Cinéaste du road-movie en son essence, Clint Eastwood reprend la route pour La Mule.
La route, celle qui amène au premier degré narratif, le personnage principal d’une livraison à une autre, au milieu d’une Americana dont Clint l’acteur et réalisateur, est à la fois le représentant et son déconstructeur. Une sage décision, qui amène cette Mule sur de bien beaux terrains.
La Mule sur un dangereux terrain terriblement humain
On sait qu’Eastwood décoche une puissante flèche un film sur deux, et La Mule répond en quasi positif à la règle, en s’imposant comme un film 100% Clint. On y retrouve tout d’abord son appétence à retranscrire l’ambivalence républicaine, la simplicité modeste avec l’égoïsme du travailleur, que son Earl Stone synthétise à merveille. L’acteur lui prête ses traits et son caractère, pour une performance d’une telle force et d’une telle sincérité qu’elle ne souffre aucune critique.
En parfait contre-jour de Gran Torino, Eastwood taille la route et fait souffler sur cette Mule une rafraîchissante brise d’humour, contrebalançant habilement la pesanteur attendue du récit. Les personnages tertiaires, dont les petites mains du Cartel, détonnent par leur humanité, entre cliché et réel contrasté. Leur écriture font le sel de ce nouveau projet, par ailleurs bien rythmé et à la mise en scène plus d’une fois élégante.
Sur la route du presque-parfait
Alors La Mule, pleine réussite? Pas si l’on croit son dernier virage dramatique, gentiment forcé. Comme s’il fallait céder aux attentes, Eastwood fait glisser le récit sur la piste de la rédemption premier degré, et rend son dénouement bien moins piquant qu’attendu, louvoyant aux abords du larmoyant. Reste pourtant en fin de projection la sensation d’avoir assisté à un film construit par un maître assagi aux cartouches pourtant saillantes.