Édith Piaf, je me fous du passé est un spectacle musical qui nous plonge dans une fiction originale et brillante autour de la vie de la chanteuse mythique.
Nous sommes en 1937 à Paris. Édith Piaf connaît un succès fulgurant, au point que de nombreux directeurs de cabarets embauchent des chanteuses plus ou moins ressemblantes. Pendant ce temps, la jeune Thérèse chante dans la rue, espérant pouvoir un jour vivre de sa passion.
Édith, Thérèse : deux femmes aux physiques et aux voix étonnamment ressemblantes ; deux destins que nous découvrons en parallèle, et dont les routes vont se croiser, s’entremêler jusqu’à se confondre…
Il était une voix…
En voyant le titre de la pièce nous nous sommes d’abord dit : encore un biopic sur cette grande dame de la chanson. Bon, pourquoi pas, c’est toujours l’occasion de réécouter ces grands succès dont on ne se lasse pas. Mais que nenni ! Si Édith Piaf est en effet au premier plan de ce spectacle, c’est bien d’une fiction qu’il s’agit. D’une surprenante fiction même, avec son lot de suspense et de rebondissements. Et on ne s’ennuie pas un seul instant !
« Je t’ai trouvé La Môme, plus vraie que l’originale ! »
Quand le patron d’un cabaret des bas-fonds parisiens propose à Thérèse de l’engager pour remplir sa salle, la jeune femme bien décidée à aller au bout de son rêve accepte. Mais, rapidement, l’homme se révèle être un manipulateur sans scrupules, et celle qui n’était qu’un sosie de Piaf va alors se trouver prise dans un véritable engrenage qui va finir par mettre à mal sa santé physique et mentale.
Une scénographie inventive
Dans un décor épuré, des projections d’images et vidéos d’archive viennent de temps à autre poser un contexte, une ambiance, tandis qu’une atmosphère lumineuse un peu poussiéreuse nous plonge efficacement dans cette période troublée de l’Histoire. Le Paris des années 30 à 60 nous apparaît, plus vrai que nature. On est d’ailleurs troublé par la vraisemblance de cette fiction qui se fraye un chemin à travers de nombreux éléments connus comme les entretiens filmés de Piaf, ses écrits, les témoignages de ses proches et autres archives de son époque.
La mise en scène soignée et dynamique de Loïc Fieffé est excellente – et quelques scènes nous régalent véritablement. Comme celle dans laquelle Thérèse est formée à devenir Piaf, plus seulement à la scène mais aussi à la vie. Certains procédés scéniques inventifs et habiles viennent donner de l’envergure à la pièce. On pense par exemple à cette scène très émouvante qui réunit avec poésie passé et présent tandis que la chanteuse et son frère évoquent des souvenirs.
Une partition tout en justesse
Pas de fausse note côté distribution. Avec son air un peu égaré, cette « Thérèse-Piaf », interprétée par Léa Tavares, est bouleversante. Elle nous subjugue, tant par sa voix ensorcelante que par ce regard profond dans lequel brille une tendre tristesse. Elle a d’ailleurs eu notre préférence, même si Béatrice Bonnaudeau est elle aussi très convaincante – bien que moins attachante – dans la peau de La Môme.
Nous avons été séduits également par le jeu très authentique et sans effet de Nicolas Soulié dans le rôle de Lulu – seul personnage dont la destinée nous a d’ailleurs laissés un peu perplexes. Pour le reste, cette histoire à la dynamique parfaitement fluide nous a transportés. Et puis, inutile de parler du bonheur évident de réentendre quelques-unes des merveilleuses chansons de l’Artiste.
Mon cœur est au coin d’une rue ; Mon amant de Saint-Jean ; L’Hymne à l’Amour ; Je ne regrette rien… Les moments chantés sont d’ailleurs parfaitement intégrés, ce qui n’est pas toujours le cas dans ce type de spectacles où l’intrigue apparaît parfois comme simple prétexte à un « concert ». Ici, l’histoire est captivante, riche, inventive et habilement structurée. Quelques moments cocasses viennent ajouter des rires à la palette d’émotions, jusqu’à un final émouvant.
Bref, rien de rien, non, on ne regrette rien !