Le voyage de Molière nous offre une aventure extraordinaire en 1656, au cœur de la troupe de l’Illustre Théâtre de Molière.
Le voyage de Molière nous fait vivre l’aventure d’une troupe de théâtre, et pas n’importe laquelle ! En effet, tandis que Molière fête cette année ses 200 ans, Pierre-Olivier Scotto et Jean-Philippe Daguerre ont trouvé une bien belle manière de célébrer l’évènement !
Léo est un jeune homme du XXIème siècle, étudiant en médecine mais qui rêve d’être comédien. Tandis qu’il auditionne péniblement pour un rôle dans Le dépit amoureux, il fait un malaise et s’évanouit. Quand il rouvre les yeux, sa réalité n’est plus tout à fait la même… Car c’est en 1656 qu’il se retrouve, au beau milieu de le troupe de Molière qu’il vénère !
Un fabuleux voyage dans le passé
D’abord interloqué puis admiratif, l’enthousiasme de Léo séduit la troupe qui décide de l’engager. Oui mais en tant que quoi ? Car elle est déjà complète ! Qu’importe, il fera un parfait palefrenier, cuisinier, accessoiriste, cocher et professeur d’anglais ! Même si c’est rapidement sur les planches que le jeune homme talentueux va se faire une place…
Cela fait dix ans que ces saltimbanques parcourent les routes. Mais l’arrivée de la peste les menacent. En effet, les représentations de comédies deviennent interdites là où ils se trouvent. Jean-Baptiste Poquelin va alors devoir relever le défi d’écrire en quelques jours une pièce en alexandrins tandis que Madeleine Béjart et Marquise Du Parc devront déployer leur talent et leur charme pour tenter d’amadouer l’évêque et faire lever l’interdiction.
Un tourbillon d’énergie
La pièce commence très fort et l’on est immédiatement pris dans l’énergie folle qui anime cette troupe au rythme des airs entraînants de violon et violoncelle. Nos yeux pétillent devant cette joie partagée, cette franche camaraderie, cette passion pour le théâtre et cette agitation incessante et galvanisante. Pierre-Olivier Scotto & Jean-Philippe Daguerre nous plongent dans l’essence même du théâtre et nous immergent dans cette époque.
L’arrivée d’un personnage du 21ème siècle en 1656 donne lieu à des échanges plein de drôlerie. Car les références de Léo – dont nous devenons les complices – sont bien évidemment pour la plupart méconnues par ces artistes qui appartiennent à une réalité bien différente.
Ainsi, on rit devant leur air interloqué lorsque Léo évoque la Place de la République, la Comédie française, Louis Jouvet, les Beatles, ou encore les « studios » parisiens ! On se régale aussi de ce cours d’anglais – ou plutôt d’anglois ! – à partir de la chanson Hey Jude des Beatles, groupe évidement encore inexistant ! Et l’on est attendri lorsque le charme opère entre Léo et Marquise, mais qu’il s’empêche de laisser cette relation naître, connaissant l’avenir qui attend la jeune femme.
Un récit exaltant…
En habitué du Festival, Jean-Philippe Daguerre, qui signe également la mise en scène de nombreux autres spectacles dans cette édition 2022 – parmi lesquels Adieu Monsieur Haffmann, Le petit coiffeur et Les vivants – nous enchante une fois de plus de son talent qu’il associe ici à celui de Pierre-Olivier Scotto, à qui l’on doit notamment Là-bas, de l’autre côté de l’eau. Ce décor évolutif avec son plateau circulaire qui tourne sur ses roues est de toute beauté et nous donne une perpétuelle impression de mouvement.
Le récit est prenant. On est captivé par cette double intrigue, à savoir : comment la fameuse troupe de Molière va-t-elle se sortir de ce mauvais pas, et quelle sera l’issue de cette aventure pour Léo qui appartient à un autre espace-temps ? Le tout est parfaitement lié, fluide et merveilleusement joué par ces huit comédien(ne)s de la troupe Le grenier de Babouchka dont l’engagement et le plaisir de jouer ensemble transcende leurs rôles.
Nous retiendrons notamment la prestation tout en charme de Geoffrey Palisse, excellent dans ce rôle de Léo, tandis que Stéphane Dauch incarne un Molière charismatique. Violette Erhart, dont nous avions déjà identifié le talent pour la mise en scène grâce à la pièce Oleanna, dévoile également ici celui de comédienne et de violoniste.
… qui s’essouffle légèrement
Avec une entrée en matière si exaltante, forcément la moindre baisse de rythme se fait immédiatement sentir. C’est un peu comme si un feu d’artifice commençait par le bouquet final. La suite, aussi belle soit-elle, nous laisse un peu frustrés des émotions si vives procurées dans les premiers instants.
Et c’est ce qui se passe avec Le voyage de Molière. Le fond prend peu à peu le pas sur la forme qui devient un peu plus monotone. Sans doute aurait-il fallu mieux répartir les moments d’effervescence pour que la pièce pétille tout du long et que le souvenir mémorable laissé par la première demi-heure ne s’estompe pas.
Pas de quoi tomber dans l’oubli pour autant ni gâcher le plaisir, bien sûr. Car Le voyage de Molière nous offre du très beau théâtre. Et l’on en ressort vivifié.
Le voyage de Molière, de Pierre-Olivier Scotto & Jean-Philippe Daguerre, avec Grégoire Bourbier, Stéphane Dauch, Violette Erhart, Mathilde Hennekinne, Charlotte Matzneff, Teddy Melis, Geoffrey Palisse & Charlotte Ruby, mise en scène Jean-Philippe Daguerre, se joue du 07 au 30 juillet, à 12h35 au Théâtre du Chien qui fume (relâche le mardi).
[UPDATE 2023] Se joue du 7 au 29 juillet, à 12h35, au Théâtre du Chien qui fume au Festival d’Avignon.
Retrouvez tous nos articles consacrés au Festival Off d’Avignon ici.
Avis
Cette pièce originale mêle habilement théâtre classique et contemporain. S'inspirant de la vie de la troupe de Molière juste avant son arrivée à Versailles, elle nous propose un merveilleux voyage chimérique et festif entre passé et présent.
4 commentaires
Article bien sévère ,je trouve, que de dire qu’on commence par le bouquet final!
Pour moi le meilleur spectacle vu à Avignon cette année ,tous critères confondus .
Bravo à toute la troupe, aux techniciens,régisseurs, métreur en scène….
Bonjour et merci de votre message.
Je comprends fort bien votre enthousiasme quant à ce spectacle et à cette belle équipe qui lui donne vie ! Enthousiasme que nous partageons d’ailleurs, ainsi que vous avez pu le lire. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que nous en parlons comme d’un feu d’artifice
Belle journée à vous !
Pas vu ce spectacle mais sur le même thème et si vous aimez la fougue et l’enthousiasme des jeunes troupes, courrez voir le Bourgeois Gentilhomme à la Luna à 21.45
Bonjour !
Merci pour le conseil et bon Festival à vous ! 🙂