La Malédiction – L’Origine débarque en salles, l’occasion de revenir sur cette saga injustement méconnue, et de vous livrer notre top, évidemment (et forcément) subjectif.
La Malédiction – L’Origine réveille une saga endormie depuis près de vingt années. Initiée en 1976 par le roman de David Seltzer adapté la même année au cinéma par le génial La Malédiction (The Omen), réalisé par le regretté Richard Donner, servant d’ailleurs au cinéaste de véritable rampe de lancement pour une carrière incroyable, précédant des succès tels que Superman, Les Goonies et L’Arme Fatale (entre autres), la franchise s’est ensuite étirée sur 5 longs-métrages (dont un téléfilm que nous n’avons pu voir, l’auteur de ces lignes en appelle d’ailleurs à tous les lecteurs collectionneurs qui tomberont sur ces lignes pour se le procurer à prix raisonnable) avec plus ou moins de succès et surtout d’intérêt.
Parce que l’histoire de La Malédiction demeure aussi efficace que fascinante : celle d’un couple d’américains adoptant sans s’en douter l’antéchrist en la personne de Damien, les autres épisodes s’intéressant à son ascension, avant les inévitables passages par les cases remake et préquel. Tous les opus étant disponibles sur Disney+, avant la sortie de La Malédiction – L’Origine ce mercredi dans nos chères salles de cinéma, il était donc plus que temps de vous causer de cette saga injustement méconnue, faite comme d’autres de hauts et de bas, que nous vous proposons de découvrir en commençant par le pire.
5. La Malédiction, 666 (2006)
L’histoire : Un remake quasiment copié-collé image par image du film original de 1976, où Robert Thorne, ambassadeur, après la fausse-couche de son épouse, adopte sans le savoir l’antéchrist, prénommé Damien.
La Malédiction, 666 fut en son temps un succès au box-office, le plus gros de la franchise juste après le film original (65 millions de dollars amassés pour 25 investis). Pourtant, il demeure l’un des pires exemples de remake raté, réalisé par John Moore, un tâcheron qui n’aura ensuite de cesse de détruire les formidables matériaux qu’on lui confiera, de Max Payne à Die Hard. Ainsi, si l’auteur du roman original est crédité comme scénariste pour la seconde fois de la franchise depuis le film original, c’est uniquement pour se baser sur le même scénario, dont on a ici retiré toute la puissance, l’intelligence, et surtout la moindre audace.
Parce que La Malédiction, 666 est un film insupportable de fadeur, porté par deux interprètes éteints (Liev Schreiber et Julia Stiles) n’ayant que pour unique intérêt de réunir le Professeur Lupin (David Thewlis) et Dumbledore (Michael Gambon) hors Harry Potter, et de faire revenir Mia Farrow dans un rôle démoniaque après l’immortel Rosemary’s Baby. John Moore et son fidèle directeur photo Jonathan Sela tentent ainsi de réveiller cette machinerie fainéante et endormie à coup de photographie désaturée et d’effets visuels tapageurs instantanément nauséeux. Un premier véritable petit cauchemar artistique pour la franchise qui s’endormira ensuite durant dix-huit longues années.
4. La Malédiction : L’Origine (2024)
L’histoire : retour quelques temps avant la naissance de Damien, notre cher antéchrist, pour suivre l’arrivée de Margaret, jeune nonne venue faire ses vœux à Rome. Malheureusement, elle y découvrira rapidement une conspiration qui se destine à faire naître le fils du diable…
Disney fouille donc dans ses tiroirs pour surfer sur le succès récent de La Nonne ainsi que tout le catalogue Blumhouse et tenter de relancer une franchise endormie depuis bien trop longtemps à son goût. Tandis qu’Arkasha Stevenson, réalisatrice passée sur des séries acclamées telles que Legion et Channel Zero se charge de la réalisation, accompagné de l’un de ses fidèles collaborateurs et aussi de l’un des scénaristes de l’horrible Firestarter, cela donne un préquel parfois aussi fascinant que complètement opportuniste et idiot. Cherchant perpétuellement sa direction, entre fan-service, fade remise au goût du jour de la franchise mais maladroite et quelquefois fascinante réappropriation, le moins que l’on puisse dire, c’est que cette Malédiction : L’Origine a bien du mal à affirmer une quelconque identité.
Il en demeure ainsi, au milieu d’un scénario cousu de fil blanc, des personnages féminins fades et des idées complètement idiotes (la raison de la naissance de Damien, sérieusement ?), quelques visions réellement prenantes, d’un cauchemar que l’on aurait fantasmé plus long et surtout plus réfléchi et abouti. Empruntant malheureusement plus à La Nonne qu’à Rosemary’s Baby, on reste ainsi dubitatif devant ce gâchis à la fois prenant et ridicule, repensant à la petite surprise qu’était Immaculée, sorti quelques semaines auparavant, et qui aurait pu faire un bien meilleur préquel.
