Le désert. Le cinéma aime le désert, et les œuvres marquantes tirant parti de ce décor aride foisonnent, de Mad Max à Lawrence d’Arabie, en passant par Zabriskie Point. Le nouveau film d’Óliver Laxe, Sirat, s’inscrit dans cette lignée : le désert y est tout à la fois toile de fond, protagoniste et metteur en scène de cette œuvre rugueuse et métaphysique. Présenté en compétition au Festival de Cannes 2025, il promettait quelques claques sensorielles aux festivaliers, et il n’a pas déçu.
Dès les premières minutes, l’atmosphère est installée : de multiples enceintes trônent au milieu d’un somptueux paysage désertique. Soudain, le son, les vibrations du sable, la danse ; la rave a commencé. Des centaines d’individus affluent pour danser jour et nuit, cherchant à oublier le chaos d’un monde au bord de l’apocalypse. C’est dans ce contexte que l’on rencontre un père, Luis (Sergi Lopez), et son fils Esteban (Bruno Núñez), venus chercher leur fille et sœur, disparue et qui pourrait s’y trouver. Ayant entendu parler d’un autre rassemblement en plein désert auprès d’un groupe de festivaliers nomades, ils se persuadent qu’elle pourrait s’y être. Après quelques péripéties, l’aventure d’une vie débute pour rallier le lieu de cette nouvelle fête.

De la techno, du sable et une quête métaphysique
Les facettes de Sirat sont multiples, et son absence de forme clairement définie lui confère toute sa vigueur filmique. D’une introduction immersive en pleine rave party, le film glisse vers un road trip aux accents de Mad Max et de Sorcerer (Le Convoi de la peur en français) de William Friedkin, avant de basculer vers une dimension tout à fait inattendue. Ce long-métrage nous aspire dans un récit étonnant (et détonnant) qui sollicite le spectateur de manière profondément sensorielle. Si les enjeux narratifs et les motivations des personnages paraissent simples sur le papier, leur cheminement est loin de l’être. Le film oscille entre un humour surprenant, des moments touchants, et parfois une terreur palpable, à l’image d’une séquence d’anthologie explosive où le mélange des genres atteint son paroxysme.
Pour incarner Sirat, Óliver Laxe a fait appel à une troupe majoritairement composée majoritairement d’acteurs non professionnels, de véritables gueules de cinéma qui apportent une authenticité brute à l’écran. La performance de Sergi Lopez, unique star du casting, est remarquable : il campe avec justesse ce père s’embarquant dans l’aventure de sa vie. Une véritable spontanéité émane du jeu des comédiens, suscitant une empathie que le spectateur développe aisément envers ces personnages à la fois simples et complexes. On se sent happé par cette cavalcade sauvage et hypnotique du fait de leur humanité qui est sensible à l’écran.

Réalisation immersive
Indéniablement, le travail de mise en scène d’Óliver Laxe est crucial pour impliquer émotionnellement le spectateur dans son récit. Le cinéaste, qui vit au Maroc depuis de nombreuses années, démontre une connaissance intime du désert marocain, lieu de tournage du film, qui transparaît à chaque plan. Ce qui surprend avec le désert, c’est la multitude de manières de le filmer, alors même qu’il s’agit du décor le plus épuré qui soit. Laxe en propose ici une vision singulière, contemplative et spirituelle. Son film est texturé et on sent sur nous le sable, le vent, ou encore le rugissement des moteurs.
Une fois de plus, le désert prouve qu’il est un terrain fertile pour l’expression artistique et cinématographique. En cette année 2025, il offre son immensité mystique à Sirat, une œuvre féroce, pulsée par une bande-son techno fabuleuse, aux accents apocalyptiques et à la portée métaphysique. Ce film est le résultat d’un réalisateur talentueux et de son équipe qui n’ont pas reculé devant les difficultés – et pourtant elles ont dû être nombreuses. Sirat est une expérience de cinéma comme on l’aime : sensorielle, unique et qui rappelle avec force l’importance de découvrir certaines œuvres dans les salles obscures.
Sirat sort le 3 septembre 2025 au cinéma. Retrouvez tous nos articles du Festival de Cannes ici.
Avis
Sirat fait partie de la catégorie de films qui ne laissent pas indifférent. À la fois drôle, féroce et hypnotisant, le long-métrage d'Óliver Laxe se révèle comme une petite pépite cinématographique avec quelques séquences exceptionnelles qui marqueront encore pendant longtemps le spectateur.