Avec Avignon, comédie romantique chaleureuse signée Johann Dionnet, le Festival éponyme s’offre un petit film estival à son image : vivant, généreux et théâtral.
Stéphane, comédien intermittent (galérien donc), débarque à Avignon pour jouer une pièce de boulevard avec sa troupe, et se retrouve à prétendre incarner Rodrigue dans une adaptation du Cid. Le réalisateur-acteur Johann Dionnet observe avec bienveillance ce petit monde avignonnais où s’entremêlent ambitions, flirts de festival et rivalités de coulisses. Le film Avignon ne réinvente rien, et on sent vite qu’il coche pas mal de cases de la comédie romantique française, soit très balisée, même si très attachante.

Réalisé et interprété par Johann Dionnet, qui joue également un rôle secondaire central, Avignon est coécrit avec Benoît Graffin et produit par Nolita Cinéma, TF1 Cinéma et France 2 Cinéma, de quoi laisser appréhender ce chouette projet, forcément teinté d’une patine télévisuelle (même si le film est distribué par Warner). La photo de Claire Pierrat fait ce qu’elle peut pour réchauffer l’image, mais on sent vite que l’énergie du film repose plus sur son ambiance que sur sa mise en scène tandis que la musique de Sébastien Torregrossa vient souligner avec douceur les hésitations sentimentales sans jamais trop en faire. Une bonne pioche donc, ensoleillée mais un peu nuageuse.
Amour, théâtre & quiproquos
La cité papale, majestueuse et familière, devient ici un véritable décor vivant. On sillonne les remparts, les arrière-salles du off, les scènes improvisées et les bars bondés où les artistes se croisent, se jaugent, s’applaudissent ou se toisent en sirotant un verre de rosé. Car Avignon ne se contente pas de filmer la magie du théâtre, il capte aussi ses tensions souterraines et axe son propos sous-jacent sur la joute sociale qui oppose, en creux, les comédiens issus du théâtre dit « légitime », qui montent du Racine ou du Koltès, et ceux du boulevard, vus avec un certain mépris condescendant. Dionnet aborde ce clivage sans en faire des caisses, mais avec justesse, en laissant apparaître les regards en coin et les remarques à demi-mot. Une manière habile de dessiner les frontières invisibles qui traversent le monde du spectacle vivant.

Cette atmosphère nourrit le ton général du film qui mise tout sur la sympathie et sa force évocatrice : la comédie romantique. Ça ne révolutionne rien, mais ça tricote un récit à base de bons sentiments, de petits mensonges et de secrets sur les planches. Le mensonge de Stéphane (se faire passer pour l’interprète principal du Cid) devient vite le fil rouge d’une suite de quiproquos parfois bien trouvés, parfois mécaniques. Néanmoins, il y a une vraie tendresse dans le regard porté sur ce petit monde d’acteurs, et un plaisir sincère à filmer les amitiés, les fragilités ou le plaisir simple d’assister à une représentation. On pourrait tiquer sur le ton un peu trop sage, mais difficile de ne pas se laisser embarquer dans cette entreprise qui, finalement, nous plonge dans l’agitation douce d’un monde où l’on rêve encore. Ce n’est pas un feu d’artifice, loin de là, mais une guirlande de lumières chaudes au cœur de l’été.
Une comédie qui sent bon la scène… et le studio
Côté casting, Baptiste Lecaplain porte le film avec sa maladresse coutumière, et ce mélange d’humour doux-amer qui lui colle bien à la peau, en interprétant un Stéphane un peu pathétique, souvent à côté de la plaque, mais toujours sincère. Alison Wheeler, en meilleure amie lucide, trouve un bel équilibre entre moquerie affectueuse et soutien constant quand, pour compléter ce triangle, Élisa Erka campe une Fanny à la fois impressionnante et accessible, étoile montante de l’acting qui voit en Stéphane un homme plus profond qu’il ne l’est vraiment. Le reste du casting (Lyes Salem en tête ou Rudy Milstein ou le trop invisible Amaury de Crayencour) ajoute une authenticité bienvenue, même si certains rôles restent en surface. On sent surtout une ambiance de troupe, une envie de jouer ensemble. Et ça, ça marche bien.

Tout cela n’empêche pas Avignon de rester dans des rails assez classiques. En effet, à part quelques respirations en extérieur, l’ensemble du film reste visuellement assez pauvre où trop de plans serrés, de scènes en intérieur manquent d’ampleur et ternissent l’ensemble, comme s’il fallait camoufler les limites du tournage. On retrouve cette patte très typée comédie francophone « franchouillarde », qui préfère « l’efficacité » du dialogue au travail du cadre et où l’humour aussi coche parfois les cases du tout public. Entre les blagues adulescentes, le comique de situation ou les gags faciles, rien n’est catastrophique, mais c’est parfois un peu poussif. L’ensemble paraît donc presque incarner la vitalité du théâtre de boulevard, dans ce qu’il propose de plus fédérateur ou de plus cliché. Enfin, on fera abstraction sur les scènes qui s’éternisent, les rebondissements amoureux prévisibles à mille lieux mais bon, ça parle d’amour, d’amitié, et ça reste attachant. Alors on pardonne.
Malgré ces faiblesses, Avignon remplit largement son contrat et on en sort avec le sourire et l’envie de retourner au théâtre. C’est un petit film sans prétention mais pas sans charme, à l’image de son personnage principal : imparfait, un peu maladroit, mais profondément humain. Et ça, juste avant que Mélina n’investisse le Festival d’Avignon, ça fait franchement du bien.
Avignon sort ce 18 juin 2025.
Avis
Chaleureux et sympathique, le film Avignon de Johann Dionnet propose une comédie romantique alliant la magie du théâtre aux romances estivales. C'est convenu mais on y passe un bon moment !
Un commentaire
Ah ah ! En effet, ce film était un chouette échauffement avant que j’aille user les ruelles d’Avignon ! 😉 Pour ma part j’ai adoré le film qui retranscrit à merveille l’univers si unique et merveilleux du Festival que l’on n’avait encore jamais vu porté à l’écran. Et Baptiste Lecaplain est pour moi une vraie révélation dans ce film. Son jeu est si naturel et sincère qu’on y croit à 1000%. Je trouve que ce film, avec tout sa simplicité et son charme reflète tout à fait l’atmosphère du Festival. 🙂