Dans Heretic de Scott Beck et Bryan Woods, deux jeunes missionnaires de l’Église mormone locale font un porte à porte quotidien pour répandre la bonne parole. En fin de journée, elles se décident à frapper à la porte d’une maison reculée, et c’est le charmant Monsieur Reed, interprété par Hugh Grant, qui vient leur ouvrir.
Dans Heretic de Scott Beck et Bryan Woods, Hugh Grant endosse le rôle d’un psychopathe extrêmement éloquent. Se sentant des envies de longues discussions, son personnage Monsieur Reed, entreprend un exposé à rallonge sur la religion depuis la nuit des temps.
Charmant psychopathe
On ne présente plus Hugh Grant, éternel romantique au sourire des plus charmeurs. Dans Heretic, l’acteur est très loin de son répertoire habituel. Et si cela peut faire grincer des dents, il faudra tout de même avouer que cette reconversion fonctionne très bien. Eh oui, une carrière dans les rom coms n’exclut pas d’endosser un rôle de psychopathe éloquent. Sur ce point, Hugh Grant est parfait. Tout le film semble être une sorte de terrain de jeu pour l’acteur qui se régale dans son rôle. Heretic est le dérangeant rappel qu’un psychopathe peut tout à fait arborer le plus beau des sourire. Restant ce parfait gentleman britannique, Monsieur Reed n’en est pas moins profondément malsain. Tout ça, sans jamais cesser de sourire.
Maître d’un jeu pervers, à la manière d’un Jigsaw à visage découvert, Monsieur Reed a pourtant un objectif assez obscur. En effet, pour reprendre les termes du personnage, toute sa discussion avec les deux sœurs est « un marchandage d’idée ». Bon, pourquoi pas dirons-nous. La figure du psychopathe brillant est très intéressante, mais très vite les choses s’enlisent dans un discours qui ne finit pas. On attend inlassablement que quelque chose se passe concrètement à l’écran. Heretic laisse en cela peut-être trop de place à son acteur à l’écran. Si le plaisir d’Hugh Grant à interpréter un tel rôle est évident, Monsieur Reed devient malheureusement ce genre d’orateur relou qui prend un plaisir fou à s’écouter parler.
Arguments toujours plus fumeux
Sur le principe, le scénario d’Heretic est loin d’être mauvais. C’est une révision assez brillante de l’histoire du petit chaperon rouge. Deux jeunes filles seules au milieu de nulle part vont toquer chez un monsieur un peu étrange. L’idée est intéressante, mais bascule assez vite dans un fourre-tout inexpliqué d’arguments de plus en plus fumeux. Si c’est bien entendu une joute orale qui se met en place, les dialogues sont à rallonge et basculent dans une surenchère grandissante. Assez rapidement, la discussion arrive à des conclusions qui semblent absurdes tant elles sont bâclées. On ne sait plus pourquoi ils parlent de ça. De fait, on peine à comprendre l’histoire que le scénario s’efforce de raconter.
Pour imaginer les raisons d’une telle confusion, il est assez facile de visualiser des réunions d’écriture du scénario où chacun prend la parole et où on conserve les idées de tout le monde. Plusieurs fois pendant le film on laisse échapper des discrets petits « hein ? ». Parce que oui oui, on peut aussi assister à un film d’horreur et ne rien comprendre à ce qui est raconté. Heretic s’emmêle dans son propos, perd en cohérence, prend des virages franchement inutile... Le rythme du film est globalement très décousu, par moment très lent, il devient d’un coup bien trop rapide. On notera d’ailleurs que la mise en place de l’intrigue est extrêmement longue et la conclusion beaucoup trop brève.
Une horreur trop éclectique
Il est à noter que si l’horreur met un temps fou à se laisser sentir, la mise en scène semble essayer de faire tampon. En cela, les premières scènes dans le salon de Monsieur Reed sont intéressantes à noter. Il n’y a pas de musique, le seul son qu’on entend dans les moments de blancs, c’est celui d’une vieille horloge. Toujours dans ces scènes, l’atmosphère est rendue assez irrespirable par les gros plans répétés. En effet, on ne voit que très rarement les trois acteurs sur le même plan. Ce choix de mise en scène permet de scruter la moindre expression des personnages. En un sens, c’est assez judicieux. Beaucoup de choses se jouent sur les visages de Sœur Barnes (Sophie Thatcher) et Sœur Paxton (Chloe East), aussi bien dans leurs regards que dans leurs postures pendant la discussion.
Enfin, dès la seconde où le personnage de Monsieur Reed entre en scène, on comprend à qui on a affaire. Hugh Grant fait en effet irruption à l’écran par une contre plongée qui le rend tout de suite inquiétant. On a l’impression de voir un géant débarquer. De plus, l’ambiance sonore ainsi que la colorimétrie de l’image donnent tout de suite le ton. Seulement voilà, si toute cette mise en scène réfléchie permet d’étiqueter Heretic comme film d’horreur, elle n’en est pas moins très éclectique. Autrement dit, on peut saluer une bonne mise en scène qui n’est pourtant pas mise à l’honneur par le reste du scénario.
Heretic est un film qui essaie de raconter trop de choses et qui de fait perd en cohérence. Malgré un bon casting (on a trop peu parlé des deux actrices, assez bluffantes) les dialogues à rallonge et une intrigue qui met un temps fou à s’installer, Heretic reste un long-métrage assez décevant.
Heretic est en salle depuis le 27 novembre
Avis
Heretic aurait pu être un vrai bon film d’horreur mais rate le coche en s’enlisant dans des dialogues à rallonge. On s’ennuie assez vite devant ce long-métrage bien trop bavard.