Comment je suis devenu stupide nous conte avec humour et fantaisie l’histoire d’un jeune homme qui décide de devenir stupide.
Avec Comment je suis devenu stupide, nous sommes allés approfondir le sujet déjà abordé avec Carlos Flinneroi dans son seul en scène, Génie profond, à savoir : tenter de trouver un remède à la bêtise humaine ! Mais ce n’est pas pour nous hein, c’est pour une amie…
Antoine est en pleine crise existentielle. Convaincu que son intelligence lui gâche l’existence, il prend une décision radicale : celle de devenir stupide. Tout devrait être bien plus simple comme ça. Mais il va se rendre compte que ce n’est pas aussi facile que ça en a l’air… et que ne devient pas stupide qui veut !
Devenir stupide, tout un programme…
Antoine éprouve des difficultés à participer à la vie en société, à s’intégrer à son fonctionnement, à ses codes, à rentrer dans les cases. Il rêve d’avoir des désirs futiles, de se vider le cerveau devant la télévision, de devenir riche et s’acheter un tas de choses dont il n’a pas besoin. Bref, vivre comme tout le monde ! Au lieu de ça, il ne peut pas s’empêcher de penser, de tout analyser, d’essayer de comprendre et, il en est persuadé, c’est ce qui le rend aussi malheureux.
« Je ne veux pas savoir la réalité de la vie. Je veux juste vivre. »
Sa première stratégie est de devenir alcoolique. Une bonne manière de s’anesthésier le cerveau tout en restant intégré car pris en charge par la société ! Il demande alors à un tenancier de bar de le former. Ça ne devrait pas être bien compliqué car il a la volonté ! Mais tout ne va pas se passer exactement comme prévu…
Il envisage alors le suicide comme seconde et ultime option. Mais tandis qu’il rencontre une suicidaire récidiviste, il comprend que la tâche ne sera là encore pas des plus simples. En effet, elle a beau faire son maximum pour optimiser ses chances de réussite, pas moyen de se tuer correctement ! Il compte alors sur un cours d’aide au suicide pour se préparer au mieux ! Un moment très drôle où les comédiens font tomber le quatrième mur et où nous commençons par tous féliciter les membres qui ont réussi leur suicide !
Une belle dose d’ingéniosité
Et c’est finalement au bord du pire qu’Antoine va changer d’avis. Il ne veut, certes, plus vivre, mais il ne veut pas mourir pour autant. Voilà comment devenir stupide apparaît comme l’option idéale. Mais là encore, les méthodes qui s’offrent à lui sont loin d’être de vraies bonnes idées… On ne vous en dit pas plus, cela gâcherait la poésie du dénouement qui vient très joliment conclure la pièce par une touche d’espoir.
» L’intelligence est un raté de l’évolution. »
La mise en scène de Grégory Baud est particulièrement dynamique, efficace et divertissante. Le décor, ingénieux, se compose d’un escalier fixe en fond de scène depuis lequel le Antoine du futur, narrateur, nous conte sa vie, et d’éléments ambulants qui font défiler le présent et nous emmènent au bistrot, dans une salle d’attente d’hôpital, l’appartement d’un ami, le cabinet d’un pédiatre, ou encore le drive d’un mc do !
Dans l’ensemble, on passe un très bon moment. On rit devant ces personnages loufoques et face à l’absurdité des situations ; on se laisse surprendre par les trouvailles scénographiques et les subtilités du décor qui se révèlent par petites touches. Et on finit même par une balade à la fête foraine, très immersive à sa manière (assez surprenante) !
De jolies trouvailles
Cet Antoine est assez touchant, aussi bien dans sa version du présent que dans celle du futur interprétées respectivement par Thomas Cauchon et Benoît Gourley qui ont tous deux une belle présence. Nicolas Délié nous fait beaucoup rire, particulièrement dans le rôle détestable du courtier en bourse. Quant à Mylène Crouzilles, nous l’avons adorée dans celui de Cléopâtre.
Quelques rares moments nous ont paru de trop comme la séquence du désenvoûtement, et d’autres comme celle du bistrot ne perdraient rien à être légèrement raccourcies ou allégées. A l’inverse, d’autres sont particulièrement bien pensés comme lorsque deux comédiens viennent et reviennent tour à tour accrocher des sacs de shopping de marques connues aux bras d’Antoine pour illustrer le moment où il bascule dans un consumérisme effréné. Ou cette scène au milieu de la route où les jeux de lumière et les bruits des voitures nous donnent l’impression de regarder un film. D’ailleurs, une adaptation au cinéma le rangerait dans la catégorie d’un Amélie Poulain.
Comment je suis devenu stupide, d’après Martin Page, mise en scène Grégory Baud, avec Thomas Cauchon, Mylène Crouzilles, Nicolas Délié, Benoît Gourley, se joue à l’Espace Alya, du 7 au 28 juillet, à 21h10 (relâche les mercredis).
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Avis
Cette adaptation du texte de Martin Page déploie des trésors de créativité et de fantaisie qui lui donnent parfois des allures de conte. C'est frais, léger, divertissant, et très habilement construit jusqu'à une fin inattendue et bien pensée.