Tibor Bánóczki et Sarolta Szabó livrent avec Sky Dome 2123 un film d’animation de science-fiction post-apocalyptique d’une grande finesse. Un premier long métrage hongro-slovaque éblouissant, une histoire d’amour sans précédent.
Sky Dome 2123 dépeint un monde de science-fiction étrangement proche du nôtre. Sur une Terre ravagée par la sécheresse, l’humanité est réduite à vivre sous cloche, enfermée dans un dôme. Ce Budapest futuriste est soumis à une règle impitoyable : à 50 ans, tous les citoyens doivent faire don de leur corps à la ville pour être transformés en arbre.
Une histoire d’amour
Sky Dome 2123 est avant tout une puissante histoire d’amour. Dans ce monde où l’existence ne semble plus réellement avoir de sens, seul ce sentiment intense permet de vivre, et non de survivre. Stefan et Nora s’aiment, mais ne parviennent plus à affronter ensemble la douleur de leur deuil. Jusqu’au jour où Nora commet l’irréparable : confier prématurément son corps au Dôme.
Naît de cet acte de détresse le récit du film qui nous placent au plus près des personnages. Pas question ici d’enchaîner les scènes d’action, qui restent au second plan. L’histoire est avant tout un voyage émotionnel, celui de Stefan et Nora, une traversée philosophique et intime au cœur des contrées les plus reculées d’une Terre aride et abandonnée. Tibor Bánóczki et Sarolta Szabó prennent le temps de filmer les visages, s’arrêtant sur les expressions, les tressaillements de la peau ; tout comme ils prennent le temps de s’attarder sur d’infimes détails de cet environnement hostile. La solitude des personnages et l’harmonie qui les unit font écho aux ruines d’une civilisation perdue et à la vie qui reprend doucement ses droits.
Comprendre la vie et l’écouter
En intégrant leur histoire dans un monde post-apocalyptique où chaque être humain n’a que 18000 jours à vivre, les réalisateurs flirtent continuellement avec la mort. Celle-ci surgit de tous côtés : dans la destruction de la planète, dans le deuil, le suicide assisté de Nora, l’agonie de la nature… Elle envahit Sky Dome 2123, ce lieu où il faut apprendre à vivre autrement.
Pourtant, en parlant de la mort, Tibor Bánóczki et Sarolta Szabó se tournent paradoxalement vers la vie. Comprendre la nature, s’ouvrir à elle, abandonner notre vision dévastatrice pour laisser germer une graine dans notre cœur, celle qui nous permettra d’entendre la vie ruisseler dans chaque montagne, chaque pierre, chaque arbre et chaque bourgeon. Avec sa fin ouverte, ce long-métrage pourra être interprété de différentes manières par le spectateur, laissant à chacun la possibilité de se faire son avis sur ce qu’il reste à entreprendre pour sauver la planète. L’humanité elle-même survivra-t-elle ?
Des dessins à couper le souffle
Sky Dome 2123 tire sa force et sa beauté de ses dessins, à mi-chemin entre prise de vues réelles et animation. En choisissant la rotoscopie – « technique consistant à tourner en prises de vues réelles avant de dessiner, en animation, par-dessus les séquences filmées » – les réalisateurs donnent beaucoup de réalisme à leur film : les expressions des acteurs se retrouvent directement dans celles des personnages dont les traits sont dessinés avec finesse. A cela s’ajoutent les décors 3D, tous réalisés à la main à partir de photographies, avec un fort travail sur la matière, les ombres et les mouvements.
Cette imbrication entre animation et prises de vues réelles confère à l’histoire beaucoup de poésie et une vision artistique singulière. Les plans d’ensemble en dehors de la ville ressemblent à d’immenses tableaux en mouvement. Les plans subjectifs, les inserts, les contre-plongées et les divers mouvements de caméra nous permettent de découvrir sous différents angles cet univers qui diffère du nôtre tout en y ressemblant. On en ressort comblé, le regard bercé par le souvenir de ces contrées reculées.
Sky Dome 2123 est un long-métrage d’animation d’une grande originalité. Un récit qui nous éveille, une image qui nous ravit.
Sky Dome 2123 est à découvrir au cinéma à partir du 24 avril 2024.
Avis
Sky Dome 2123 est un film d'animation de SF post-apocalyptique de Tibor Bánóczki et Sarolta Szabó. Réalisé entièrement en rotoscopie, il présente des images empreintes d'un fort réalisme mêlées à une vision artistique forte. Un long-métrage poétique faisant réfléchir sur la place de la vie sur Terre et l'impact de l'homme sur la nature. Une magnifique histoire d'amour.