Black Panther : Wakanda Forever était attendu avec un degré d’émotion supplémentaire. Mais en évitant le pathos, Ryan Coogler frôle néanmoins l’indigestion.
Black Panther : Wakanda Forever est de ces projets que l’on a envie d’aimer. Porté par un metteur en scène talentueux, une distribution impeccable et traitant de thématiques rarement abordées dans des blockbusters super-héroïques en perpétuelle quête d’identité, ce second opus proposait en plus un degré d’émotion supplémentaire. Parce que la disparition de Chadwick Boseman s’est avérée aussi inattendue que tragique, et que l’immense succès du premier opus avait permis de remettre les pendules à l’heure sur nombre de sujets actuels. Cependant, tout cela était déjà mis au service d’une sympathique coquille vide dont les visuels s’avéraient aussi fades que le reste. Que va donc pouvoir nous proposer ce Black Panther : Wakanda Forever, plus long, plus ambitieux et surtout plus émouvant ? Trop, et au final si peu.
Quête d’identité
Black Panther : Wakanda Forever débute sous les meilleures auspices. Traitant avec beaucoup de pudeur et sans pathos de la disparition de son héros, érigé en symbole d’une nation, l’hommage s’avère aussi juste que réussi, ouvrant le métrage sur un pays déchiré. Anéanti par le deuil, en perte totale de repères, et confronté à des nations lorgnant sur le précieux vibranium, la menace du puissant Namor, ainsi que l’introduction d’Iron Heart viennent cependant sans cesse alourdir une formule qui s’égare et s’alourdit. Toutes ces nouvelles propositions viennent ainsi sans cesse fragiliser un projet plus ambitieux certes, mais aussi beaucoup plus inégal.
L’efficacité du premier opus se voit ici noyée sous nombre de sous-intrigues et de thématiques abordées sans jamais être approfondies, au service d’un spectacle jamais empreint de l’émotion nécessaire. Comme son pays imaginaire, le scénario de Ryan Coogler et Joe Robert Cole s’avère être en perpétuelle quête d’identité à offrir à ce second opus. Comme Doctor Strange in the Multiverse of Madness mais sans l’identité visuelle d’un véritable metteur en scène, Black Panther : Wakanda Forever s’épuise et s’étiole au fur et à mesure qu’il se dévoile, pour finalement retomber sur ses pattes dans un final très alambiqué. Toutes les tentatives s’avèrent finalement mener vers la même et fade recette, et ce malgré une véritable quête d’émotion.
Marvel Forever
Parce que Ryan Coogler tente au milieu de ce chantier en quête d’architecte d’offrir un tant soit peu de profondeur à ses personnages, et c’est là qu’est la véritable, mais néanmoins fragile, force de Black Panther : Wakanda Forever. Letitia Wright, Lupita Nyong’o, Danai Gurira et, chose rare, même l’antagoniste Namor campé par Tenoch Huerta Mejía se voient dotés d’une écriture leur offrant un tant soit peu d’épaisseur. On lit ainsi la déchirure sur leur visage, et ces derniers apportent une petite corde sensible à une machinerie impassible aux visuels une fois de plus très fades. Au milieu de ces royaumes engloutis que l’on visite comme des parcs d’attraction, de ces pistes sur l’esclavage amenés de manière grossières et maladroites, Ryan Coogler semble apporter du cœur à ses personnages, qui tentent de surnager au milieu d’un navire qui prend l’eau de tous les côtés.
Il y ainsi une émotion presque inattendue dans l’affrontement final, après une très générique bataille, et avant une scène post-générique qui dépasse enfin l’amusant et futile clin d’œil où le vulgaire spot publicitaire. Si Black Panther : Wakanda Forever ne vaut que pour sa formidable distribution, on se demande quel besoin avait Ryan Coogler de faire cohabiter un sentiment pur et universel comme le deuil et la quête de soi au milieu d’un cahier des charges gargantuesque qui ne fait que dévoiler ses failles. Peut-être la pudeur, où un perpétuel sentiment mercantile parasitant tout ce qui pourrait susciter la moindre émotion. Que le Wakanda soit éternel, on peut ainsi en douter face à la recette d’un studio, qui elle, a encore de beaux jours devant elle, pour le meilleur, comme pour le pire.
Black Panther : Wakanda Forever est sorti le 9 novembre 2022.
Avis
Black Panther : Wakanda Forever échoue une fois de plus à approfondir de nombreuses thématiques intéressantes, ici soit amenées de façon très maladroites, ou bien noyées sous un cahier des charges qui n'en finit plus d'alourdir et d'étouffer pour si peu de surprises. Seul reste la superbe distribution, où Ryan Coogler semble se réfugier en offrant un tant soit peu de cœur et de développement à des personnages cherchant l'émotion au beau milieu d'une formule qui n'en finit plus de se répéter.