The Wall est le troisième long-métrage de Philippe Van Leeuw. Un film politique engagé qui nous plonge dans le quotidien de l’U.S. Bordel Patrol.
Ce n’est pas la première fois que le réalisateur, scénariste et directeur de la photographie belge Philippe Van Leeuw s’empare d’un sujet brûlant. Après Le Jour où Dieu est parti en voyage (2009) sur le conflit au Rawda, il traitait de la guerre en Syrie dans Une famille syrienne – film maintes fois récompensé, notamment par le prix du public Panorama et le label Europa Cinema à la Berlinale. Dans The Wall, Philippe Van Leeuw opère un renversement dans son processus d’approche : il se détache des victimes pour se pencher sur l’image du « bourreau ».
L’action de The Wall se déroule à la frontière entre l’Arizona et le Mexique. Dans cette région désertique du Tucson, l’U.S. Bordel Patrol tente de contenir et d’empêcher l’immigration illégale et les trafics de drogue. Jessica Comley (Vicky Krieps) en est l’un des agents, une femme prête à tout pour défendre ses valeurs patriotiques, n’hésitant pas à faire valoir ses droits.
L’Amérique réactionnaire et intolérante
The Wall dresse un portrait d’une Amérique réactionnaire, intolérante, violente et raciste. Une Amérique qui ferme ses frontières, quitte à ériger d’immenses murs pour empêcher des êtres humains de les traverser. L’Amérique de Donald Trump, l’homme qui s’est nommé « chevalier blanc » de la lutte contre l’immigration, l’image contemporaine du suprématiste blanc.
Philippe Van Leeuw dépeint avec simplicité cette Amérique en plaçant sa caméra au cœur de la Border Patrol. Il montre sans juger, se contentant de représenter ce qui est, bien que la réalité soit ici fictionnalisée. Dans ce quotidien difficile où règne la haine de l’autre, le réalisateur met en lumière les abus de pouvoir : des actes barbares sont justifiés par la loi, des crimes sont perpétrés sans être punis. Il prend le temps de filmer dans plusieurs séquences la fouille des véhicules, insistant sur la répétition des gestes et la rudesse des protocoles. La chasse à l’homme dans le désert devient le cadre du film et laisse planer une tension, nous rappelant inévitablement le drame du film Desierto de Jonás Cuarón (2016).
Un personnage féminin
La puissance de The Wall tient dans son personnage principal, magnifiquement interprété par l’actrice luxembourgeoise Vicky Krieps (qui nous avait déjà émerveillé dans Jusqu’au bout du monde). Jessica Comley évolue dans un environnement masculin marqué par le machisme. Pourtant, Philippe Van Leeuw ne fait pas d’elle une femme soumise, la dépeignant comme un personnage au fort tempérament, capable de se défendre. Jessica est particulièrement antipathique et inspire la haine, un choix osé de la part du réalisateur qui ne crée par la compassion pour ce personnage, et ce malgré les épreuves difficiles qu’elle traverse avec sa famille. Jessica est froide, rigide, raciste et violente, persuadée que ses valeurs sont au-dessus de tout.
Vicky Krieps s’est métamorphosée dans ce film, proposant une interprétation où elle est, littéralement, son personnage. L’actrice s’efface derrière Jessica : elle se tient droite, les épaules en arrière, le corps tendu, sa mâchoire se crispe à la moindre contrariété, son visage se déforme par la haine, son regard est lugubre. Jessica inspire la peur et nous oppresse, un ressenti exacerbé par l’image. Le format compact (1.55) nous enferme dans un cadre restreint où les nombreux plans poitrines nous rapprochent des personnages. La lumière contraste entre les scènes de nuit où l’on ne distingue que peu de détails et celles en plein jour, avec cette lumière du désert très crue, éblouissante et écrasante.
The Wall porte un regard sensible et véritable sur une réalité d’aujourd’hui. Un film brutal plein de tension qui interroge.
The Wall est à découvrir au cinéma à partir du 18 décembre 2024.
Avis
Qui sont ces membres de la Border Patrol aux Etats-Unis ? A travers The Wall, Philippe Van Leeuw dresse le portrait d'une femme convaincue qu'il faut protéger les valeurs américaines. Entre intolérance, violence, racisme, The Wall se montre d'un fort réalisme, dépeignant une Amérique meurtrie qui se croit supérieure aux autres. Un film qui fait de son personnage principal un être antipathique, magnifiquement interprété par Vicky Krieps.