Charles Aznavour, monstre sacré de la musique française, a construit sa propre réputation à la sueur de son front. Avec Monsieur Aznavour, Medhi Idir et Grand Corps Malade reviennent sur la jeunesse, la vie et l’ascension fulgurante d’une légende.
A l’approche des JO, la presse n’a cessé de se poser la même question : qui va chanter à la cérémonie d’ouverture ? Qui va représenter la France ? Deux grands noms se sont bousculés sur les lèvres de tous en se rappelant des légendes de la chanson française, Charles Aznavour et Edith Piaf. On a tous entendu Formidable, L’Hymne à l’amour ou Emmenez-moi pendant ces jeux. Mais il y a ceux qui savent de qui l’on parle en prononçant ces noms, et il y a ceux, dont je fais partie, qui ne peuvent pas mettre de visage sur ce nom. Avec Monsieur Aznavour de Medhi Idir et Grands Corps Malade, je me suis dit qu’il n’est jamais trop tard pour découvrir l’histoire de Charles Aznavour, véritable monument de la culture française.
« On connaît tous l’histoire »
En entrant dans la salle, j’observe discrètement mes collègues, essayant de déceler un sentiment comparable au mien. Je ne sais pas ce que je vais voir. Je connais le nom d’Aznavour, évidemment. Bercée par les Beatles, la musique française reste une vaste inconnue devant lequel mes lacunes ne peuvent que me faire rougir de honte. Certains des titres d’Aznavour ne me sont tout de même pas inconnus, autant dans les stades où la douce rengaine d’Emmenez-moi saisit si souvent le public. Alors quand une collègue me demande un crayon, je lui demande timidement si elle prend des notes pendant la projection. Elle me répond que oui, elle fait ça comme elle peut, mais de toute façon « on connaît tous l’histoire ».
Mais justement, moi non. Je ne sais rien du tout. Je réalise que je ne vais avoir aucun moyen de comparaison pour juger le jeu de l’acteur principal. Comme tout le monde, en voyant pour la première fois la bande annonce du film, j’avais relevé que le visage du rôle-titre n’était jamais dévoilé. Connaissant le visage de Tahar Rahim je trouvais difficile de le voir sous les traits d’Aznavour, tout simplement parce que je n’avais pas de référenciel. Cela ne m’a tout de même pas empêché de le trouver absolument méconnaissable et donc, très convainquant.
Un rythme entraînant
L’ouverture du film est rapide, les plans se succèdent à un rythme soutenu. Excepté ces quelques cartons pour signifier le déroulé d’une histoire sous forme de chapitres, ce que je trouve d’ailleurs totalement inutile, le début du long métrage nous saisit tout de suite. Depuis le fond de mon fauteuil, je suis frappée par tout ce que je découvre. La guerre, les réfugiés arméniens, les quartiers de Paris résistants… Je n’avais jamais rattaché le nom d’Aznavour à cette période. Paris est belle dans le film, ça j’en suis sûre. Je crois reconnaître un personnage comme étant Edith Piaf avant de la voir réellement apparaître quelques minutes plus tard à l’écran me faisant ainsi réaliser à quel point je me suis trompée.
Certaines grandes figures de la chanson se succèdent à l’écran, Charles Trenet, Franck Sinatra… On entend même le nom de Monsieur Truffaut dans une scène qui reproduit à l’exactitude une scène du film Tirez sur le Pianiste du fameux cinéaste. Monsieur Aznavour est donc un biopic qui ne perd pas de temps. En effet, ce genre de film s’annonce souvent comme un exercice difficile de synthèse qui ne doit pas être trop éludé ou trop lent de peur de mettre de côté bon nombre d’éléments. Ici, on se laisse emporter par la rapidité des plans, ce qui termine par faire sens tant le rythme de vie du principal intéressé est effréné. Et finalement, on termine par ne plus voir le temps passer. Quand les lumières se sont rallumées, moi, j’en voulais encore.
Une histoire touchante
L’histoire d’Aznavour me conquit très vite. Si je n’ai pas la moindre idée de la vraisemblance du jeu de Rahim, si je ne peux absolument pas dire si ses postures sur scènes sont véridiques, tout me plaît. La trajectoire de ce jeune homme, dans lequel personne ne croit, a un côté que je trouve profondément universel. C’est fou de songer qu’une voix aujourd’hui considérée comme mythique a mis tant de temps à se dévoiler. Charles Aznavour est l’exemple qu’on peut réussir tout ce que l’on veut, mais que cela nécessite du temps, de la volonté et surtout, du travail. Sur ce point, la film aborde subtilement les excès des ambitions du chanteur. En effet, le succès vient avec l’investissement, mais c’est aussi un cercle vicieux qui aboutit au désir de vouloir toujours plus.
Medhi Idir et Grands Corps Malade parviennent à établir une sorte de proximité entre le spectateur et le personnage principal. On a de la peine pour Aznavour, pour les divers commentaires odieux qu’il ne cesse d’essuyer. Progressivement, ce petit bonhomme au costard trop grand termine par prendre tant de place à l’écran que les limites de ce dernier en sont repoussées. Enfin, le récit de l’ascension prodigieuse de Charles Aznavour permet aux réalisateurs de rappeler qu’il est bon de ralentir. De prendre le temps pour soi, pour nos proches, au risque de s’enfermer dans le cercle vicieux de l’éternelle insatisfaction.
Séance hors du temps, le long métrage de Medhi Idir et Grand Corps Malade offre une plongée dans la vie d’une légende de la musique française. Hier encore, je ne savais rien du compositeur de La Bohème, et Monsieur Aznavour m’a tendu une main engageante pour m’emmener découvrir une légende.
Monsieur Aznavour est en salle dès le 23 octobre 2024
Avis
Je vous parle d’un temps où je connaissais pas Aznavour et je vous partage ma découverte toute récente de sa légende. Monsieur Aznavour est le moyen de découvrir, ou de redécouvrir, la vie et l’ascension fulgurante d’un homme des plus inspirants.