Ma Foudre explore la puissance d’un sentiment amoureux dévorant et les ravages d’une psychose obsessionnelle.
Dans Ma Foudre, six comédiens et un musicien nous entraînent dans les dédales d’une maladie psychique. Une pièce troublante qui brouille les frontières entre le réel et l’imaginaire, la réalité et l’apparence.
Une autrice talentueuse
Un nom fait que nous serions allés découvrir cette pièce quel que soit son sujet : celui de Laura Mariani. Si celui-ci ne vous dit rien, c’est sans doute que vous n’étiez pas au festival d’Avignon l’été 2023. Car sa précédente pièce, Le jour où j’ai compris que le ciel était bleu, a fait partie de celles qui ont marqué cette édition ; celles dont on entendait parler dans toutes les files d’attentes des théâtres, et qui a fait partie de nos coups de cœur.

Il y était déjà question de la maladie, de la différence, de la normalité, des thématiques chères à l’autrice. Ma Foudre est le deuxième volet de son triptyque. On y plonge dans le quotidien d’Olive, une jeune femme de 35 ans qui s’éprend de son ostéopathe, Simon, également chasseur d’orages à ses heures perdues, et commence à développer une obsession à son égard. D’abord touchante, puis troublante, l’histoire qui se met d’abord à exister dans sa tête, prend vite d’autres proportions jusqu’à devenir terrifiante.
Ma Foudre : de l’amour à la psychose
Le récit commence par la fête d’anniversaire d’Olive. Une scène entre ami.e.s que nous avons beaucoup aimée car plus vraie que nature, et qui prend le temps de poser une ambiance. En effet, le jeu hyper réaliste des comédien.ne.s dans ces premiers instants nous permet de nous immerger dans le récit. De nous identifier même. Mais cette insouciance et cette légèreté seront de courte durée. Tandis qu’elle se retrouve bloquée du dos le lendemain, Olive fait la rencontre de Simon, un ostéopathe. Il ne la laissera pas tomber, lui promet-il dans le cadre d’une manipulation médicale. Mais c’est tout autrement que la jeune femme reçoit cette phrase et en fait le point de départ d’une relation qui n’existera alors que dans sa tête…

Ma Foudre explore avec une belle équipe de comédien.ne.s (dont une grande partie de celle de la précédente pièce), le sujet de la psychose obsessionnelle, et plus précisément de l’érotomanie, à savoir la conviction délirante d’être aimé. On observe ainsi la manière dont la pathologie prend forme, ce qui vient l’alimenter, ou encore son impact sur les proches. Et on visite le monde intérieur que se construit petit à petit la personne malade et qui l’éloigne de plus en plus du réel.
Un spectacle esthétique
Pour autant, tout n’est pas évident tout de suite. En effet, quelques éléments saupoudrés ça et là nous amènent à douter et à nous demander lequel des deux ment. L’écriture est habile, tout comme la mise en scène qui contribue à semer le trouble. Mise en scène qui est d’ailleurs loin d’être anecdotique dans les pièces de Laura Mariani, de même que la scénographie. L’esthétique y est, ici encore, très soignée, avec ses jeux de transparence et d’ombres qui créent un univers parfois cinématographique, ainsi que les espaces de jeu distincts qui permettent à l’intrigue d’évoluer de manière fluide et rythmée.

Malgré tout, et bien que nous ne nous soyons pas ennuyés un seul instant, il nous a manqué un petit quelque chose pour que l’émotion nous gagne et que l’histoire nous marque autant que l’esthétique du spectacle. Peut-être est-ce du au personnage d’Olive auquel nous avons eu un peu de mal à nous attacher. Ce qui ne nous empêchera évidemment pas de guetter le troisième volet de ce triptyque de grande qualité.
Ma foudre, de Laura Mariani, avec Alice Barthalon-Suquet, Anthony Binet, Aurélie Cuvelier-Favier, Odile Lavie, Romain Mariani, Sylvain Porcher & Vincent Remoissenet se joue du 5 au 24 juillet 2025 au 11. Avignon.

Avis
Laura Mariani continue ici son exploration des maladies psychiques. Sa plume fine et habile aborde ici avec profondeur le thème de la psychose obsessionnelle, sans que jamais l'air ne devienne irrespirable. Quelques touches d'humour sont d'ailleurs subtilement distillées, que l'on attrape volontiers au vol.