Rimini Editions revient dès février 2022 avec sa nouvelle édition horrifique, Terreur sur la ville. Car avant Michael Myers, avant Jason, il y a eu The Phantom Killer. La différence, c’est que le serial killer du film est inspiré d’un fait divers. Au programme : psychopathe masqué, des adolescents assassinés, une police dépassée par les évènements… Charles B. Pierce propose la préfigure du slasher, pour le meilleur et pour le pire…
Les faits relatés de Terreur sur la ville se déroulent à Texakarna – une petite ville du Texas – en 1946. Pendant plusieurs mois, un tueur sema la terreur et la paranoïa et sévissait tous les 21 jours. The Phantom Killer a finalement cessé ses meurtres, sans jamais qu’on ne puisse l’identifier et l’arrêter.
Une approche clinique
Charles B. Pierce est un réalisateur habitué aux histoires tirées de faits divers. Par exemple, il frôle le vraisemblable avec un faux documentaire – The Legend of Boggy Creek – sur le bigfoot. Dans Terreur sur la ville, le cinéaste retrouve une approche documentaliste, avec notamment la présence d’une voix-off, grave et dramatique. Elle rappelle une approche journalistique, surtout par son action de sans cesse relater les faits qui s’apprêtent à arriver, à savoir la mort des personnages.
La voix a une fonction divine car cèle le destin fatidique des personnages avant même qu’ils ne le vivent. Elle permet au spectateur d’avoir de l’empathie pour les personnages, car il sait désormais que leur fin est proche. Mais elle apporte surtout un côté réaliste à la fiction. La voix dissèque les personnages – qui sont-ils –, les lieux et les dates. Terreur sur la ville prend alors une tournure vraisemblable au service de l’horreur et du terrifiant.
Charles B. Pierce propose de fortes intentions de réalisation. Au-delà de son aspect de reportage avec un commentaire oral omniprésent, on remarque une caméra nerveuse. L’image organique de la pellicule est entrecoupée de violents zoom, passant du plan large au très gros plan. Ils pourraient évoquer la violence des crimes, la panique des personnages, souvent pris de panique lors des attaques. La photographie assez naturaliste donne à l’antagoniste un véritable ancrage dans le monde réel. On croit au boogeyman, à ses crimes et ça fait peur.
A l’image de son fait divers, Terreur sur la ville ne révèle à aucun moment l’identité du tueur. Charles B. Pierce caractérise The Phantom Killer notamment par ses chaussures lors des scènes de jour. L’assassin traque ses proies, partant du bitume citadin jusqu’aux marécages les plus humides. Il ne laisse pas de traces, mais fonde un véritable mythe folklorique au sein de la ville de Texakarna.
Le film adopte un point-de-vu omniscient. Le spectateur sait tout ce qu’il se passe dans la ville. Terreur sur la ville montre une communauté paranoïaque, submergée par les atrocités du tueur. On devine un contexte anxiogène à souhait, qui pourtant ne fonctionne pas comme il le devrait.
Un film à côté
Ce qui surprend au visionnage de Terreur sur la ville, c’est à quel point la balance peut pencher vers le positif, puis repartir vers le négatif. Tandis qu’on découvre des scènes de slasher crue et réalistes la nuit, le film prend un contre-pied total dans ses scènes d’intérieurs, ramenant un véritable côté studio au long-métrage.
Ce côté théâtral fait sonner le film faux, à l’image des dialogues interprétés par les différents comédiens tout au long du film. Ils sont pauvres, parfois inutiles. Charles B. Pierce semble vouloir introduire ses personnages par le biais de mises en scènes mettant en avant leur supériorité, qui virent parfois à la limite du ridicule.
Enfin, on découvre une omniprésence de l’humour au travers de Terreur sur la ville, avec notamment un sidekick burlesque. Ses gags sont appuyés musicalement par des cuivres. Soudain, le long-métrage perd toute sa force crépusculaire et violente, s’abandonnant à une dénotation de genre horrifique d’une force inouïe.
L’horreur refoulée
Terreur sur la ville est une véritable surprise horrifique, pour le meilleur et pour le pire. Charles B. Pierce présente une communauté victime d’un tueur fou avec des autorités complètement dépassées. Malgré de forts atouts d’ancrage dans le réel au service de la terreur, le film s’autodétruit en jonglant avec trop d’humour. Le scénario manque de finesse, tant dans les dialogues que dans sa narration globale.
Le film est très mécanique et termine surtout avec un deus ex machina qui rend la résolution encore moins crédible qu’elle ne l’est déjà… Il faudra justement attendre le premier degré assumé de Halloween et de John Carpenter deux ans plus tard pour que le slasher devienne enfin ce qu’il est aujourd’hui : légendaire.