Le Retour de Richard 3 par le train de 9h24 est une comédie légère ou quiproquos, malentendus et mensonges nous promènent entre réalité et fiction.
Le Retour de Richard 3 par le train de 9h24 est avant tout un long-métrage. N’ayant pas vu le film, nous ne pourrons toutefois pas comparer. Et pour ceux d’entre vous qui ne l’auraient pas vu non plus, nous préférons ne pas trop vous en dévoiler sur l’intrigue afin de ne pas gâcher le principal effet de surprise, même s’il intervient assez tôt.
Ce que l’on peut vous dire c’est que cette pièce est une succession de mises en abyme qui questionnent avec humour et fantaisie les masques que nous portons, les rôles que nous jouons, le poids des mensonges et des non-dits, sans toutefois creuser le sujet.
C’est l’heure de passer à table !
Les personnages sont déjà sur scène, tous installés autour d’une grande table tandis que le public s’installe sur la chanson de Dalida « J’attendrai », qui tourne en boucle. On aime beaucoup cette immersion immédiate que de plus en plus de spectacles proposent. Cela donne l’impression non pas d’aller voir une pièce mais d’entrer dans une pièce, et créé d’emblée une proximité avec l’histoire, les personnages. De quoi nous rendre immédiatement curieux et attentifs.
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Pierre-Henri est gravement malade. Alors, il a réuni ses proches afin qu’ils passent une semaine ensemble dans la maison familiale. L’occasion, il l’espère, de se réconcilier avec eux. Mais pour Richard, c’est plutôt l’occasion de dire à son père tout ce qu’il a sur le cœur, d’expliquer cette distance qu’il a pris avec lui depuis des années. Ainsi, très vite, les langues commencent à se délier, les reproches à fuser, et les masques ne demandent qu’à tomber…
Mais un coup de fil oblige soudain Richard à partir. Une aparté entre son père et lui va alors nous offrir une toute autre lecture de l’histoire qui se joue devant nous… Et si ce premier revirement vaut le coup de ne pas se le faire spoiler, on aurait toutefois préféré qu’il arrive un tout petit peu plus tard, que l’on ait davantage le temps de se laisser prendre au jeu.
Un dîner un peu bancal
Bon, l’histoire est « un peu » tirée par les cheveux et pourrait s’alléger de certains rebondissements qui n’apportent rien. Par exemple, l’arrivée et le départ presque immédiat du premier Richard qui disparaît ensuite de l’histoire n’est finalement qu’un prétexte pour déballer la première et principale révélation… On aurait également pu éviter la surenchère de mensonges et plutôt creuser en direction de l’émotion du côté de ce père dont la crédibilité finit un peu par s’effriter.
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Mais ce qui nous a le plus gêné, c’est l’inégalité de jeu au sein de la distribution et le manque d’intérêt, de nuances et d’enjeu de certains personnages. Si bien qu’un certain déséquilibre se créé rapidement.
À l’inverse, certains se démarquent avec brio. À commencer par Gilles Dyrek, excellent dans le rôle d’un ami (chiant, disons-le !) de Pierre-Henri qui passe son temps à ramener sa science et à donner des conseils ! Nous avons également été séduits par le charisme de Lauriane Escaffre, qui incarne avec profondeur la belle-fille au tempérament assumé… et un peu fleur bleue à ses heures perdues !
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Hervé Dubourjal est juste et touchant dans le rôle de ce père à l’affection maladroite et pétri de regrets. Camille Bardery – que nous avions découverte au OFF 2021 dans son seule en scène L’élue – nous amuse aussi de temps à autre avec son personnage qui surjoue sans cesse le drame. Quant à ce fameux Richard (enfin, le 2, pas le 3 !) incarné par Jean-Gilles Barbier, nous l’avons trouvé aussi insupportable que drôle, notamment quand il se prend un peu trop au jeu de la fiction.
De jolies trouvailles de mise en scène
Ainsi, malgré quelques réserves, on passe tout de même un moment agréable et divertissant à guetter le Retour de Richard 3 par le train de 9h24 ! Notamment grâce à la mise en scène inventive et rythmée d’Éric Bu – à qui l’on doit notamment le génialissime Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty, avec Élodie Menant, récompensé par 2 Molières en 2020 dont celui du Spectacle Musical.
En effet, outre le comique de répétition rafraîchissant et cette mise en abyme intéressante et bien amenée du théâtre et de la famille, quelques scènes sont particulièrement drôles et assument un petit côté burlesque dans une scénographie colorée. Comme ce téléphone géant qui entre en scène à chaque coup de fil ; cette nuit que Richard passe avec… sa mère ! ; ou encore cette partie de ping-pong orchestrée avec génie par un personnage extérieur à l’histoire et très drôle qui intervient régulièrement dans son costume d’invisibilité !
On n’en gardera, certes, pas un souvenir impérissable, mais on ne regrette pas pour autant d’avoir participé à cet improbable et divertissant repas de famille.
Le Retour de Richard 3 par le train de 9h24, de Gilles Dyrek, avec Hervé Dubourjal, Isabelle de Botton, Camille Bardery, Lauriane Escaffre, Benjamin Alazraki, Jean-Gilles Barbier, Amandine Barbotte, Gilles Dyrek, mise en scène Eric Bu, se joue au Théâtre du Roi René, du 07 au 30 juillet, à 12h10 (relâche le lundi).
[UPDATE 2023] Se joue à partir du 13 janvier au Théâtre La Bruyère.
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Avis
C'est quasiment la totalité de la distribution du film que l'on retrouve sur scène ! Et on comprend cette envie de transposer ce "dîner de famille" sur les planches. Car le format huis-clos s'y prête fort bien et les nombreux rebondissements apportent un dynamisme qui offre de belles possibilités de mise en scène dont Éric Bu a parfaitement su s'emparer.