Drôle voit Fanny Herrero, scénariste déjà derrière les succès de Dix pour cent, s’attaquer au monde du stand-up parisien pour Netflix. Pour un très attachant portrait de la jeunesse et d’un métier très loin de la blague gratuite.
Drôle était ultra-attendue. Parce que la patte de Fanny Herrero sur le monde des séries françaises s’est révélée aussi incontournable que toujours soldée par d’immenses succès critiques et publics, des succès de Dix pour Cent, Fais pas ci, fais pas ça en passant par la seconde saison de la très réussie Kaboul Kitchen. Drôle s’évertue ainsi à nous décrire l’envers du décor du monde du stand-up, en s’éloignant des paillettes de Dix pour Cent pour nous parler des galères de quatre jeunes humoristes au détour de 6 épisodes très attachants.
Déboires et des rires
Drôle explore donc le monde du stand-up au détour de quatre jeunes humoristes, avec en épicentre un comedy club : Aïssatou (Mariama Gueye), Bling (Jean Siuen), Nazir (Younès Boucif) et Apolline, interprétée par la révélation bouillonnante de cette série : Elsa Guedj. Très éloignée des autofictions propices au genre, de Larry à son nombril à Platane où encore récemment Le Meilleur de Moi-Même de Blanche Gardin, Fanny Herrero dépeint plutôt le quotidien de cette jeunesse parisienne à la manière d’un Jacques Audiard dans Les Olympiades. Parce que Drôle délaisse souvent les blagues pour prendre le pouls d’une jeunesse hétéroclite confrontée aux aléas d’un métier qui ne demeure parfois drôle que sur le papier.
Si l’on s’attache ainsi instantanément à toute cette galerie de personnages, c’est grâce à l’écriture, fine et jamais grossière de Fanny Herrero, qui dépeint ici une fois de plus l’envers du décor avec un talent égal à celui de Dix pour Cent. Parce que derrière le rideau, lorsque les lumières sont éteintes, la réalité est moins rose et le métier d’humoriste se trouve dépeint sous toutes ses coutures, des blagues qui empoisonnent le quotidien, au succès instantané qui pourrit et désarçonne jusqu’à la culture du buzz bête et méchant.
(Pas) juste pour rire
Il y a ainsi dans Drôle bien plus qu’une efficacité drolatique où qu’une amusant comédie sur le monde du stand-up. La série de Fanny Herrero dépeint ainsi avec beaucoup de justesse une jeunesse comme le reflet actuelle d’une France divisée, tous réunis sur la même scène pour faire rire une société qui en a bien besoin. Écarts sociétaux, égalité des chances, racisme, liberté d’expression et sexualité : tout passe ici à la moulinette avec beaucoup de fraîcheur pour un tableau contemporain aussi spontané qu’un rire.
Ainsi, si l’on restera plus de côté concernant la vision d’une bourgeoisie étriquée et étouffante pourtant campée par la toujours convaincante Pascale Arbillot, Drôle se propose comme une chronique attachante et très contemporaine de notre chère jeunesse. Loin des comédies faciles sur le fossé générationnel où une énième vision déconnectée des jeunes adultes, Drôle croque avec pertinence et délicatesse une jeunesse prenant de front les problèmes sociétaux, avec toujours le talent d’en rire.
Première vraie bonne série française de Netflix après les horribles Marseille, Disparu à jamais (et on en passe et des pires), Drôle consacre une fois de plus le talent de Fanny Herrero comme fine observatrice d’un monde, qui loin des paillettes, s’avère ici aussi finement croqué et bien senti qu’une bonne blague. La boucle est bouclée.
Drôle est disponible sur Netflix.
Avis
Drôle s'avère bien plus attachant qu'une comédie au tempo comique infernal sur le monde du stand-up. La série de Fanny Herrero se révèle ainsi comme le portrait juste et contemporain d'une jeunesse prenant de front les aléas d'un métier et de toute une société avec l'immense mission de nous en faire rire.