Et à la fin, ils meurent est une comédie désenchantée qui nous raconte la (sale) vérité sur les contes de fées.
Et à la fin ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants… Oui mais non, pas dans les versions que vous allez découvrir dans cette pièce ! En effet, exit les récits édulcorés et les happy ends, cette comédie qui ne s’adresse d’ailleurs pas du tout aux bambins nous ramène à la source des contes de fées. Et vous allez voir que ça ne vend pas franchement du rêve !
L’envers du décor des contes de fées
Il était une fois mutilations, meurtres, pédophilie, cannibalisme, antisémitisme, sexisme… On est bien loin de s’imaginer ce que pouvaient contenir les versions originales de nos contes de fées populaires, soigneusement édulcorées (et pas qu’un peu) au fil du temps ! Celles-là, on ne les raconterait pas à nos enfants pour les endormir, c’est certain !

C’est cette « sale vérité sur les contes de fées » que nous dévoile ce texte irrévérencieux et très documenté de Lou Lubie, paru en 2021 aux éditions Delcourt, et adapté et mis en scène avec beaucoup de dynamisme et de fantaisie par Antoine Brin. Sur scène, Pierre-André Ballande, Leïla Moguez, Clara Leduc (Diagonales) ou Eugénie Gendron, et l’excellent Virgile Daudet (Occident ; Pour le meilleur et pour le dire) qui sait décidément s’approprier avec talent des genres très différents, nous offrent un moment aussi divertissant et farfelu qu’instructif.
Une comédie déjantée et ludique
Cette folle équipe nous plonge dans les versions originales et souvent méconnues de classiques tels que Cendrillon, Barbe Bleu, ou Le Petit Chaperon Rouge, mais aussi à la découverte de récits plus énigmatiques comme La vieille écorchée, depuis l’Antiquité jusqu’aux contes de Grimm et de Perrault. Ces derniers font d’ailleurs l’objet d’un comparatif jubilatoire, et l’on réalise à quel point les contes sont, dans chacune de leurs très nombreuses versions, le reflet d’une époque et de la personnalité de leur auteur.

Ici les princesses se mutilent, les princes n’ont rien de charmant, la petite sirène se fait gentiment friendzoner, et les Spice Girls s’invitent au beau milieu de tout ça ! Et si l’on rit de cette adaptation et mise en scène au kitch assumé, de ces situations comiques souvent improbables, de ce décor en carton de Sabrina Moguez, ou encore des anachronismes qui ponctuent la pièce et créent un lien intéressant entre les époques, on s’instruit aussi beaucoup.
Et à la fin, ils meurent : les contes, reflets de leur époque
En effet, Et à la fin, ils meurent est avant tout une œuvre très documentée qui propose une véritable exploration culturelle et nous dévoile des aspects méconnus de l’éthique des contes. On découvre par exemple avec étonnement que si les contes hétéronormés sont les seuls qui ont survécu, l’inclusivité existait bel et bien dans ces récits avant que la censure ne vienne les effacer de l’histoire. Preuve, s’il en faut encore, que notre époque n’a rien inventé en la matière.

Il y a du rythme, de l’énergie, de la fantaisie, et les applaudissements chaleureux témoignent de l’ambiance que ces cinq artistes pleinement engagés parviennent à installer. Hormis quelques références à notre époque et autres propos un peu lourds dont nous aurions allégé l’ensemble, cette comédie surprenante et irrévérencieuse est une bouffée d’air frais qui offre un moment de divertissement léger et ludique.
Et à la fin, ils meurent de Lou Lubie, adaptation et mise en scène Antoine Brin, avec Pierre-André Ballande, Virgile Daudet, Leïla Moguez, Clara Leduc ou Eugénie Gendron, se joue jusqu’au 24 mai 2025 à La Manufacture des Abbesses.

Avis
Si l'humour gagnerait à être un peu mieux dosé, cette comédie originale et déjantée nous a agréablement surpris. On passe un très bon moment, on rit, on s'étonne, on en discute après, et on pose inévitablement un regard différent sur ces contes de fées dont les versions originales auraient eu de quoi peupler nos nuits d'enfants de cauchemars !