Roofman conte l’incroyable histoire vraie du fameux cambrioleur américain ayant mené une double vie en cavale, tout en vivant incognito plusieurs mois au sein d’un Toys R Us. Channing Tatum y livre la meilleure performance de sa carrière, devant la caméra de Derek Cianfrance (Blue Valentine, The Place Beyond the Pines) !
Roofman n’est pas le nom d’un nouveau super-héros. Non, il s’agit du curieux surnom alloué à Jeffrey Manchester, un ex-Marine américain reconverti en cambrioleur au début des années 2000. Décrit comme intelligent et muni d’un sens aigu de l’observation par ses pairs, ce dernier a ainsi acquis son sobriquet suite à soixantaine de vols : les caisses de plusieurs McDonald’s, Burger King et consorts furent braqués après effraction par le toit, mais toujours avec une réelle courtoisie selon les témoignages !
Incroyable histoire vraie
Mais plus improbable encore, ce fameux Roofman avait réussi à s’évader de prison en 2004, avant de disparaître 6 mois à Charlotte. Caché au sein d’un magasin Toys R Us, Jeffrey Manchester a réussi à mener une double-vie en ayant une relation amoureuse avec la responsable de l’église locale. Une histoire haute en couleurs qui méritait forcément sa transposition au cinéma. Le plus étonnant tient cependant de qui est le réalisateur à la barre !

En effet, Roofman est scénarisé et mis en scène par Derek Cianfrance, cinéaste américain sous-estimé ayant déjà de beaux faits d’armes en terme de romances contrariées (Blue Valentine, The Place Beyond the Pines, Une vie entre deux océans). C’est donc son retour au cinéma, quelques années après sa superbe mini-série HBO I Know This Much is True.
Bien plus qu’une comédie
Dès le tout premier plan (un panotage aérien de la caméra en contre-plongée), Roofman élève le propos du projet et de son récit : un paysage américain où les voitures s’enchaînent sur l’autoroute, un sigle McDo à côté du drapeau US, et un homme (Channing Tatum incarne Jeffrey Manchester) perforant le toit de l’enseigne pour commettre son larcin. Tout y est ! Derek Cianfrance parvient en un temps record à planter ce personnage de loser magnifique, présentant un prolo divorcé ne parvenant pas à joindre les deux bouts et à subvenir aux besoins de sa famille.
Avec une efficacité déconcertante (et ce sur les deux heures de métrage), l’écriture oscille entre instants de pure comédie, et drame intimiste parfois déchirant. Derek Cianfrance trouve toujours le juste point de vue pour nous faire adhérer aux idéaux de cet escroc uniquement motivé par le bonheur de sa famille (l’élément déclencheur étant son incapacité à lui acheter le vélo réclamé pour son anniversaire). Car derrière cette histoire incroyable qui prête régulièrement à sourire, Roofman tire le signal d’alarme d’une Amérique capitaliste bridant toute pureté d’intention.

Usant à bon escient du fameux Toys R Us comme d’un pur terrain de jeu situationnel (où les baby phones servent de caméra et les M&Ms de denrées alimentaires) pour à la fois contrarier son gérant méprisable (Peter Dinklage est excellent), échapper à la police qui le diabolise dans les médias, et aussi conquérir le cœur de la belle Leigh (Kirsten Dunst). Un vrai canevas de rom-com qui fonctionne à plein régime, là encore augmenté par la véracité de l’histoire qui nous est contée.
Rire qui passe au déchirement
Et si la romance de Roofman s’installe de manière presque trop rapide, elle doit beaucoup à la complicité des acteurs, la caméra de Derek Cianfrance qui sonde l’intime au plus près des corps et des regards (superbe photo d’Andrej Parekh)…. et bien sûr à une écriture fine embrayant sur un dernier mouvement dramaturgique absolument touchant !
Derrière la jugeote de ce Roofman (décrit comme le benêt le plus intelligent qui soit!), se cache la figure alarmée d’un individu seul, lâché par la société et sa famille, avant tout désireux de nouer un lien émotionnel avec autrui. Un personnage parfaitement décrit par un Lakeith Stanfield (toujours génial dans les seconds rôles) apparaissant en homme de main occasionnel, tandis que le film doit également conter sur Channing Tatum proposant (de très loin) la meilleure performance de sa carrière !

Un rôle sur-mesure, mettant en avant tout le potentiel comique déjà connu de l’acteur (dans une configuration plus authentique que jamais), mais surtout la portée dramatique de ce cambrioleur au grand cœur. Car derrière le fait divers saugrenu et grandiloquent de Roofman, Cianfrance capte avec génie l’humain dans toutes ses contradictions, jonglant avec les genres (le casse final est un pur modèle du genre en terme de tension dramaturgique) sans jamais en délaisser un seul. Bref, c’est la grande classe !
Roofman n’a pas encore de date de sortie
avis
Bien au-dessus du tout venant des comédies dramatiques, Roofman s'impose sans nul doute comme le meilleur film de Derek Cianfrance. Porté par un Channing Tatum résolument parfait en cambrioleur au grand cœur, ce récit content l'incroyable histoire vraie de Jeffrey Manchester se révèle aussi drôle que déchirante dans sa manière de sonder un prolétariat pris en étau dans l'Amérique capitaliste d'aujourd'hui. Un immense coup-de-cœur !

