La Malédiction – L’Origine réveille une franchise endormie depuis près de vingt années pour un opus cherchant perpétuellement son identité, coincé entre sa maladroite tentative d’appropriation et son accumulation de bêtise.
La Malédiction revient donc après dix-huit longues années de sommeil, et il est difficile de ne pas penser, à la découverte de ce nouvel opus, à autre chose qu’à une tentative grossière de Disney, nouveau propriétaire de la franchise, de surfer sur les succès de la concurrence en dévorant les restes d’une franchise trop longtemps enterrée et pas assez exploitée. Embauchant dans ses propres écuries la talentueuse Arkasha Stevenson, ayant notamment sur la formidable série Legion, et convoquant l’un des scénaristes du honteux Firestarter, ainsi que trois têtes connues de Game of Thrones (Charles Dance, Nell Tiger Free et Ralph Ineson… et Bill Nighy ?), La Malédiction – L’Origine semble ainsi rapidement plus emprunter à La Nonne qu’à Rosemary’s Baby et qu’au premier opus de la franchise, petit modèle du genre (disponible sur Disney+) réalisé par le regretté Richard Donner.
Parce que pour ce retour très éloigné du roman original de David Seltzer, qui narrait comme le premier long-métrage l’adoption par un couple d’américains de l’antéchrist en personne, Disney choisit la voie sûre du préquel, histoire de rebooter une saga en jouant à peu près sur tous les tableaux, de la fade relecture féministe en passant par le film train-fantôme et la tentative grossière de (re)lancement de franchise, en ne réussissant l’exploit de ne jamais rien être qu’un beau gâchis dont la bêtise et les grosses ficelles étouffent la moindre tentative de prise de risques.
Nonne-adapté
La Malédiction – L’Origine se déroule donc bien avant la naissance de Damien, notre cher antéchrist fil rouge de la franchise. On y suit, dans les années 70, l’arrivée de Margaret à Rome, venue y travailler dans un couvent et s’y préparer à présenter ses vœux. Rapidement, elle se trouvera confrontée à une conspiration ayant pour dessein de mettre au monde l’antéchrist. Né de l’idée du David S. Goyer de savoir d’où venait ce cher enfant du diable, La Malédiction – L’Origine fourmille tout, d’abord, malgré un début plutôt laborieux, de bonnes idées. L’idée d’ancrer le film et son contexte clérical au cœur d’une époque rejetant les institutions établies, et de confronter l’image d’une église vieillissante et étrange aux envies d’émancipation d’une jeune femme qui s’avèreront n’être qu’un piège.
Mais voilà, malgré quelques scènes d’hallucinations prenantes mais finalement répétitives (et des choix musicaux soignés, il faut le noter), le long-métrage d’Arkasha Stevenson se met alors à dangereusement s’essouffler. Perdu entre sa volonté d’appropriation qui s’éteindra au fur et à mesure d’idées idiotes, et de sa volonté de surfer sur le succès récent de La Nonne, qui délaissait toute idée de scénario pour aligner les occasions de jump-scare jusqu’à la migraine, La Malédiction – L’Origine ne trouve jamais sa direction. Rejouant à la fois un inutile fan-service, dans un récit dénué de la moindre surprise et d’un quelconque suspense, ce préquel s’avère être à des années lumières de son modèle original, et se met alors à dangereusement ne devenir qu’un produit à la fois générique, bête et cruellement désincarné.
Satangue
Malgré le talent de son actrice principale, la parfois impressionnante et habitée Nell Tiger Free, La Malédiction – L’Origine s’écrase alors dans le mur d’un final qui aurait pu être fascinant s’il ne s’avérait pas bâclé, rendu inconsistant malgré de beaux visuels par des évènements aussi attendus qu’un final aussi grotesque que son envie de suite que personne n’a réellement envie de voir. Parce que ses personnages s’avèrent écrits à la truelle, que la raison même de l’existence de ce préquel s’avère tué dans l’œuf par une justification ridicule (qu’on vous laissera au moins la surprise de découvrir) et que tout s’avère finalement terne et attendu, on passe alors rapidement de l’attente à la douche froide.
Ainsi, si le premier opus de La Malédiction se jouait de l’imagerie religieuse et se riait du portrait de la parfaite petite famille américaine avec une ironie mordante et une impeccable fluidité, ce préquel n’en reprend rien que des motifs, rejoués sans la moindre quête de sens. Il ne reste ainsi que des habits et des décors, et tout un imaginaire passé à la moulinette de productions actuelles désincarnés, réunies pour n’être qu’un succès facile mais reniant tout ce qui faisait la puissance de son modèle. On lui préfèrera le plutôt le récent, prenant et étonnamment jusqu’au boutiste Immaculée, qui aurait fait, en étant loin d’égaler l’œuvre originale, un préquel beaucoup plus satisfaisant que cette formule désincarnée dénuée de la moindre âme, et qui n’a finalement de diabolique que son triste appât du gain facile et du sacrifice d’une formidable franchise.
La Malédiction – L’Origine est actuellement en salles.
Avis
Réveiller une saga endormie depuis près de vingt années relève ici plus pour Disney d'une opération mercantile surfant sur le succès récent de La Nonne, que d'une quelconque tentative d'appropriation, délivrant ici un projet sans réelle identité, paraissant instantanément plus daté et plus creux que le film original dont il est tiré, datant de 1976.