Hier soir, mardi 14 mai 2024, s’est ouvert le Festival de Cannes sur le discours de Camille Cottin. On vous en dit plus sur cette Cérémonie d’ouverture, sur Le Deuxième Acte, le film de Dupieux reflet des défis actuels, et sur ce qui suivra.
Avant même l’ouverture de cette 77e édition du Festival de Cannes, le milieu du cinéma était à cran. Il faut dire qu’une rumeur sur une potentielle « liste noire » dénonçant des personnalités accusées de violences sexuelles tournait depuis quelques jours. Cette « liste » devait être révélée par Médiapart ce mardi 14 mai. Bien évidemment, le média a démenti cette rumeur dans un article publié ce lundi 13 mai, mais celle-ci est tout de même parvenue à installer un climat tendu ; d’autant plus que le Festival de Cannes faisait déjà face à de nombreux défis liés à la vague #MeToo, et pas que…
Le Deuxième Acte de Dupieux, un film reflet des polémiques actuelles ?
Le Deuxième Acte, dernière création du cinéaste français Quentin Dupieux, ne pouvait pas mieux tomber. Mise en abyme du cinéma et de son industrie, il se présente comme le film d’ouverture idéal.
En présentant un récit sur le tournage d’un long-métrage, Dupieux révèle – à l’aide de son style bien à lui, à la fois absurde et comique – les problématiques actuelles auxquelles se heurte le milieu du cinéma. Entre deux rires, il aborde la question de l’intelligence artificielle – le film fictif étant entièrement géré par IA -, des métiers de l’ombre peu reconnus, et bien sûr, des violences sexuelles sur un tournage. Des sujets reflets des défis qui composent cette 77e édition du Festival de Cannes.
Les discours de Camille Cottin
Quelques heures avant son discours pour l’inauguration du Festival de Cannes 2024, Camille Cottin a tenu un premier discours au micro de FranceInfo. La maîtresse de cérémonie s’est exprimée au sujet de la protection des mineurs dans le cinéma français, estimant que les précautions sont aujourd’hui “un peu légères”. En possibles solutions, l’actrice a mentionné le “travail de préparation et de répétition”, ainsi qu’un accompagnement systématique des mineurs par une personne extérieure afin de “protéger l’enfance”.
Et voilà qu’à 20h20, Camille Cottin est apparue sur la scène du Palais pour ouvrir le festival avec un discours émouvant, minutieusement calé sur une partition musicale interprétée par un sextuor. Une prise de parole ponctuée d’ironie qui parvient avec légèreté à aborder quelques-uns des défis cannois, à commencer par la vague #MeToo. Cette année, pas de « rendez-vous professionnels nocturnes dans les chambres d’hôtel des messieurs tout puissant », messieurs, vous devrez vous y habituer. A cela s’ajoute la dénonciation des trop grandes inégalités budgétaires dans le milieu cinématographique, quand on voit « que certaines coiffures prennent plus de temps et de moyens à être réalisées, qu’un court métrage ». On vous l’a dit, beaucoup d’humour et d’ironie.
« Sous les écrans, la dèche »
« Sous les écrans, la dèche », un collectif de professionnels du cinéma, aura tout de même réussi à se faire une petite place lors de la Cérémonie d’ouverture du festival, en hissant une banderole au-dessus du Palais. Depuis le 6 mai dernier, ce collectif tente un appel à la grève auprès de « tout.e.s les salarié.e.s du Festival de Cannes et des sections parallèles » afin de donner la parole à ceux et celles qui ne sont pas entendus et écoutés : les travailleurs de l’ombre (attachés de presse, projectionnistes, programmateurs, chargés de billeterie, etc).
Greta Gerwig, la présidente du jury, s’était d’ailleurs exprimée sur le sujet dans la conférence de presse inaugurale du Festival, en faisant directement référence aux grèves des scénaristes et des acteurs à Hollywood : « Je soutiens évidemment les mouvements de travailleurs. On vient de traverser un moment similaire avec nos syndicats et j’espère que le festival et les travailleurs peuvent trouver un accord qui leur sera favorable ».
Moi aussi de Judith Godrèche #MeToo
Vous l’aurez compris, cette Cérémonie d’ouverture a survolé un grand nombre de sujets sans les affronter directement, mais il paraît évident que ceux-ci continueront à être présents dans les jours suivants. A commencer par aujourd’hui, mercredi 15 mai, avec la projection du court métrage de Judith Godrèche, Moi aussi.
Présenté lors de la cérémonie d’Ouverture de Un Certain Regard en salle Debussy du Palais des Festivals et au Cinéma de la Plage, ce film met en lumière les récit de victimes de violences sexuelles. Des paroles qui font directement écho à celles de la réalisatrice, qui a déposé plainte début février contre Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour « viols avec violences sur mineur de moins de 15 ans », avant de s’exprimer librement à ce sujet aux César.
Francis Ford Coppola dans les viseurs #MeToo
Ce mercredi 15 mai, la veille de la projection du dernier film de Francis Ford Coppola Megalopolis, The Guardian a publié une enquête complète retraçant le tournage chaotique du long métrage. Le réalisateur y est notamment suspecté d’avoir eu des comportements déplacés envers plusieurs figurantes.
Selon les dires du journaliste et diverses sources, plusieurs femmes auraient été incitées à s’asseoir sur les genoux du cinéaste. Coppola aurait également « essayé d’embrasser certaines figurantes aux seins nus et légèrement vêtues ». Des agissements que ne nie pas le réalisateur, mais qu’il justifie en prétendant qu’il « essayait de les mettre dans l’ambiance », la scène se déroulant dans un club. Quant au coproducteur Darren Demetre, celui-ci explique : « Francis se baladait sur le plateau pour installer l’esprit de la scène en donnant de gentilles embrassades et des bisous sur la joue au cast et aux figurants ».
On l’aura compris, ce Festival de Cannes s’annonce « sans polémique », enfin, si on s’appuie sur les souhaits de Thierry Frémaux.