Laurie et la colline aux mirages est le témoignage bouleversant d’une jeune femme que la maternité a sorti des griffes du crack.
Laurie et la colline aux mirages : un titre qui sonne comme celui d’un conte pour enfants… Mais il n’y a, entre ces pages, ni magie ni innocence. Et encore moins d’enfance. En effet, Laurie Moucheron, 21 ans, nous y livre le récit touchant et troublant de ses quatre années passées dans les dédales sombres et sans issue de la colline du crack. Le témoignage rare et puissant d’une survivante.
« Certains ont disparu du jour au lendemain, d’autres ne s’en sortiront jamais indemnes. Quoi qu’il arrive, on en crève. »

Il était une fois l’enfer
Arrivée de Belgique à 14 ans, elle en a 15 lorsqu’elle fait la plus mauvaise rencontre de sa vie : le crack. Une drogue dure puissamment addictive qui détruit tout sur son passage. C’est alors un long et violent processus de destruction qui s’amorce et la précipite dans un autre monde, celui de la colline du crack, au Nord de Paris. Un enfer qui durera quatre ans.
Les campements de fortune, l’alcool, les médicaments, le vol, la mendicité, la prostitution, les coups, les viols, les fausses couches… Laurie raconte tout avec une sincérité qui vient nous bouleverser dans nos vies confortables. Car la réalité qu’elle décrit et qui était la sienne est à peine imaginable, souvent carrément insoutenable. Et l’on comprend vite que volonté et libre-arbitre n’ont plus aucun pouvoir quand l’emprise a pris le contrôle de l’être.
Un drame peut en cacher un autre
Durant ces années de calvaire où elle pouvait faire jusqu’à 10 ou 15 passes par jour pour se payer ses doses, Laurie a noirci des carnets. Animée depuis toujours par le désir d’écrire, elle y notait son quotidien, ses pensées, ses rencontres, sa colère. Et ces écrits qui parsèment ce récit nous donnent l’impression troublante d’être à ses côtés.

Et pourtant, les blessures les plus douloureuses, les plus indigestes ne sont pas celles-là, confie-t-elle, mais celles de son enfance. Celles de l’inceste, point de départ de tout. Comment ne pas avoir le cœur qui se serre… Ainsi, son témoignage vient nous rappeler que cette détresse humaine que l’on fuie le plus souvent du regard dissimule des drames de vie qui pourraient être les nôtres.
« Je ressens encore dans ma chair les stigmates de l’inceste, ce sont les seules blessures qui continuent de suinter à l’intérieur, le reste, les coups, la prostitution, les surdoses de crack, ça finit par s’atténuer, la souillure de l’inceste est tenace, indélébile. Ça ne passe pas. »
Une incroyable leçon de courage
« Rencontrer Laurie, c’est accepter de faire vaciller ses certitudes, de dépasser ses peurs et ses aversions, de se confronter à la dureté de la vie, mais aussi de toucher l’humanité comme rarement » confie Adeline Fleury qui a accompagné la jeune femme dans l’écriture de ce récit. Un récit sombre et douloureux, qui secoue c’est certain ! Mais aussi rempli d’amour et d’espoir.
Car cet amour que Laurie a cherché partout, même au milieu des détritus, entre deux passes ou auprès des rats qu’elle récupérait, c’est dans son désir de maternité qu’elle a fini par le trouver. Comme une bouée de sauvetage miraculeuse. Ainsi, ce sont ces deux enfants qui lui donnent chaque jour la force de continuer à renoncer au crack et de préférer la vie.
Et l’on ne peut qu’admirer la force et le courage de cette jeune femme d’à peine 21 ans qui semble presque revenue de la mort. De l’enfer en tout cas, ça c’est certain.
Laurie et la colline aux mirages, de Laurie Moucheron et Adeline Fleury, est paru le 17 février aux Éditions Michel Lafon.

Avis
Une lecture marquante et nécessaire qui permet de mieux comprendre l'enfer dans lequel plonge l'addiction au crack. Et qui offre une leçon forte de courage et de résilience.