Après Bone Tomahawk, S. Craig Zahler réalise un nouveau film de genre, Traîné sur le bitume, un policier brutal et sans concession.
Deux flics aux méthodes expéditives sont mis à pied et décident de faire un casse. Suivant sa quête de dépoussiérer le nouvel Hollywood, Zahler continue ses coups de poing filmiques et s’attaque maintenant aux polars hard boiled en signant avec Traîné sur le bitume un film de genre parfaitement réussi, viscéral et complètement dingue, seulement sorti en Blu-ray & DVD par Metropolitan Filmexport, faute de trouver un public en salles.
A une époque où le spectaculaire prend le pas sur l’ambiance et le style, Zahler, scénariste et réalisateur de ce Traîné sur le bitume (Dragged across concrete), sort l’artillerie lourde en offrant à Mel Gibson et Vince Vaughn un morceau de cinéma hallucinant. Les deux monstres rivalisent d’intensité et dynamitent de leur seul charisme un long-métrage mutique, à l’histoire simplissime, en débitant face caméra des dialogues dégoulinant de réalisme et méchamment stylés.
Perle rare
A l’aide d’une réalisation et d’une narration se voulant réalistes à l’extrême, Traîné sur le bitume place ces deux acteurs, qui dégagent une puissance muette, face à la nécessité d’une vie de famille désemparée. S’en suit des échanges surréalistes entre les protagonistes, où l’humour noir et les dialogues s’agencent comme le point d’orgue des filatures et des planques, interminables. A ce titre, si l’attente et la construction du film proposent une tension dingue, ce rythme lancinant explose lors de fulgurances violentes presque insoutenables, une récompense décomplexée, toujours pour dépeindre un réalisme percutant.
D’ailleurs, allié à une écriture racée et un récit postmoderne, imbriqué, Zahler utilise une caméra fixe incroyable, hypnotique. Un classicisme visuel dingue qui nous offre des élans oniriques et des situations hallucinées avec des plans fixes interminables, magnétiques, implacables. Une réalisation immuable, comme figée dans le temps et l’espace, toujours pour accentuer un réalisme implacable et l’irréversibilité d’un destin tragique, dramatique. Une performance monstrueuse, magnifiée par l’absence de musique autre que celle diégétique composée par Zahler himself, pour faire de Traîné sur le bitume une longue plainte mortelle.
Malheureusement parasité par des longueurs qui tendent à alourdir le propos du long-métrage, Traîné sur le bitume est pourtant déjà un classique, un thriller qui tache, un policier brutal.