyances, et qui nous offre une exploration intime au cœur de la folie.
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Une folie que nous approchons de près, partageant les troubles grandissants du narrateur qui tente de s’en libérer par tous les moyens possibles. Ce Horla est une bien jolie découverte donc, à applaudir à… À la folie Théâtre ! Ça ne s’invente pas !
Le Horla, de Guy de Maupassant, adaptation et mise en scène de Frédéric Gray, avec Guillaume Blanchard et Olivier Troyon en alternance avec Frédéric Gray, se joue jusqu’au 30 janvier 2022 à À la folie théâtre.
[UPDATE 2024] Se joue du 03 novembre au 07 novembre 2024, du lundi au mercredi à 21h & les dimanches à 18h.
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