Zorro revient dans une série française ambitieuse d’abord diffusée en streaming, portée par Jean Dujardin. En effet, le plus célèbre des hidalgos masqués revient pour un hommage ayant la cape entre deux chaises.
Qui est Zorro ? Outre le fait qu’il s’agisse de la phrase d’accroche du générique de cette nouvelle version, le justicier masqué aura bénéficié d’un bon nombre d’adaptations à l’écran depuis presque un siècle ! On se souviendra bien sûr des films de Martin Campbell (surtout le 1er qui reste un des meilleurs films d’aventure des 30 dernière années), voire du curieux film italo-français avec Alain Delon dans le rôle !
Malgré que Zorro soit un personnage littéraire aux origines feuilletonnesques, c’est surtout la 1e série télévisée des années 50-60 avec Guy Williams qui aura inscrit le « Z-héros » dans l’imaginaire collectif. Don Diego, le cheval Tornado, le sergent Garcia, le fidèle Bernardo muet, la Californie mexicaine..
Tombé dans le domaine public depuis, les ré-adaptations se succèdent depuis peu, que ce soit en BD ou à la télévision. Cocorico, cette nouvelle version a beau être francophone (il y a un tout petit peu d’espagnol pour faire bonne impression ceci dit), le Zorro français 2024 tient avant tout à garder le contexte historique du début du XIXe siècle.
Zortie de retraite
Dès le 1er épisode, les showrunners Benjamin Charbit et Noé Debré nous ramènent en terrain connu avec un twist : Zorro a déjà eu plus de 20 ans d’activité, et a raccroché l’épée depuis plusieurs années. Succédant à son père Alejandro en tant que maire, Don Diego entend bien combattre les injustices de manière légale et relever les finances locales.
C’est malheureusement sans compter Don Emmanuel, riche aristocrate qui entend bien déposséder les petites gens, et Gabriella de la Vega, dont l’idylle avec Diego bat de l’aile. Aidé de Bernardo, Zorro va néanmoins devoir revenir sur le devant de la scène, quitte à complexifier un peu plus la lutte de Diego pour la justice.
Un programme accrocheur, qui entend contre-balancer le versant « vigilante » et aventureux du personnage d’un côté, et le caractère plus léger de Zorro. Sauf que dès son amorce, la série accuse d’un gros problème qui ne viendra que prendre de l’ampleur au cours des 8 épisodes : un flagrant manque d’équilibre en terme de ton !
En effet, le comique est définitivement accentué sur cette itération de Zorro, au point que les enjeux dramatiques réels sont, au mieux considérés comme des incartades secondaires, au pire comme des éléments de troisième plan qu’on ne prend jamais au sérieux ! Exit les questionnements du pourquoi Zorro ne veut plus remettre le masques, ni de pourquoi il ne mettra pas dans la confidence son épouse bien-aimée.
La forme sans le fond
Et c’est bien dommage, tant cette mouture de Zorro affiche des points positifs indéniables, notamment en terme de reconstitution d’époque. Un soin qui transparait dans les décors d’Alméria, renforçant l’authenticité globale malgré l’artificialité de l’écriture. Un soin visuel qui parvient même à créer de « légers miracles » dans les rares séquences de combat à 1 contre plusieurs, renforcée par des chorégraphies aériennes et un sens du burlesque typique de Zorro.
Passée cela (et jusque dans son final qui s’arrête au milieu du guet), on pestera souvent devant le potentiel gâché de l’entreprise globale, gouverné par un Zorro dépeint en imbécile heureux faisant forcément penser à OSS 117 ou Brice de Nice. Cela tombe bien, c’est Jean Dujardin qui incarne Don Diego avec une aisance appréciable, et suffisamment d’autodérision pour que cela fonctionne.
Le problème néanmoins tiendra là encore d’une psychologie à géométrie variable, préférant la flagornerie et l’humour à circuit fermé. Zorro ne subira qu’une faible évolution (belle idée de garder André Dussolier dans la tête du personnage, tel un patriarche omniscient et inconscient), tandis que la série voudra rattraper le coup lors de l’ultime mouvement narratif.
Seconds couteaux qui brillent
Toute forme réelle d’antagonisme, de jeu de chat et la souris et de frisson demeure donc en retrait, y compris un sergent Garcia incarné par le sympathique Grégory Gadebois. Malgré une machinerie comique qui peine également à se renouveler, on retiendra malgré tout un Eric Elmosino régulièrement caustique que l’on appréciera détester en devant son caractère pédant ultra caricatural.
Mais dans Zorro, c’est bien la femme qui vole la vedette sous la personne d’Audrey Dana, parfaite en épouse mise sur le carreau qui va peu à peu se réapproprier sa personne, sa féminité et son intégrité face aux gangsters locaux et un époux évoluant constamment dans le mensonge. Un aspect commedia dell’arte prévaut donc sur ces scènes de ménage représentant la curieuse force réelle de cette nouvelle version de Zorro, à défaut de pleinement la transcender !
Zorro Saison 1 sera disponible sur Paramount+ le 6 septembre 2024 et fin 2024 sur France 2
avis
Zorro ne retrouvera pas ses lettres de noblesse dans cette adaptation beaucoup trop déséquilibrée dans son ton pour convaincre. Malgré un humour qui opère rapidement en circuit fermé, cette saison 1 reste assez digne d'intérêt par son soin de fabrication, ses scènes dignes de la commedia dell'arte, et un duo Jean Dujardin-Audrey Dana portant l'ensemble.