La promesse de l’aube est un seul en scène qui offre une adaptation vivante et incarnée du chef d’œuvre de Romain Gary.
La promesse de l’aube est un roman autobiographique du seul auteur récompensé de deux prix Goncourt. Romain Gary y raconte sa jeunesse dans le sud de la France, son déracinement, sa relation à sa mère, ancienne comédienne russe qui l’élève seule. Dans ce seul-en-scène, Franck Desmedt incarne l’adolescent puis l’homme, mais aussi une quinzaine d’autres personnages. Un comédien que l’on ne présente plus et qui, une fois de plus ici, sublime ce qu’il touche.
« Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin de ses jours ».
Une relation maternelle étouffante
Tandis que les notes de « What a wonderful world » de Louis Armstrong planent encore dans l’air, Romain Gary nous livre le récit d’un destin peu ordinaire. Il raconte son arrivée en France alors qu’il était adolescent. Une France qu’il perçoit comme un mythe, un « chef d’œuvre poétique ». Puis il confie ses premiers émois pour la jeune et espiègle femme de ménage. Mais surtout, surtout, il raconte le poids d’un amour maternel si passionnel et inégalable que la partie romancée du récit le fera se poursuivre au-delà même de la mort.
Car c’est probablement elle, le personnage principal de cette œuvre en réalité. Cette mère omniprésente, à la fierté et à l’admiration sans limite, à l’amour littéralement dévorant. Cette mère qui sacrifiera tout pour un fils qui, elle n’en doute pas une seconde, deviendra héros, Général, Ambassadeur de France. Rien de moins.
Un avenir fantasmé et des attentes à la hauteur desquelles Romain Gary passera sa vie à essayer de s’élever. Pour cela, il s’emploiera à écrire à son tour un chef d’œuvre digne d’un Hugo, d’un Balzac ou d’un Tolstoï. Il ira même jusqu’à envisager un attentat contre Hitler tandis que la seconde guerre Mondiale sévira. Il deviendra finalement aviateur, résistant, romancier et diplomate.
Une adaptation rythmée et vivante
Récompensé d’un Molière pour son rôle dans Adieu Monsieur Haffmann, Franck Desmedt est une nouvelle fois brillant. Dans un décor sobre dont les rares éléments suffisent à recréer l’époque et l’ambiance, le comédien fait littéralement vivre le texte et ses différents personnages. Porté par d’habiles jeux de lumière venant ça-et-là éclairer la pénombre ambiante, il habite la scène, occupe l’espace, et parvient à rendre ce récit très visuel.
Ainsi, aucune longueur ne s’invite dans cette adaptation du chef d’œuvre de Romain Gary. On reste captivé par la présence du comédien qui investit son rôle de manière passionnée, par l’élégance de son interprétation, par sa diction dont les variations donnent une véritable musicalité au récit. Et puis, si l’on est souvent touché, transporté par la finesse, la délicatesse et la poésie de ce texte que l’on prend beaucoup de plaisir à redécouvrir, on rit aussi beaucoup !
En effet, à cet humour que Romain Gary utilisait comme une arme, Franck Desmedt ajoute sa propre touche, ce qui lui permet de créer une forme de complicité aussi inattendue que réjouissante avec le public. Ainsi, le plaisir et l’amusement du comédien à faire vivre les personnages de ce récit sont communicatifs et c’est le cœur léger que l’on revient de ce fascinant voyage.
La promesse de l’aube, de Romain Gary, avec Franck Desmedt, mise en scène Stéphane Laporte et Dominique Scheer, se joue du 15 avril au 3 juillet 2022, du jeudi au samedi à 19h, le dimanche à 17h, au Théâtre de l’Oeuvre.
[UPDATE 2022] Se joue du 07 au 30 juillet 2022 au Théâtre Le Petit Louvre, au Festival OFF d’Avignon.
Retrouvez tous nos articles consacrés au Festival Off d’Avignon ici.
Avis
Avec sa manière si personnelle d'incarner ses rôles, Franck Desmedt nous fait redécouvrir toute la poésie de cette œuvre. À travers une sélection de morceaux choisis, il fait vivre sur scène cet amour maternel qui sera à la fois la plus grande force de Romain Gary, et qui rendra son cœur incapable de trouver un autre port d'attache à la hauteur.