Maya, une voix raconte le parcours de l’une des femmes les plus emblématiques de la vie artistique et politique américaine.
1993. Maya Angelou s’apprête à lire l’un de ses poèmes pour l’investiture du président des États-Unis. Debout face à 800 000 personnes, son enfance lui revient… Elle nous emmène alors dans ses souvenirs…
1935. Marguerite est une petite fille de 8 ans qui grandit dans un cocon avec son frère aîné et sa grand-mère. Jusqu’au jour ou elle perd sa voix suite à un évènement traumatique. C’est grâce à une rencontre, et surtout grâce à la poésie qu’elle finira par la retrouver… Un récit plein de résilience, de joie et de douceur.
« Les gens oublieront ce que vous avez dit, ils oublieront ce que vous avez fait, mais n’oublieront jamais ce que vous leur avez fait ressentir ».
Maya Angelou
Du silence à la poésie
C’est quand leur père les amènent – son frère et elle – à Saint-Louis pour qu’ils y vivent avec leur mère et son nouveau compagnon, Mr Freeman, que tout va basculer. Maya s’attache à cet homme attentionné et généreux qui s’occupe bien d’elle et de son frère pendant que leur mère scintille sur la scène d’un cabaret. Jusqu’au jour où cet homme abuse d’elle. Déclaré coupable par le tribunal, il sera rapidement assassiné à l’occasion d’une sortie.
La petite fille se sent coupable et renonce alors à parler. Sa voix peut faire trop de mal. Mais, après cinq années de silence, l’arrivée de Madame Flowers dans le village où elle est revenue vivre auprès de sa grand-mère va peu à peu changer la vie de Maya. En effet, cette femme cultivée va la prendre sous son aile, lui faire découvrir la littérature et le goût des mots, et l’aider à retrouver sa voix…
De fabuleuses comédiennes
Que de poésie et de chaleur humaine dans cette pièce ! Elles sont cinq femmes sur scène, cinq formidables comédiennes qui s’emparent du plateau avec une sincérité et une sensibilité qui nous ravissent le cœur. Elles interprètent avec autant de talent les rôles féminins et masculins ; ceux qui inspirent et ceux qui dérangent ; ceux qui reflètent le mépris encore envahissant des blancs envers les noirs et ceux qui éclairent le chemin vers la liberté…
Ursuline Kairson incarne avec beaucoup de douceur, de délicatesse et un accent plein de charme cette militante afro-américaine. Et ses compagnes de scène sont tout aussi lumineuses et brillantes. Elles partagent une belle complicité et dégagent une profonde humanité. Dommage qu’elles nous racontent uniquement l’enfance de Maya. Un peu frustrant c’est vrai, car elles nous donnent envie d’en savoir davantage, de découvrir le parcours artistique et militant de cette femme inspirante.
Une mise en scène qui enchante
La mise en scène d’Éric Bouvron – à qui l’on doit notamment celles de Lawrence d’Arabie et de La truite, autres succès d’Avignon – est un vrai régal. Très fluide et cadencée, elle nous plonge dans une atmosphère joyeuse et chaleureuse aux sonorités jazz & blues. Et elle dessine quelques très jolis tableaux. Comme lorsque les comédiennes tendent un fil à linge ; quand elles deviennent la bibliothèque qui tend à Maya les livres des grands auteurs ; ou encore quand la mère de la petite fille se produit dans un cabaret.
On a le sentiment d’appartenir à cette époque, de sentir la caresse du soleil de cette petite ville de l’Arkansas, d’entendre grincer le parquet que l’on imagine dans la maison de Madame Flowers ; de voir sous nos doigts la fine couche de poussière recouvrant certainement les livres de sa bibliothèque…
Les passages chantés à capella et l’accompagnement en live de Christophe Charrier ou Jo Zeugma au piano rendent l’ensemble virevoltant. Des standards de blues et jazz viennent se mêler à la musique originale de Nina Forte et nous entraînent un peu plus au cœur de cette époque et de son histoire.
Une pièce poétique et vibrante dont on ressort heureux.
Maya, une voix, avec Ursuline Kairson, Audrey Mikondo, Julie Delaurenti ou Sharon Mann ; Vanessa Dolmen ou Margeaux Lampley ; Tiffany Hofstetter ou Elizabeth Wautlet, et Christophe Charrier ou Jo Zeugma Christophe (musicien), mise en scène Éric Bouvron, se joue au Théâtre de L’Essaïon-Avignon, du 07 au 30 juillet, à 10h (relâche le lundi).
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Avis
Marguerite Annie Johnson - alias Maya Angelou - est peu connue en France. Elle sera pourtant auteure, artiste et militante pour la défense des droits civiques aux côtés de Martin Luther King et Malcolm X. Cette pièce lui rend hommage et transmet un message joyeux de résilience.