#Silence est un spectacle qui mêle théâtre et danse pour remettre de la parole là où dominent trop souvent la fuite et le silence.
Création contemporaine, #Silence tend à dénoncer de manière plus ou moins évidente la société du parfait, du toujours, du toujours mieux, du silence. Une société qui fuit, qui se tait face à des situations tragiques dans lesquelles des êtres humains échouent, se noient parfois.
De mots qui nous embarquent
Trois comédiennes portent ce spectacle. Deux d’entre elles sont sur scène, tandis que l’autre, hors champ, prête sa voix envoûtante à des mots profonds, poétiques et percutants. Nous aurions pu l’écouter pendant des heures ! Car le texte lui-même est une danse, une ondulation. Et puis, tour à tour, deux femmes s’en emparent pour nous livrer un page de leur histoire. A travers des jeux de lumière où le brouillard s’invite parfois, elles dévoilent leurs drames personnels, leurs fêlures. Deux parcours différents, qui se succèdent, se superposent, se rejoignent dans une aspiration commune, celle de rompre avec le silence.
Une atmosphère douloureuse
Ces deux femmes en symbolisent des milliers d’autres. L’une n’a pas survécu à sa fuite, l’autre veut mettre fin à ses jours. La première raconte avec beaucoup de pudeur l’abus, la douleur au corps, le monde qui ferme les yeux. Et surtout, le silence qui a entouré le viol dont elle a été victime. Puis, la seconde raconte à son tour sa fuite, sa propre traversée du silence tandis qu’elle embarquait avec son bébé à bord d’un bateau de passeurs. Pour une vie qu’elle rêvait sans peur et sans faim, loin de son pays. Son monologue est particulièrement puissant, vibrant. Il perfore le silence comme un cri venant du plus profond de l’âme. Comme avec la scène de la noyade qui expose presque avec grâce le processus du corps absorbé par l’eau.
Une pièce un peu complexe à aborder
Nous avons été séduits par l’harmonie entre le texte, le mouvement des corps, les jeux de lumière, la musique et l’interprétation des comédiennes. Les moments de danse sont beaux et accentuent la fluidité qui se dégage de l’ensemble. Pour autant, tout n’est pas toujours simple d’accès car très symbolique et métaphorique. En regardant l’affiche nous aurions pu nous en douter ! Et on n’est pas toujours sûrs de bien comprendre où tout cela veut nous mener, ni ce qui est réel ou fantasmé. Sans doute que la pièce gagnerait à faire preuve d’un peu moins de subtilité par moments. Mais l’émotion, elle, ne fait aucun détour. Et la délicatesse de la forme – presque onirique – avec ses passages chorégraphiés, permet d’amortir la violence du fond de manière admirable.
#Silence, écrit par Pauline Rémond, avec Estelle Magaud, Clara Parr Gribbell & Pauline Rémond, mise en scène par Maxime Prévot, se joue à l’Alizé théâtre, à Avignon, du 05 au 28 juillet 2019 à 15h30. Relâche le 10, 17 et 24.
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