En 2011, l’affaire Dupont de Ligonnès ébranle la France et ne cesse, depuis, de créer du remous sur la scène médiatique. Avec Les Pistolets en Plastique, Jean-Christophe Meurisse s’attaque à un des cold cases les plus célèbres de France par une comédie noire, trash et incroyablement absurde.
Dans Les Pistolets en Plastique, Léa et Christine, deux enquêtrices obsédées par l’affaire Paul Bernardin partent sur les traces d’un meurtrier en fuite. Alors qu’elles s’apprêtent à partir, elles apprennent que Paul Bernardin aurait apparemment été interpellé dans un aéroport au Danemark. Une comédie noire et absurde, largement inspirée de l’affaire Dupont de Ligonnès. Un meurtre, commis il y a maintenant 13 ans, mais qui fait toujours autant parler de lui.
Un préambule s’impose
Les histoires de tueurs en série vont bon train sur le grand écran comme sur le petit. De nombreuses études se sont intéressées à cette étrange fascination des publics pour des histoires aussi sordides. Le film s’ouvre d’ailleurs sur un échange entre Johnny le légiste, Jonathan Cohen, et Thiago, Philippe Rebbot, sur cette question. Ainsi, le cadre est posé d’emblée dans cette scène d’ouverture où les deux personnages discutent en farfouillant allègrement dans la cage thoracique d’un cadavre entre eux. Dès le début, le film s’annonce aller dans une direction satirique avec cet échange, assez lunaire et très rythmé, sur la sacralisation des tueurs en série.
Souvent, les films tirés de faits réels commencent sur un carton indicatif que toute ressemblance avec la réalité est fortuite. Cette précision est ici nécessaire. En effet, Laurent Stocker, qui incarne un tueur froid et charismatique dans le film, souligne dans la presse que le scénario du film Les Pistolets en Plastique ne doit pas être interprété comme apportant une quelconque rédemption à Dupont de Ligonnès qui reste un monstre. Un mot s’impose au sujet de la performance de Laurent Stocker, ce dernier étant le personnage le moins caricatural du film. En effet, si la pertinence de ses apparitions laisse parfois à désirer, le personnage de Paul Bernardin brouille cette frontière que Stocker s’est empressé de reposer dans la presse.
Des personnages en carton
Sous cette apparente comédie noire, les messages critiques pullulent. En effet, Léa et Christine (Delphine Baril et Charlotte Laemmel) sont sacrées enquêtrices Facebook de grade 4 (des enquêtrices un peu douteuses armées de pistolets en plastique ?). C’est donc deux femmes, dont l’une est mère de famille et ne cesse de se faire appeler par son mari, incapable d’appuyer sur le bouton “on” du micro-ondes, et une vieille fille qui se lance sur les traces d’un meurtrier. En parallèle, Michel Uzès (Gaëtan Peau), victime d’une lourde erreur juridique, est de loin le personnage le plus perdu dans cet univers absurde et trash . Ses mésaventures le conduisent à un face à face avec la commissaire Hammer quelque peu énervée…
Autrement dit, cette myriade de personnages ne cesse de s’enfoncer dans le burlesque et le ridicule. Les personnages sont totalement caricaturaux et, pour la plupart, ce sont des ratés complets. En ce sens, Léa et Christine illustrent cette société bercée dans l’illusion qu’Internet est aussi la réalité. Zavatta (Anthony Paliotti), inspecteur de renom, vit une douche froide lorsque sa femme lui remet brutalement les pieds sur terre. Et Uzès va, lui, de désenchantement en désenchantement… Les personnages du film Les Pistolets en Plastique n’ont donc pas un destin très joyeux et tous s’enfoncent dans une spirale de faits grotesques.
Une mise en scène criarde ?
A scénario grotesque, voire glauque, mise en scène burlesque. En parallèle, la bande originale du film ne va pas dans la demi-mesure et donne par moment envie de se boucher les oreilles. En effet, les grandes envolées musicales allant jusqu’à saturation, aussi bien que les longues montées en puissance d’un bip répétitif, font vibrer les tympans les plus sensibles. Aussi, la musique nous fait osciller entre diverses émotions et divers genres et s’aligne sur l’atmosphère d’un film insaisissable et imprévisible.
Les décors sont colorés, contrastés, les couleurs font parfois mal aux yeux tant elles sont claires et saturées. Certaines scènes, très trash, sont également sous le signe d’une couleur omniprésente dans le cadre. De plus, tout le montage est marqué par un rythme soutenu. Ne serait-ce que dans les premières minutes où les cartons du générique du début viennent entrecouper brusquement la conversation des personnages. L’entièreté du film se calque sur une volonté de faire les choses rapidement, qui, si elle peut prendre au dépourvu, est au final assez réussie.
Les Pistolets en Plastique est une comédie à l’humour très noir qui en devient très déroutante. En effet, si on sait d’emblée en entrant dans la salle que le film va parler de Xavier Dupont de Ligonnès, ennemi public n°1, on se laisse facilement emporter dans une fresque rocambolesque et absurde de l’histoire irrésolue de ce meurtrier. Et une question s’impose irrémédiablement, s’il est encore vivant, a-t-il vu le film ?
Les Pistolets en Plastique est sorti le 26 juin 2024.
Avis
Le film de Jean-Christophe Meurisse Les Pistolets en Plastique est une comédie noire qui ne paraît pas s’adresser au plus grand nombre. En effet, le long métrage joue avec un humour difficile sur une thématique qui nécessite une approche des plus nuancées. Le résultat en est un long-métrage surprenant et surtout déroutant, mais on se laisse porter par cette comédie très crue.