Smithereens : L’omnipotence et la toxicité des réseaux sociaux 4/5
Chris, joué par Andrew Scott (Moriarty dans Sherlock) est un homme endeuillé qui décide de prendre en otage un stagiaire d’une grande entreprise de réseau sociale nommée Smithereens. Son but : tenter d’avoir au téléphone le créateur de ce réseau, un certain Billy Bauer joué par Topher Grace.
Alors que l’épisode précédent jouait à fond la carte de l’intimisme, ici, ce nouvel épisode de Black Mirror côtoie comme jamais le réalisme. Exit les concepts farfelus et « retourneurs » de cerveau, l’histoire peut tout à fait se dérouler dans notre époque actuelle, Smithereens étant un pseudo facebook et Billy Bauer un ersatz de Mark Zuckerberg.
Ce qui frappe en premier est l’absurdité de la puissance du réseau social qui est mis en scène. En effet, l’équipe de ce géant numérique est plus efficace et rapide dans son investigation que toutes les forces de l’ordre réunies. La police est dépassée par son temps, incapable de gérer tandis que grâce à moult algorithmes, banques de données et autres, Smithereens est plus apte à s’occuper de la situation de crise. Il est d’autant plus cinglant de voir le fameux FBI, constamment glorifié dans les oeuvres de fiction, se voir relégué au rang de clown face à ce réseau sociale. Un constat piquant sur la force de tel conglomérat avec un certain relent d’absurde noir qui semble tout droit inspiré du ton des frères Coen.
De plus, l’impact des réseaux sociaux est toujours abordé sous l’aspect le plus réaliste. Le protagoniste a notament provoqué la mort de sa femme en regardant son téléphone alors qu’il conduisait. Le réseau social est alors présenté par son aspect toxique et addictif qui déconnecte de la réalité. Mais là où l’épisode est d’autant plus pertinent, ce n’est pas tant qu’il condamne le réseau social en soi, mais l’utilisation qu’on en fait. Billy Bauer n’est pas un savant fou qui abrutit l’humanité par son invention; mais un jeune concepteur un peu excentrique, littéralement dépassé par le succès de son invention et sa spirale économique. Coucou Zuckerberg.
Outre la finesse de son propos qui dépasse le simple “la technologie c’est le mal”, l’épisode marque par sa mise en scène soutenue qui tient en haleine à travers sa prise d’otage en semi huis clos. On peut trouver l’approche du concept technologique simpliste (car totalement ancré dans notre réel) comparé à ce que nous avait habitué la série, mais sa construction narrative n’en reste pas moins impeccable. On pourrait regretter un final un peu facile, mais qui ne dérange pas du tout la pertinence de l’épisode.