Voyage sur la Lune débarque aujourd’hui sur Netflix. Il aura fallu 3 ans d’attente pour que cette co-production sino-américaine (Pearl Studio et Netflix Animation) voit le jour. Et derrière ce « Over the Moon » en VO, on retrouve ni plus ni moins que 2 illustres animateurs de chez Disney, passant réalisateurs pour leur premier long-métrage. Le verdict est bien sûr positif,avec quelques nuances !
Voyage vers la Lune est réalisé par Glen Keane et John Kahrs. Ce dernier a fait ses armes en tant qu’animateur chez Pixar ou encore sur la Reine des Neiges. Mais son moment de bravoure était en 2013, avec le sublime et romantique Paperman (Oscar du meilleur court-métrage d’animation). Quand à Keane, il s’agit ni plus ni moins qu’une figure de proue de la Renaissance de Disney Animation débutée à la fin des 80’s-début des 90’s.
En effet, on lui doit la création et l’animation d’Ariel (La Petite Sirène), Aladdin, la Bête (La Belle et la Bête), Pocahontas ou encore Long John Silver (La Planète au Trésor). Glen Keane est également derrière l’histoire et les personnages de Tarzan et Raiponce, ainsi que le court-métrage oscarisé Dear Basketball en 2017. Donc oui, ce n’est pas n’importe qui derrière, et tout ce bagage se ressent d’entrée de jeu.
Voyage vers la Lune nous introduit donc au personnage de Fei Fei, une ado férue de science et faisant tourner le commerce familial avec ses parents. À savoir un restaurant spécialisé dans les gâteaux de lune, célèbre pâtisserie chinoise en forme de lune (et généralement consommée lors de la fête éponyme en automne). Dans une introduction qui n’est pas sans rappeler Là-Haut (sans atteindre le même pouvoir lacrymal), Fei Fei et son père se retrouvent seuls à gérer la boutique.
Quelques années plus tard, la jeune adolescente n’a toujours pas oublié sa mère et l’histoire qu’elle lui contait : la légende de Chang’e, la Déesse de la Lune. Célèbre conte chinois, il met en scène cette dernière dans une romance tragique avec l’archer Yi. Alors qu’il est tué par un de ses disciples, Chang’e boira une potion d’immortalité et se réfugiera sur la Lune, dans l’attente de trouver un moyen de ramener son amour perdu.
Voyage vers le familier
À l’instar de Klaus, tout aficionado des Classiques Disney sera en terrain familier. Fei Fei est une adolescente intrépide et intelligente dans la plus pure tradition, et tous les ingrédients sont là : introduction émotionnelle (à noter un beau passage en 2D), famille dysfonctionnelle, héroïne aventureuse et rêveuse, acolytes animaliers, une demi-douzaine de chansons à intervalle régulier, escapade rocambolesque dans un lieu fantastique insoupçonné et même une malédiction à contrecarrer.
On tient donc une histoire globale qui n’aura rien de bien surprenant dans sa structure pour quiconque a été biberonné au cinéma d’animation des 30 dernières années. Si le récit suit des chemins plus ou moins balisés, le tout se révèle plaisant tout au long de ses 1h30, et bénéficie d’un charme certain. En particulier dans la conception de ses personnages et la sincérité de son propos.
En effet, Glen Keane et John Kahrs ont créé ici des personnages hauts en couleur et incarnés. Que ce soit Fei Fei donc, auquel le spectateur s’attachera immédiatement, les divers membres de sa famille, ou encore Chin (le demi-frère sidekick comique et féru de ping-pong), chacun fonctionne très bien. On pourra aussi parler de Chang’e elle-même, personnage de diva céleste moins simpliste qu’il n’y parait, mais dont on ne dévoilera rien ici.
En plus de cela, le doublage est excellent tant dans les dialogues que les séquences de chant, en VF et en VO. Pour aller plus loin on recommandera ce dernier, entièrement composé d’acteurs sino-américains (John Cho, Sandra Oh ou encore Ken Jeong en salamandre parlante de l’espace). Phillipa Soo (de Hamilton) quand à elle double Chang’e de sa belle voix.
Voyage vers les étoiles intérieures
Voyage vers la Lune bénéficie d’une animation 3D de qualité, sans atteindre les ténors du genre. Débutant en Chine de nos jours, très vite nous serons transportés sur la Lune, ainsi que sa cité Lunaria (affublée d’un château qui fera évidemment penser à celui de la firme aux grandes oreilles). À cet instant la direction artistique globale opère un changement, expérimentant entre environnements lunaires traditionnels et expérimentations colorées plus abstraites et luminescentes.
Ces dernières pourraient parfois paraître un brin simplistes, en introduisant une épure générale via des habitants sous forme d’amas gélatineux avec bouches et yeux, ainsi qu’un trio de simili-Angry Birds ou des crapauds géants luminescents. Un sentiment un tantinet déceptif quand on sait qu’on aurait pu imaginer une représentation inspirée du folklore mythologique chinois. Heureusement, Voyage vers la Lune propose son univers visuel coloré à lui, sans réelle fausse note.
En conclusion, Voyage vers la Lune est une belle pioche d’animation pour Netflix. Malgré son côté familier et sa belle direction artistique par moments plus classique, Glen Keane et John Kahrs ont réalisé une authentique aventure rythmée et au versant émotionnel bienvenu (quoiqu’un peu atténué sur sa fin).
Bien mis en scène (les séquences en véhicule, dont une en pleine tempête de météores sont très bonnes), jouissant d’une BO signée Steven Price (Gravity), Voyage vers la Lune coche toutes les bonnes cases, sans toutefois les transcender. Un sentiment qui ne pèse pas bien lourd dans la balance vu sa sincérité. En effet, on tient avant tout un joli récit sur l’acceptation du deuil, et ce que représente la famille. En d’autres termes, un chouette moment pour petits et grands.