Réalisé entre Pusher I et l’urgence financière de Pusher II, Bleeder est tout ce pour quoi Nicolas Winding Refn a été remarqué à la racine même de son cinéma. Soit une captation vive et alerte de l’horreur quotidienne, de sa banalité malsaine, de son grotesque routinier. Ici, c’est dans l’intimité d’un homme révulsé d’être futur père, de son beau-frère le dominant et d’un pote fondu de cinéma en recherche d’ailleurs que celle-ci s’immisce et fait des ravages.
Et c’est finalement dans cet impact foudroyant d’un portrait humain inquiet que Refn s’est toujours montré le plus pertinent, loin de ses velléités oedipiennes bardées de néons thaïlandais. Maladroit, gorgé de références et tirant parfois sur la corde du glauque le plus improbable (twist final tétanisant mais peu subtil à la clé), le film n’en agit pas moins comme un uppercut terrassant dont on met plusieurs minutes à se remettre.
Et comme il est traversé d’angoisses personnelles, d’un questionnement sur la violence plutôt mature et qu’il ferme sur une forme d’apaisement bienvenue, Bleeder mérite bien une révision au sein d’une filmographie si riche en promesses tenues.
Bleeder est toujours scandaleusement indisponible chez nous. C’est donc vers l’Angleterre qu’il faut se tourner, sous-titres anglais à la clé.