La Pièce Rapportée voit Antonin Peretjatko adapter pour la première fois une nouvelle, et s’attaquer de front aux écarts de classe dans une farce politique où la fantaisie du cinéaste laisse ici place à la roublardise.
La Pièce Rapportée est le troisième long-métrage d’Antonin Peretjatko, cinéaste fantasque révélé en 2013 avec le génial La Fille du 14 Juillet, mix improbable entre Tex Avery et Nouvelle Vague, le cinéaste ayant été mis en avant aux côtés d’une jeune nouvelle vague de cinéaste auteuristes comptant Guillaume Brac et Justine Triet. La politique a ainsi toujours été un fil conducteur dans la filmographie d’Antonin Peretjatko : de la célébration d’une fête nationale (La Fille du 14 Juillet), en passant par les mésaventures d’un stagiaire au ministère de la norme (La Loi de la Jungle) où même en sujet principal de son récent court-métrage Panique au Sénat.
La pièce d’occasion
Avec La Pièce Rapportée, Antonin Pertjatko adapte ainsi pour la première fois une nouvelle de Noëlle Renaude, Il faut un héritier, au détour d’une farce sur la bourgeoisie qui n’a malheureusement de mordant que ses quelques idées visuelles. Parce que c’est ici tout ce qu’il reste au cinéaste de fantaisie pour emballer ce scénario ultra-attendu, où la farce et le burlesque laissent ici place à des représentations caricaturales et stériles, où jamais les prodigieux acteurs n’ont réellement l’occasion de briller, où même de réellement se confronter.
L’emballage est ainsi toujours aussi alléchant, de la photographie de Simon Roca à la musique de Mathieu Lamboley en passant par les costumes de Sidonie Pontanier. Malheureusement, le fond est quand à lui désespérément vide. La farce politique mordante ne se résume ainsi qu’à quelques fades répliques sur les gilets jaunes où l’impôt sur la fortune, et la critique se mue ainsi en une démonstration aussi factice qu’attendue de fantaisie grossière dénuée de la moindre poésie.
La pièce manquante
Anaïs Demoustier surnage ainsi une fois de plus, succédant ainsi brillamment à la précédente muse du cinéaste, Vimala Pons. L’actrice irradie véritablement La Pièce Rapportée de sa gouaille rayonnante et de sa grâce juvénile, face à des acteurs enfermés dans des stéréotypes dont ils n’arrivent malheureusement jamais à s’extraire. Si ce ne fut jamais un problème dans les précédentes œuvres du cinéaste, car ses personnages se trouvaient emportés dans des aventures rythmées et tourbillonnantes de créativité s’attaquant de front à un système politique national absurde, ici les pauvres Sergi Lopez, Philippe Duquesne, William Lebghil et Philippe Katerine semblent presque effacés derrière des représentations caricaturales jouées en pilote automatique.
La confrontation tant espérée entre eux n’explosent jamais, et Josiane Balasko se contente même de jouer les matriarches autoritaires jusqu’à ses limites. La Pièce Rapportée ne laisse ainsi absolument aucun goût en bouche que celui d’une petite parenthèse vide et complètement inconséquente, dont toutes les ambitions se trouvent cloisonnées dans ce petit hôtel particulier qui sert de prodigieux décor, mais dont les portes resteront cloisonnées pour le commun des mortels, riches comme pauvres. L’égalité n’est-elle donc pas au moins respectée ?
La Pièce Rapportée est disponible en VOD, DVD et Blu-ray chez Diaphana édition vidéo.
Avis
La Pièce Rapportée ne conserve que l'alléchant emballage du cinéma d'Antonin Peretjatko. Parce que le fond est quand à lui désespérément vide, et la farce politique absurde cède ainsi rapidement sa place à une comédie datée, poussive et attendue où la fantaisie cède sa place à la roublardise, où même les acteurs semblent enfermés dans des stéréotypes jamais amusants.