3. Damien : La Malédiction 2 (1978)
L’histoire : Après la mort de ses parents adoptifs, Damien vit une adolescence épanouie accompagné de son oncle Richard. L’antéchrist adolescent entre à l’école militaire, apprend à se connaître, et plusieurs morts suspectes éveillent peu à peu les soupçons…
Damien : La Malédiction 2 a tout d’une suite au rabais : ayant à la fois perdu son scénariste et son réalisateur originaux, ce second opus a tout de la suite hâtive emballée avec pour unique raison de surfer sur l’énorme succès de son prédécesseur. Il demeure ainsi, sur près de deux heures, une légère incompréhension : que raconte vraiment cette suite, et quelle est vraiment sa direction ? Parce qu’entre les affaires de la firme Thorne et ses fades jeux de pouvoirs, ponctués d’une suite de morts préfigurant la franchise Destination Finale et d’un Damien insupportable s’isolant pour découvrir qui il est dans une école militaire, le doute, et surtout l’ennui persistent. Mais voilà, l’affaire est emballée avec suffisamment de maîtrise pour finir par l’emporter.
Parce que si Don Taylor et son duo de scénaristes ne demeurent que d’honnêtes soldats, Damien : La Malédiction 2 peut ainsi, dans son dernier tiers, finir par toucher son sujet et convaincre, même s’il demeure à des années-lumière de la qualité et de la fluidité de son aîné. Il en demeure ainsi un produit bavard, parfois ennuyeux mais finalement emballé avec suffisamment de respect et d’honnêteté pour n’être qu’un faible épisode de transition, jamais honteux, mais finalement jamais inoubliable.
2. La Malédiction finale (1981)
L’histoire : Damien Thorne est un adulte accompli : patron de la multinationale Thorne et en passe de devenir un puissant homme politique, il devra bientôt faire appel à sa secte pour se mettre en quête du fils du Christ…
La Malédiction finale a rapidement finalement des airs de pétard mouillé. Après avoir suivi l’ascension de l’antéchrist en personne, promis à semer le chaos et la désolation sur notre monde, son règne est déjà promis à sa fin, au milieu de répétitifs jeux politiques bavards et de mises à morts toujours aussi nombreuses et répétitives. Pourtant, Sam Neil s’avère être un choix plus que judicieux dans la peau de Damien (Jack Nicholson, Marlon Brando et Gene Hackman auraient passé le casting), et sa cruauté offrira à cette conclusion quelques glaçants moments, d’une impressionnante réunion de secte satanique à de brutales mises à morts d’enfant, comme de son pouvoir de fascination exerçant sur quelques personnages une attraction réellement malsaine.
Malgré sa conclusion décevante en forme de bondieuserie dégoulinante avec versets bibliques en grandes lettres blanches sur l’écran, cette Malédiction finale paraît ainsi aisément comme une belle réussite malgré tous ces gros défauts. S’éteignant au fur et à mesure d’un désintérêt grandissant au fur et à mesure des épisodes (De 60 millions de dollars amassés pour le premier opus, celui-ci n’en rapportera que 20), on en retiendra toutes ces belles qualités plutôt que ses grosses faiblesses concluant la franchise à des années-lumière de la direction espérée et fantasmée depuis son formidable premier opus.
1. La Malédiction (1976)
L’histoire : Après la fausse couche de sa femme, l’ambassadeur Damien Thorne décide sans lui dire d’adopter un jeune garçon né la même nuit, sans savoir qu’il s’agit de l’antéchrist…
La Malédiction n’a pas perdu une once de son efficacité, ni de sa saveur dans sa destruction anticléricale du culte de l’image et du portrait idyllique de la famille américaine catholique chérie. David Seltzer adapte avec brio son génial roman, Jerry Goldsmith fait des merveilles à la composition, Richard Donner signe l’un de ses meilleurs films et le casting, porté par le charismatique Grégory Peck, s’avère idéal. Dans ce premier opus, tout s’avère ainsi relever de la perfection, la même vantée par cet idyllique portrait de famille qui craque sous à peu près toutes les coutures, alimentée à la fois par le mensonge de l’homme politique et celui de la religion.
Ainsi, si Damien, savoureux antagoniste haut comme trois pommes s’avèrera être un contraceptif parfait pour nombre de couple hésitants, il ne s’avèrera finalement n’être qu‘un parfait catalyseur de ce mensonge permanent de l’image idyllique vantée à la fois par la religion et le mythe de la parfaite petite famille américaine. Déjouant tout de ses clichés, de l’anniversaire en forme de garden-party cauchemardesque, à la nounou chérie en passant par la visite dominicale à l’église, tout dans La Malédiction incarne ce petit grain de sable, ce vice que l’on voudrait cacher, mais qui finit irrémédiablement par exploser au visage pour révéler les sombres visages et la cruelle réalité.