Présenté au Festival de Cannes, Nouvelle Vague retrace le tournage d’À Bout de Souffle, tandis que Godard et ses confrères français lancent le célèbre courant cinématographique éponyme. Une plongée dans le Paris des 50’s aussi érudite que fun par Richard Linklater.
Nouvelle Vague. Tout cinéphile connait sûrement ce mot, qualifiant par instants l’émergence du cinéma HK dans les 80’s-90’s ou toute la flopée de nouveaux jeunes réalisateurs qui pullulent depuis 2 décennies. Mais il désigne avant tout un des grands courants de l’Histoire du cinéma, caractérisé par l’entrée en scènes d’anciens critiques français dans le monde de la réalisation à la fin des années 50.
Un contre-courant donc, tandis que la critique des Cahiers du cinéma se lancent dans un autre mode de production (moins onéreux, avec des caméras plus mobiles et des tournages en guérilla). Agnès Varda, François Truffaut, Claude Chabrol, Jacques Demy, Alain Resnais… des noms désormais cultes, et le film Nouvelle Vague entend capturer le moment de bascule vers cette ère importante dont on retrouve encore les stigmates consubstantiels aujourd’hui.

Et alors que François Truffaud dévoilait son remarqué Les 400 Coups au Festival de Cannes, Jean-Luc Godard (autre critique émérite de la clique) désire se lancer à la mie en scène avec son premier film. À Bout de Souffle regroupe ainsi le tout jeunot Jean-Paul Belmondo et la star américaine Jean Seberg dans un histoire d’amour contrariée où un vol de voiture initial va avoir des répercussions.
Bande à part
Bref, un film culte qui aura également lancé le modèle de la Nouvelle Vague, et que Richard Linklater (Hit Man, Boyhood, la trilogie Before) entend bien célébrer avec ce film. Nouvelle Vague s’ouvre ainsi sur la fameuse troupe d’amis après la réception cannoise triomphale du film de Truffaut, tandis que Godard (le plus excentrique de tous) décide de s’allier au producteur Georges de Beauregard.
De ce simple canevas qui pourrait globalement s’apparenter à un making-of cinégénique fantasmé, Linklater accouche d’un vrai film de bande (après tout on lui doit bien Dazed and Confused et Everybody Wants Some) dont la force motrice est une envie de cinéma. Une envie qui se caractérisera par un tournage de 15 jours sans matériel professionnel, sans décor construit… ni scénario fini !

La méthode Jean-Luc Godard, dont le côté frondeur et lunatique offre un vrai terreau comique à l’ensemble. Le voir toujours affublé de ses célèbres lunettes noires à déblatérer des phrases guindées nonsensiques tout en exaspérant l’équipe de tournage par ses improvisations de scène le matin même a de quoi réellement faire sourire !
Plongée dans la Nouvelle Vague sans mise à distance
Pour autant, ce Nouvelle Vague offre un équilibre constant entre dérision et respect total aux architectes du cinéma français. Une révérence qui passe par le visuel global du film (émulant le 16 mm noir et blanc) agrémenté d’une reconstitution d’époque sans faille.

Bref, Nouvelle Vague nous emmène dans le Paris de 1959 comme dans des chaussons confortables, tout en se targuant de proposer un casting royal où chaque acteur incarne à la perfection ces monuments de cinéma. La gouaille de Belmondo par Aubry Dullin et le charme piquant de Seberg par Zoey Deutch sont de gros points forts du film, mais le nouveau venu Guillaume Marbeck (dont c’est le tout premier rôle) impressionne en s’appropriant totalement le maniérisme et les intonations vocales de Godard.
Un trio qui tient à lui seul le film, tandis qu’on découvrira (parfois succinctement) plusieurs autres grands noms de l’industrie (Melville, Juliette Gréco…) pour offrir la vraisemblance nécessaire à l’entreprise. En résulte une pure célébration de cinéma, et surtout un hommage qui évite l’hagiographie traditionnelle en nous plongeant à côté de cette troupe de La Nouvelle Vague pour mieux épouser leur point de vue contre-culturel. Le tout aurait mérité un point de vue supplémentaire, mais en l’état le pari est réussi !
Nouvelle Vague sortira au cinéma le 8 octobre 2025. Retrouvez tous nos articles du Festival de Cannes ici.
Avis
Nouvelle Vague s'articule comme un vrai film de potes avant d'être un making-of érudit sur le tournage d'À Bout de Souffle. Linklater oscille entre humour et révérence dans un équilibre parfaitement tenu, pour un film célébrant le fameux mouvement éponyme et la liberté créative en toutes circonstances. Pour les fins cinéphages autant que les plus vierges du cinéma de Godard, Truffaut, Varda ou Chabrol : une réussite contagieuse !