Hannibal Lecter : Les Origines du mal poursuit, après le fade Dragon Rouge, sa fouille dans le passé du célèbre docteur cannibale. Pour un plat qui se rapproche plus du navet que de la viande saignante.
Hannibal Lecter : Les Origines du mal voit pour la première fois l’absence d’Anthony Hopkins dans la peau du célèbre docteur cannibale et de Thomas Harris, créateur du célèbre personnage en scénariste attitré. Dino de Laurentiis poursuit son exploration du passé d’Hannibal Lecter (et surtout de sa poule aux œufs d’or) et lance le projet avant même la parution du livre de Thomas Harris dont le film est adapté. L’auteur, très impliqué, attaché à l’adaptation a même tenu à écrire lui-même le scénario et à participer à l’élaboration du script avec le réalisateur, Peter Weber, alors auteur de l’acclamé Jeune fille à la perle.
Hannibas les steaks
Et dès le début, Hannibal Lecter : Les Origines du mal dévoile sa curieuse odeur. Porté par un Gaspard Ulliel à des années lumières de l’ironie funeste d’Anthony Hopkins, le film rejoint celui de Ridley Scott dans sa volonté d’un traitement beaucoup trop solennel du personnage, retirant à Hannibal Lecter tout de sa présence monstrueuse et inquiétante. Le film enchaîne ainsi les poncifs en passant de la Deuxième Guerre Mondiale au mythe des samouraïs dans un premier degré aussi ridicule qu’invraisemblable.
Poursuivant la lente mais sûre dégringolade de la saga initiée par le superbe Le Silence des Agneaux, Hannibal Lecter : Les Origines du mal se différencie cependant de Dragon Rouge dans sa gestion du rythme. Si le film de Brett Ratner relevait de la longue sieste, ce prequel de Peter Webber se trouve curieusement rythmé. Dommage que cette bonne gestion du temps soit mise au service d’un récit grotesque qui aligne les choix de mauvais goût avec une imagination parfois débordante.
Végé, t’as rien
Parce qu’Hannibal Lecter : Les Origines du mal demeure sûr de lui malgré l’absence totale de cohésion de son récit. Sûr de ses ambitions et enchaînant les époques et les pays en prenant soin de respecter un contexte géopolitique complexe retranscrit à la truelle, ce prequel étonne par sa vantardise qui ne se déboulonne jamais. Le film de Peter Webber passe ainsi son temps à voir plus gros que son ventre en voulant croquer la naissance du docteur cannibale dans un mélodrame historique croisé avec le thriller et le film d’action… qui ne donne au final qu’une série Z hilarante à son propre insu.
On peut ainsi ressentir le même plaisir déviant infligé à Michael Myers par Busta Rhymes dans un désormais culte combat de Kung-fu vu dans Halloween : Resurrection lorsqu’Hannibal Lecter apprend, sabre à la main, la maîtrise de cet outil de samouraï jusqu’à en revêtir un masque semblable devenu propre au personnage de Richard Harris. De victime de la Seconde Guerre Mondiale à soldat féodal japonais, le film ne se refuse rien dans l’étalage du ridicule, mais cependant à l’insu de toute vraisemblance et très loin de la présence inquiétante du personnage dans le troublant Silence des Agneaux.
Quel gâchis alors de voir une distribution internationale de premier choix (Gong Li, Dominic West et Rhys Ifans) se démener dans un projet sans queue ni tête uniquement motivé par les billets verts. Vert, indice important du repas qu’est finalement Hannibal Lecter : Les Origines du mal. Loin de la viande saignante, un buffet qui ressemble de très près à un très beau navet.