Il est de ces oeuvres instillant de la méfiance, qui en dépit des apparences parviennent à nous cueillir au creux du coeur. Le nouveau film du trublion Eric ? De quoi en rebuter plus d’un, circonspect suite à une bande-annonce (volontairement) mensongère. Roulez Jeunesse est pourtant de ces miracles-là, et le grand Judor en est pour sûr l’un de ses plus brillants responsables.
Une fausse comédie. Julien Guetta signe ici un véritable portrait de personnage, avec ce que cela comporte de subtilités et de contre-jours. On ne rit pas au dépend de ce garagiste quarantenaire pris au piège d’une drague avortée, mais on vibre au fil des étapes d’un récit parfaitement couturé pour provoquer l’étonnement comme le franc éclat de rire. Un regard aimant parcourt la narration et rend vrai la formidable galerie de personnages ici imaginée, de la mère maladroite à l’adolescente emplie d’une agressivité blessée.
Un acteur au sommet. Guetta a aussi réussi à extirper ce qui sommeillait entre les lignes de la filmographie d’Eric Judor. Derrière l’amuseur public se cachait un triste clown un peu branque. Roulez Jeunesse le révèle au grand jour, le long d’une prestation d’acteur bluffante, un peu drôle, humainement gauche, franchement bouleversante. Dans le dernier tour de piste, virage dramatique prompt à faire s’échoir quelques larmes, on est stupéfait de la performance sans ajout de l’acteur. Rien que pour lui, Roulez Jeunesse est une véritable réussite.