Mixte débarque sur Prime Video, plateforme brillant dans son recyclage de navets français promis à une carrière moindre dans les salles obscures. Et sa première série française semble pourtant changer la donne.
Mixte est une série crée par Marie Roussin, que l’on a notamment pu voir à l’œuvre en tant que scénariste sur Les Borgia et en tant que créatrice des Bracelets Rouges sur TF1. Mise en scène par la moitié de l’ex Chanson du Dimanche, Alexandre Castagnetti, metteur en scène des oubliables Grimoire d’Arkandias et des deux volets de Tamara, et d’Edouard Salier, réalisateur de clips d’artistes en vue tels que Justice et Metronomy, la série, suivant les premiers pas de l’école mixte en 1963, se voit portée par un casting de choix. Les excellents Pierre Deladonchamps, Nina Meurisse et Maud Wyler viennent ainsi compléter un parterre de jeunes interprètes tous plus attachants les uns que les autres dans une série tout sauf nostalgique.
Contemporaines
Mixte se sert, comme dans la brillante OVNI(s), d’une époque révolue pour nous conter les maux d’une époque tristement actuels. Passé son étrange premier épisode où la mayonnaise a véritablement du mal à prendre entre personnages caricaturaux et bande-son rock insupportable rompant net avec l’ambiance des 60’s, la série de Marie Roussin creusera ensuite ses personnages au fur et à mesure de ses 8 épisodes pour livrer toute la puissance contemporaine de son message. Parce que passé les élèves et le trouble que suscite la présence de jeunes filles sur les bancs de ce lycée, l’observation scolaire de cette petite révolution se révélera être le parfait miroir de toute une époque faite d’injustices et d’apparences.
Dépassant rapidement les écueils de la copie nostalgique à la reconstitution proprette, Marie Roussin n’aura de cesse d’offrir à ses personnages un véritable développement personnel en les déshabillant de leur rôle pour creuser le rôle de chacun où les non-dits semblent la norme. L’inégalité des chances, le règne d’un système patriarcal et le sexisme prennent ainsi toutes leurs résonnances dans l’espace de ce petit lycée de province où les révolutions devront rester silencieuses. Jusqu’à quitter les bancs de l’école pour un épisode centré sur l’une des professeurs qui demeure l’un des sommets de cette série dont la résonnance avec l’actualité prend alors complètement aux tripes.
Sujets sensibles
Parce qu’en plus de réussir à croquer (et finement) toute sa galerie de personnages, et d’y instiller un humour et une (certaine) légèreté propre au genre de la comédie scolaire, Mixte arrive également à restituer tout le climat lourd et menaçant d’une époque. Une violence sourde faite de mots, d’attitudes et de regards asphyxiant un à un les envies de liberté d’une jeunesse destinée à obéir aux normes d’une génération réfutant leurs différences et leurs envies d’indépendances. Si les jeunes acteurs brillent tous, on peut ainsi trouver dans le trio d’acteurs Pierre Deladonchamps, Maud Wyler et Nina Meurisse l’incarnation même de cette existence broyée et dictée par les normes d’une époque corsetée peu prompte à les laisser respirer.
Réussissant ainsi sur tous les plans qu’elle entreprend, Marie Roussin réalise avec Mixte une brillante série scolaire loin de l’être. Pétrie d’un amour sincère pour ses personnages et transfigurant son exercice de reconstitution pour en livrer une très belle mise en abîme de questionnements brûlant d’actualité, Mixte est définitivement recommandable pour tout le monde.