Un grand maitre japonais du cinéma disait, en qualifiant son intention d’artiste, que « plus ses films étaient japonais plus ils étaient universels ». On pourrait, pratiquant une corrélation intellectuelle, rapprocher l’axiome de Kurosawa de l’effet ressenti face à Chère Elena, œuvre signée Ludmilla Razoumovskaïa en plein soviétisme répressif.
Le nœud du récit se tient en une visite nocturne au domicile d’une professeure intègre et docile par quatre étudiants à la soif de réussite diamétralement opposée. Le huit-clos qui s’y déroule met à rude épreuve des valeurs qu’Elena pensait inébranlables et laisse progressivement éclore un cynisme qui tient aujourd’hui une sorte de dragée haute. Une impression qui tient son aboutissement dans une image finale à la déchirante résonance.
La sobriété abordée par la mise en scène rend tout honneur à la puissance du texte, dense et culturellement tortueux dans ses longs monologues. Ces derniers sont servis par une brochette de jeunes comédien(ne)s investi(e)s et énergiques, parfois trop pour la bonne cause sans doute, dont le talent éclôt véritablement en groupe. Faut-il souligner qu’ils sont sous la bonne étoile d’une Myriam Boyer irréprochable ?
Chère Elena se joue en prolongations jusqu’au 12 Avril au Poche Montparnasse, du mardi au dimanche.
Crédit photo @Pascal Gely