Grand habitué du Festival de Cannes, le cinéaste iranien Jafar Panahi est de nouveau en compétition après Trois Visages avec Un Simple accident. Emprisonné, puis libéré suite à une grève de la faim en 2023 parce que son travail déplaît aux autorités de son pays, il en fallait plus pour arrêter le réalisateur de faire des films chargés politiquement.
Jafar Panahi a toujours analysé la société iranienne de long en large, que ce soit la politique de son pays ou la vie quotidienne de ses habitants. Avec Un Simple accident, il intègre à son récit son expérience en prison à travers l’histoire d’un homme qui retrouve par hasard son ancien tortionnaire. Il le kidnappe, mais il a un problème : il n’est pas certain que cela soit bien lui, car il ne sait pas à quoi il ressemble. S’ensuit une recherche de personnes qui seraient en mesure de confirmer si c’est bien son bourreau. Si cela se confirme, doit-il se venger ?
L’importance d’un bon scénario
La force principale du cinéma iranien d’auteur contemporain, incarné par des cinéastes tels que Panahi, Rasoulof ou Farhadi, réside en grande partie dans le scénario. Alfred Hitchcock a dit un jour cette phrase célèbre : » Pour faire un grand film, il vous faut trois choses : le scénario, le scénario et le scénario ». Il semblerait que Panahi l’ait pris au mot et l’histoire d’Un Simple accident brille, comme son nom l’indique, par son étonnante simplicité. Pourtant, cela ne signifie pas qu’il ne raconte rien, bien au contraire, le film réussit à aborder en substance de nombreuses thématiques (la vengeance, le pardon, la renaissance après un trauma, etc.). Maniant avec agilité l’humour et le drame dans son écriture, Panahi fait monter en puissance son récit jusqu’à atteindre un final d’une force sidérante.

Il fait également partie d’un groupe de cinéastes qui composent leurs cadres et les mouvements de leur caméra avec la plus grande sobriété possible. La caméra est une simple observatrice, c’est par ce prisme que nous, le spectateur, découvrons la scène et ses enjeux. Comme pour le scénario, cette déconcertante simplicité dans le placement de l’outil filmique n’implique pas une forme de faiblesse dans la mise en scène. Au contraire, ce point de vue offre de l’espace, de la liberté aux interprètes pour qu’ils expriment les sentiments profonds de leurs personnages à travers des dialogues ciselés et un langage corporel démonstratif.
Belle troupe d’acteurs
Et le cinéaste sait s’entourer de comédiens courageux – étant donné sa situation au sein de la société iranienne – pour incarner des personnages sensibles qui présentent chacun une réaction différente face à la situation. Il y a ceux qui veulent se venger, celui qui ne veut plus rien avoir à faire avec ce passé traumatisant ou encore notre héros plus raisonné.
À travers un récit très resserré, qu’on pourrait quasiment considérer comme un huis clos sur la route dans une camionnette, ces personnages débattent, s’affrontent, se raisonnent, se respectent, se haïssent… Un chaos ambiant provoqué par le crime originel : la torture systématique de ces personnes lors de leur passage en prison.
Bref, Un Simple accident se révèle comme étant un film poignant qui s’inscrit parfaitement dans la continuité de la filmographie du cinéaste. On ne sait pas comment Jafar Panahi fait, malgré les menaces sur son existence, pour continuer à créer des œuvres aussi brillantes et courageuses. On n’a pas la réponse, mais une chose est sûre : il a tout notre admiration.
Un Simple accident sort le 1er octobre 2025 au cinéma. Retrouvez tous nos articles du Festival de Cannes ici.
Avis
Comme à son habitude, le cinéaste iranien Jafar Panahi signe avec Un Simple accident une œuvre puissante qui raconte beaucoup de choses sur la société de son pays, tout en étant d'une sobriété visuelle et scénaristique déconcertante. Courageux et nécessaire.