Springsteen – Deliver Me From Nowhere poursuit la mode du biopic de légendes de la musique. Réalisé par Scott Cooper (Hostiles), ce film plaçant Jeremy Allen White (The Bear) dans le rôle du Boss a pour lui d’éviter l’hagiographie, au détriment d’être véritablement incarné.
Springsteen – Deliver Me From Nowhere poursuit la mode des biopics musicaux, après Bohemian Rhapsody, Better Man, Rocketman, Bob Marley One Love. Et à l’instar de certains de ces long-métrages, le film de Scott Cooper (Hostiles, Strictly Criminal, The Pale Blue Eye) n’entend pas dépeindre l’ensemble du vécu de l’auteur derrière Dancing in the Dark, Hungry Heart ou Born in the USA.
Interlude personnel
Scott Cooper a judicieusement préféré se concentrer sur une période charnière du chanteur, auréolé du gros succès de son cinquième album The River. Désireux de se reconnecter à son New Jersey natal et en proie à la dépression, celui qu’on surnomme le Boss à tout juste 32 ans va abandonner le rock le temps d’un album : enregistré chez lui à l’aide d’un enregistreur multipiste, Nebraska est son sixième opus, à l’aura résolument folk et sombre.

Ainsi, Springsteen – Deliver Me From Nowhere adopte un angle pertinent pour ce qui est de prendre le pouls d’un artiste en plein questionnement et en détresse émotionnelle. Le film est d’ailleurs marqué d’un spleen prononcé, alors que le paysage automnal et le choix de Jeremy Allen White pour camper Bruce répondent parfaitement aux sonorités folk incorporées acoustiquement dans le BO.
Des fourneaux au micro
Décidément parfait pour incarner des dépressifs à la mine renfrognée intériorisant leurs sentiments, Jeremy Allen White porte le film à bout de bras avec un naturel déconcertant. De plus, à l’exception de quelques sympathiques scènes de concert (ou l’enregistrement de Born in the USA), l’acteur chante lui-même les chansons conçues pour Nebraska, guitare à la main et regard mélancolique à l’appui.

Et malgré l’inutilité d’une ressemblance absolue avec Bruce, les divers engrenages de Springsteen – Deliver Me From Nowhere semblent ne pas s’emboîter comme il faudrait. Pourtant, la mise en scène de Scott Cooper est globalement carrée, mais malgré son parti-pris, le récit se révèle étonnamment programmatique dans son cahier des charges.
Springsteen ne nous délivre pas
Pire : difficile d’apprendre quoi que ce soit de novateur sur le Boss, surtout lorsque le récit se révèle chiche en terme de catharsis. Des séquences en noir et blanc ponctuent la trame de Springsteen – Deliver Me From Nowhere sous forme de flashbacks. Sensées illustrer l’enfance traumatique du chanteur aux prises avec une figure paternelle autoritaire (Stephen Graham), ces séquences resteront finalement en surface, préférant être résolues en 82 sans aucune confrontation, via deux scènes apathiques malgré le talent des comédiens.
Passé ce simple élément d’origin story dépressive, Springsteen – Deliver Me From Nowhere demeure anémique en terme de dramaturgie pour pleinement creuser la psychologie du personnage. Si bien que sa courte romance avec le personnage incarné par Odessa Young fera plus office de passage obligé, plutôt que d’élément incarné.

On évite heureusement la sortie de route via une deuxième heure plutôt agréable lorsqu’il s’agit de plonger dans la conception de Nebraska, album produit sans élément commercial. Des instants qui permettent par ailleurs d’observer les toujours savoureux Paul Walter Hauser et Jeremy Strong (respectivement l’ingénieur son et le manager du Boss). Une consolation pour ce Springsteen – Deliver Me From Nowhere jamais désagréable, ni réellement pertinent. Surtout quand divers points de comparaison le relient à un métrage similaire à plein de niveaux, mais nettement plus réussi : Un parfait inconnu !
Springsteen – Deliver Me From Nowhere sortira au cinéma le 22 octobre 2025
avis
Malgré sa facture de fabrication, son spleen folk, son parti-pris intimiste et le charisme de Jeremy Allen White, difficile de ne voir autre chose dans Springsteen - Deliver From Nowhere qu'une tentative superficielle (mais jamais désagréable) de creuser la psychologie du Boss, dans un récit plus programmatique que véritablement incarné.

