Molly Bloom est originaire de Loveland dans le Colorado, une ville de 60 000 habitants au nord de Denver. Son père est professeur d’université et psychologue, sa mère est prof de ski. Elle est diplômée en Sciences Politiques. L’un de ses frères est diplômé de la Medical School de Harvard et est chirurgien. Son deuxième frère, le skieur Jeremy Bloom, est un vainqueur olympique dans cette discipline et ancien joueur de football professionnel. Il a notamment joué pour deux excellentes équipes de la NFL (National Football League) : les Pittsburg Steelers et les Philadelphia Eagles, qui n’est autre que l’équipe qui a remporté le Super Bowl l’an dernier.
L’enfance de Molly Bloom est sportive en dépit de la scoliose qu’on lui diagnostique à 12 ans. Ses parents sont stricts. Elle est elle-même une skieuse hors pair. C’est lors de qualifications pour les Jeux Olympiques qu’elle se blesse au dos. Son rêve olympique s’effondre, c’est la fin de sa carrière sportive. Elle entreprend de poursuivre ses études de droit mais avant, décide de faire un break.
Elle décide de prendre une année sabbatique et en 2003, elle déménage à Los Angeles. Pourquoi Los Angeles? Parce qu’« il y fait chaud », dira-t-elle. La même année, Chris Moneymaker remporte 2.5 millions de dollars en jouant au poker en ligne après une mise de… 40 dollars !
Molly Bloom débarque à Los Angeles, dort sur le canapé d’une amie et trouve un petit boulot de serveuse. Autant dire que ses parents ne sont pas enchantés par son projet… C’est à Los Angeles qu’elle rencontre un investisseur dans l’immobilier qui cherche une assistante. Son rôle : l’aider à organiser des soirées poker pour célébrités dans un Club appelé le Viper Room.
Elle ne connaît absolument rien au poker. Elle n’a jamais joué et ne connaît pas les règles du poker. Rapidement, elle va ajouter sa propre touche aux soirées : elle a compilé une playlist après avoir fait une recherche sur Google : « Quel genre de musique aiment les joueurs de poker ? ». C’est playlist en poche qu’elle arrive aux soirées où son rôle initialement consiste à servir des snacks et de l’alcool.
D’entrée, la mise est fixée à 10,000 dollars. Puis ce seront 250,000 dollars. Très vite, la tête lui tourne. Elle gagne beaucoup d’argent : elle se fait 3 000 dollars en pourboires la première soirée ! Elle réalise aussi qui sont les personnes pour lesquelles ces soirées sont organisées : Leonardo Di Caprio, Ben Affleck, Matt Damon, Tobey Maguire mais aussi des politiciens, des milliardaires et VIP en tous genres… Dans son livre, elle raconte qu’un des joueurs a perdu 100 millions en une nuit, et « il a payé sa dette le lendemain », ajoute-telle.
De quoi en effet faire tourner la tête à une fille de Loveland, Colorado. Elle comprend vite que ces soirées poker sont une réelle opportunité de faire du networking et de se faire un réseau !
Elle passe maître dans l’art d’organiser ces soirées et elle prend la relève. Elle est désormais en charge et réussi à convaincre les joueurs de délocaliser les soirées : du sous-sol un peu glauque du Viper Room, on passe à un hôtel luxueux de LA. Parfois, les parties durent pendant trois jours. Elle manque de sommeil, devient accroc à la drogue et l’alcool, prend des anti-dépresseurs …
New York, New York
L’argent appelle l’argent. Guidée par la cupidité, elle voit toujours plus grand, elle veut toujours plus. Bien loin le temps où elle ne faisait la différence entre Texas Hold’em, Omaha Hi-Lo ou Stud. Elle a appris et est devenue la « princesse du poker ». En 2007, elle lance son propre business en guise de couverture dans le domaine « l’organisation d’événements » (et traiteur) et décide de se lancer sur la Côte Est.
Elle organise désormais des soirées à New York, l’erreur qui la perdra. A Los Angeles, son activité était plus ou moins légale, mais elle était payée par les pourboires laissés par ses clients (elle gagnera jusqu’à 4 millions de dollars par an). A New York, elle va commencer à avancer de l’argent aux joueurs, elle faisait office de banque. Risqué. Elle commence à perdre de l’argent : elle signe des gros chèques pour des types qui ne paient pas, alors elle commence à prendre des commissions. Deuxième erreur. Elle entre dans l’illégalité, elle prend des risques.
Son chauffeur a des liens avec la mafia. Avec ses amis mafieux, ils lui offrent de la protéger contre des parts dans son business. Lorsqu’elle refuse, on lui pointe un revolver sur la tempe. En 2011, le FBI lui tombe dessus.
The United States of America vs Molly Bloom
Ruinée, endettée, elle retourne dans le Colorado où elle commence l’écriture des ses mémoires. Plus tard, elle retournera s’installer à Los Angeles. Quelques jours plus tard, elle est arrêtée par le FBI. Elle sera jugée et en 2014, le verdict tombe. Un verdict qui sera en sa faveur : le juge décide qu’elle n’avait joué qu’un rôle mineur dans l’organisation de ses soirées de poker clandestines. Elle est condamnée à un an probation, 200 heures de community service et une amende de 200 000 dollars.
Son livre (Molly’s Game) a été adapté au cinéma par Aaron Sorkin (« Le Grand Jeu ») et est sorti l’an dernier, avec dans le rôle de Molly Bloom, Jessica Chastain.
Molly Bloom a connu l’opulence, elle a été fauchée (avec des dettes astronomiques). Elle affirme aujourd’hui que même si tout est plus facile et moins stressant quand on a de l’argent, cela ne signifie pas que l’on est comblé.
À 40 ans cette année, cette expérience semble lui avoir enseigné une chose : l’argent ne ferait pas le bonheur…