Après des dessins animés, des films en live action, les Irréductibles gaulois débarquent en série animée sur Netflix dans Astérix et Obélix : Le Combat des Chefs. Une belle entreprise made in Chabat, même si un peu en demi-teinte.
Panoramix rendu fou et incapable de préparer la potion magique après s’être pris, non pas le ciel mais un menhir sur la tête, le village gaulois va devoir affronter les Romains qui profitent de l’occasion pour organiser le fameux Combat des Chefs et tenter, enfin, de conquérir toute la Gaule. Première série animée sur Astérix et Obélix, cette itération produite et distribuée par Netflix propose donc un joyeux mélange de différents albums, pour un résultat malheureusement essoufflé, dès sa superbe introduction passée.

Créée, réalisée et co-écrite par Alain Chabat, Benoît Oullion et Pierre-Alain Bloch (Piano), la mini-série de 5 épisodes de 30-40 minutes propose donc de retrouver Astérix et Obélix : Le Combat des Chefs, modernisé via des thématiques actuelles et l’humour de l’ancien Nul, toujours aussi compatible avec la verve de Goscinny ou le style de Uderzo. Une combinaison gagnante pour un projet sans autre prétention que d’être la déclaration d’amour de Chabat à ses idoles. Dommage par Toutatis que l’entreprise se révèle finalement en dents-de-six.
Mission Netflix
Car si l’invasion télévisuelle se heurte à quelques problèmes, ils viennent surtout de la tentative de réadapter le fameux Coup du Menhir pour le dissocier de l’aventure avec le Devin et le replacer dans son contexte naturel, le Combat des Chefs. Fini les digressions psychédéliques et terrifiantes du dessin animé de Philippe Grimond sorti en 1989 et bonjour l’image de synthèse gentillette et lumineuse. On rend à César ce qui appartient à César dans un soucis de révérence bienvenu, même si cette nouvelle adaptation parait un peu désuète et anecdotique face aux délicieux traumas qui ont bercé notre enfance.
Pourtant ce Combat des Chefs prend des risques qui payent, notamment dans sa première partie avec par exemple cette originstorix de Obélix qui prend place dans les années -70, l’occasion pour le show de s’amuser d’une palette de couleur passée tout en jouant sur l’aspect pop du village et de son environnement ou de ses références multiples, et bien amenées. C’est malin et on retrouve la patte de Chabat bien appliquée sur tout ce lore bien connu du public. Aucune fausse note de ce côté.

De même, l’aspect graphique de ce Astérix et Obélix : Le Combat des Chefs nous met une belle baffe dans les mirettes. Si on met de côté l’aspect Teletubbies et enfantin des délires de Panoramix (encore une fois très loin des délires glauques du Coup du Menhir), force est de constater que cette série animée propose un style graphique parfaitement adapté. Elle use ainsi d’aplats de couleurs vives et de cartons typographiques pour assumer la filiation aux bandes dessinées originelles tout en s’offrant une vrai identité. De belles idées qui, jointes à un style 3D proche de la sculpture ultra réaliste des personnages emblématiques du village gaulois, offrent une belle plus-value graphique rafraîchissante, à la croisée du Spider-Verse et des films Aardman (Wallace & Groomit).
Enfin, le casting vocal y est également pour beaucoup dans son parachèvement artistique. Ainsi, Chabat en Astérix est parfait, l’osmose entre Roger Carel ou le Clavier des débuts, tandis que Gilles Lellouche en Obélix reste une valeur sure et convaincante. Mais l’autre révélation de cette entreprise demeure Thierry Lhermitte en Panoramix, bluffant dans le rôle du druide. A leurs côtés on retrouve pêle-mêle de stars, de Jérôme Commandeur à Gregory Gadebois , Laurent Laffite en passant par Géraldine Nakache, les deux trublions du Palmashow ou encore Alexandre Astier. Du génix !

Non ce qui cloche c’est paradoxalement l’aspect narratif. Si l’introduction de ce Combat des Chefs reste très pertinente, tant dans son référencement que dans son originalité, la deuxième moitié se heurte à un ventre-mou des plus curieux. L’exposition et la présentation des enjeux et personnages passées, coincé dans son format respectueux de la bande-dessinée originale, l’espace scénaristique semble quelque peu dispersé. Les miettes narratives se suivent et permettent d’amener logiquement à un climax malin mais l’ensemble parait cependant sans véritable force d’écriture motrice. L’occasion d’offrir des payoffs à des vannes sorties plus tôt dans l’anime ou qui tentent de rebondir sur des évènements sans grande surprise.
En même temps, pas facile d’adapter à la lettre un des albums les plus iconiques du petit Gaulois, alors que ce n’est paradoxalement pas la plus passionnante de ses aventures. Ici Chabat et son village essayent de lui rendre hommage en épousant sa ligne narrative initiale mais se heurtent finalement à de trop faibles rebondissements par rapport au niveau phénoménal apporté à l’introduction. Certes les références et la démesure s’appliquent aux constructions romaines et au stade dédié au Combat des Chefs pour un dernier acte rigolo, mais le tout semble retomber assez vite comme un soufflet. Une fin conceptualisée au forceps et dans l’urgence de la résolution sans véritables fulgurances d’écriture ou de mise en scène, comme si toutes les bonnes idées avaient été brossées trop vite et trop tôt. Damnix.
Seul dénouement (ou espoir) qu’on nourrit, est qu’il s’agisse là d’un galon d’essai pour une possible franchise validée par Netflix pour que l’équipe aux commandes passent à l’adaptation d’albums plus pertinents, et contemporains, pour développer ce concept et asseoir de nouvelles aventures d’Astérix plus grandiloquentes (on pense à Astérix Gladiateur, en Corse, Le Tour de Gaule, le Bouclier Arverne ou la Zizanie par exemple) sur notre téléviseur. Car finalement, là où Chabat et ses irréductibles restent le plus performants (et fidèles aux valeurs et modèle de Goscinny et d’Uderzo), c’est dans la satire et le discours politique engagé, aspect définitivement trop timidement exploré dans ce Combat des Chefs, alors qu’il y avait matière…
Néanmoins, ce Combat des Chefs demeure une chouette adaptation d’un album iconique de Astérix, empreinte de la patte de Alain Chabat et de saillies humoristiques parfaitement associées à l’ambiance du héros gaulois. Mais peut-être que la potion magique aurait mérité plus d’épices, pour plus de singularités.
Astérix et Obélix : Le Combat des Chefs est disponible sur Netflix dès le 30 avril.
avis
La série animée Astérix et Obélix : Le Combat des Chefs est une chouette adaptation d'Alain Chabat, magnifique et pertinente à bien des égards, même si le résultat demeure finalement assez fade sitôt sa magnifique introduction passée.