Attendue comme la série de cette fin d’année, Netflix présente son adaptation de The Witcher, malheureusement trop généreuse pour être pertinente.
Un chasseur de monstres doit trouver une princesse dont il est le protecteur destiné alors qu’une force obscure menace le monde. Un synopsis qui sent bon l’heroic fantasy puisque The Witcher made in Netflix est l’adaptation des romans éponymes de Andrzej Sapkowski également transposés en jeux vidéo. Or la série tente de jouer sur les deux tableaux, se basant sur les livres d’une part tout en se reprenant l’iconographie vidéoludique. Deux fois plus de contraintes, deux fois plus de risques de se foirer.
Surtout que Game of Thrones terminée, chaque plateforme de SVOD tente de trouver la perle rare qui réunira les afficionados du médiéval fantastique comme Amazon et son Seigneur des Anneaux. Pour le coup, avec The Witcher, Netflix trouve une manne narrative maligne avec magie et découpage de Striges sans oublier des problématiques sous-jacentes plus incisives comme le racisme ou la xénophobie entre les différents peuples. En bref une série qui fourmille de bonnes intentions mais qui manque cependant de personnalité.
Le syndrome Eragon
Introductive, cette première saison peine à trouver son rythme et se contente de poser nonchalamment les bases d’un univers trop gourmand pour ses ambitions. Engloutie dans une présentation très dense et très référencée, la série tente d’adapter Le sang des Elfes, le premier roman de Sapkowski, ainsi que les nouvelles le Sorceleur, l’Epée de la providence et Le Dernier vœu, chacune composées de nombreuses histoires focalisées sur les différents protagonistes. Résultat une histoire trop complexe où deux lignes de dialogues résument des pans entiers de l’histoire assez maladroitement. Une rude épreuve pour la créatrice Lauren Schmidt Hissrich qui offre à The Witcher une construction pénible, mal fichue. Si différentes temporalités viennent apporter une nuance narrative intrigante, le show alterne entre épisodes déconnectés et intrigue générale, entre feuilleton et série bouclée. Bref, on a l’impression d’assister à des quêtes éparses d’un RPG qui se met en place doucement, sans trop forcer.
Pourtant, le modèle du jeu vidéo était là pour faciliter la transposition et permettre à la série de nous offrir un monde rutilant mais également crasse et violent parce que chasser des monstres, c’est salissant. Or The Witcher ne découpera finalement que peu de méchantes créatures pour se contenter d’errer dans de somptueux paysages et un costume trop seyant pour être crédible. Malgré tout le dévouement montré par Henry Cavill pour donner vie à un Geralt plus alexithymique (dénué d’émotions) que jamais, le Sorceleur patauge dans une intrigue trop bavarde et gentillette.
Paresseux, le show de Netflix s’embourbe dans un récit calciné par un manque criant de mise en scène. Vides, dénuées de vie ou de décorum, les scènes d’intérieurs et en forêts se suivent et se ressemblent pour donner à l’ensemble une saveur insipide. Le montage et la réalisation on ne peut plus linéaires ne fascinent pas et ne mettent pas en valeur des effets spéciaux pas folichons. The Witcher est tout public et tente de satisfaire les fans aussi bien que le profane en montrant une paire de fesses ici ou une tête coupée par là. Une timidité dommageable où absence d’enjeux et de personnalité rend l’ensemble bien trop sage par rapport au récit (et aux jeux) pour adultes que nous attendions pourtant.
Perdue dans le blabla indigent et une réalisation endormie, The Witcher souffre pour l’instant d’une suspension d’incrédulité malmenée alors que le show attend désespérément qu’il se passe quelque chose de passionnant. La saison 2 devrait améliorer tout ça.