Aquaman, le sauveur des films DC, capable d’assurer le succès après des déconfitures du niveau d’un Suicide Squad ou d’un Justice League, est parvenu dans les rayonnages Blu-ray. Son accueil commercial est-il signe de sa qualité intrinsèque? Rien n’est moins sûr.
Dès l’ouverture, James Wan annonce (et assume) la couleur : Aquaman sera une grosse production bulldozer, aux accents rococo et à la candeur férocement niaise. La voix-off multiplie les sentences de carte postale. Les regards enamourés de Nicole Kidman et Temuera Morrison, dont les motivations sont à peine survolées, prêtent à rire. Un coucher de soleil symbolique et merveilleux le dispute à un combat en intérieur monté sans la moindre imagination. Arrivé au bout de cette introduction, le spectateur saisit instantanément la force et la faiblesse de l’entreprise.
Aquaman, le jouet de Noël qu’on aimait gamin
Force d’une mise en images qui ne s’embarrasse d’aucune modestie. Contrairement à nombre de blockbusters, Aquaman multiplie les lieux, les décors, les créations de personnages, les angles étonnants (incroyables plongées en IMAX au milieu de l’océan) et enchaîne morceaux de bravoure sur morceaux de bravoure, au mépris du bon sens. En ressort la sensation d’un enfant malin s’ayant généreusement amusé pour son public avec l’argent qui lui était distribué, sans faire preuve d’aucune prétention.
En supplément, James Wan invite ses acteurs, tous issu de sa cinéphilie parfois déviante, souvent bis, à faire n’importe quoi. Patrick Wilson, fidèle d’entre les fidèles, est en délicieuse roue libre, hurlant pour asseoir sa virilité face à un Jason Momoa surfant sans effort sur son seul charisme. Entre parenthèses, difficile de réprimer son excitation à l’idée d’apercevoir Dolph Lundgren, ici grimé d’une perruque rouge du plus bel effet (oui oui). La place laissée aux personnages féminins, condamnée à jouer les faire-valoir, assoit encore davantage l’aspect « jouet bruyant de Noël » de la chose.
… mais qui finit par nous lasser
Faiblesse car, en dépit de son envie d’amuser la galerie à tout prix, Aquaman reste un film construit sur un récit décousu, rejouant Black Panther sous les eaux sans le moindre élan, si ce n’est celui de l’action. Mixant inquiétude écologique, guerre de trône et souffrance maternelle, le film ne donne un élan à aucune de ses pistes, quand il n’évacue pas ses bonnes idées (Black Manta) au profit de la pyrotechnie.
Autre élément qui finit par jouer en sa défaveur : le jonglage d’entre les genres. Il n’y a qu’à voir la propension du film à jouer sans logique aucune la carte de l’autoparodie, comme lorsque l’effroyable Pitbull égaye musicalement un Aquaman pecs à l’air, entre deux séquences d’un sérieux désarmant. L’humour y apparaît alors comme inappropriée, digne d’un Adam Sandler des mauvaises heures, rompant pour un temps un film quelque fois bien racé.
Cela étant dit, vous aurez sans doute pris du plaisir devant ce Aquaman au moment de lire ses lignes, sachant le succès enregistré en salles. Pour les autres, reste à espérer que DC Comics saura à l’avenir tirer meilleur profit des inventifs artisans recrutés, sous peine d’aligner les productions franchement oubliables.