Rage de B. DANCE, nous offre un moment de danse contemporaine inoubliable où s’expriment la désolation, la solitude et l’indifférence.
Pensez à prendre une grande inspiration avant le début de Rage, car vous resterez en apnée jusqu’à la toute dernière seconde. Inspirée du roman éponyme de l’écrivain japonais Yoshida Shuichi et du film adapté de Lee Sang-il, l’œuvre du chorégraphe taïwanais Po-Cheng Tsaiqui qui prend forme sous nos yeux nous parle de la solitude moderne.
Entre colère froide et retenue, les 8 danseurs et danseuses nous livrent une performance où l’individu et le collectif s’entrecroisent.
Une chorégraphie parfaitement structurée
C’est dans un silence incroyablement parfait que s’ouvre le spectacle. Les premiers instants sont lents, figés sur la silhouette d’une danseuse qui prend doucement vie. Les regards sont rivés sur elle, attentifs, impatients, comme lorsqu’on sait que quelque chose de grand se prépare. La rage qu’elle exprime est d’abord solitaire, muette, et déjà la grâce a envahi la scène.
Puis, les autres danseurs s’approchent, formant un cercle d’indifférence autour d’elle. Le corps secoué par la colère, elle tente désespérément de s’agripper à un autre corps mais n’y trouve aucune prise. Ce mouvement est d’une beauté infinie. Et puis, peu à peu, les autres corps s’expriment, avec délicatesse ou violence, pour traduire à leur tour les émotions intimes qui naissent de cette distance entre les cœurs.
L’expression de la virtuosité
La fluidité et la grâce de ces danseurs et danseuses sont exceptionnelles. Il n’est même plus question de talent à ce niveau là. Ils ne dansent pas, ils habitent le mouvement jusque dans leurs regards. Les sons graves du violon qui résonnent et s’amplifient traduisent avec intensité le cri de l’âme qui s’opère au dedans. Puis, les notes s’élèvent en même temps que la lumière se réchauffe. Et alors les corps ondulent, s’alignent, s’étreignent, se repoussent, s’élèvent, glissent, s’écrient sans un mot…
C’est d’une beauté éblouissante qui vous empoigne le cœur. A tel point que, lorsque le spectacle se termine, dans ce temps d’obscurité qui précède celui où les lumières se rallument, les applaudissements tardent à venir. Le temps reste suspendu. Mais une fois qu’ils sont là, ils ne cessent plus, et c’est au tour du public de se lever en un seul corps pour acclamer ces artistes admirables.
Rage, de Po-CHeng Tsai, interprétée par Chien-Chih Chang, Chin Chang, Sheng-Ho Chang, Yu Chang, I-Han Huang, Ming-Hsuan Liu, Li-An Lo et Yi-Ting Tsai, se joue aux Hivernales – CDCN d’Avignon, du 10 au 20 juillet 2019, à 12h15.
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