Nouveau thriller high-concept du jadis grand M.Night Shyamalan (Incassable, Sixième Sens, Signes), Trap se révèle comme une nouvelle déception de plus dans la filmographie d’un réalisateur désormais piégé dans sa propre marque de fabrique.
Après les déceptions qu’étaient Glass, Old ou Knock at the Cabin, il paraîtrait farfelu d’attendre encore quoi que ce soit de Shyamalan avec Trap. Pourtant, difficile d’oublier l’arrivée fracassante du réalisateur sur la scène cinématographique mondiale avec Incassable, Sixième Sens, Signes ou même l’imparfait Le Village.
Malheureusement, celui qui était présenté comme « le nouveau Spielberg » n’a pas su transformer l’essai depuis presque 20 ans maintenant, malgré quelques petits coups d’éclat (le réussi Split ou le sympathique The Visit). Mais même si le bougre est avant tout responsable de redoutables échecs artistiques récemment, Trap avait tout de la belle promesse !
Comme le précise la bande-annonce, Trap nous présente Cooper Adams (Josh Hartnett), un père de famille ordinaire en apparence qui accompagne sa fille Riley au concert de la célèbre popstar Lady Raven (Saleka Shyamalan). Mais au même instant, le stadium entier est bouclé et encerclé par le FBI, dans le but de coincer le « butcher », un serial killer normalement présent à ce même concert. Le twist : Cooper est le fameux tueur, et va devoir redoubler d’ingéniosité pour sortir de l’immense enceinte sans éveiller de soupçons (y compris ceux de sa propre fille) !
30 000 spectateurs, un tueur et une popstar
Bref, Trap tient un concept immédiatement accrocheur, que Shyamalan tient d’ailleurs relativement efficacement pendant une bonne partie du métrage ! Aidé de Sayombhu Mukdeeprom (le talentueux chef opérateur de Luca Guadagnino) et d’un montage prônant l’efficacité, le réalisateur maintient un niveau de ludisme certain via cette proposition de cinéma Hitchcockien couplé à sa dimension bac-à-sable digne d’un niveau de Hitman.
Le jeu de Josh Hartnett n’y est d’ailleurs pas étranger, oscillant entre le papa-cool un tantinet déphasé et le psychopathe TOCé derrière les sourires factices. Pourtant, Trap n’échappera pas dans sa 1e heure à des facilités narratives régulières, plaçant tel personnage ou tel objet au bon endroit/moment sur la route de Cooper pour s’en sortir.
Un jeu du chat et de la souris qui demeure quand même assez tenu, et dont on pardonne les errements de par son aspect immersif (le tout est ponctué par les divers numéros musicaux de la propre fille chanteuse de Shyamalan). Trap a également le mérite un certain équilibre de ton, lorgnant vers le comique de situation (la rencontre avec la voisine ou bien le personnage du vendeur n’en sont que des exemples). Mais rapidement, l’exercice en circuit fermé va subir un revirement de situation (salvateur sur le papier), mais également un plongeon qualitatif marqué en terme d’écriture (finie la suspension d’incrédulité).
Maladresses narratives dignes d’une parodie
Désireux d’inverser et de balancer le rapport de force préalable (difficile d’aller plus loin sans spoiler), Trap orchestrera finalement une chasse à l’homme écrite avec les pires couleuvres à avaler et les plus grosses aberrations scénaristiques vues cette année au cinéma ! Entre le FBI qui apparaît/disparaît suivant les exigences du script (avec sans doute la pire profiler de l’Histoire), un Cooper aussi efficace dans le déguisement que David Copperfield ou encore la résolution de kidnapping la plus téléphonée depuis bien longtemps, Shyamalan enchaîne non-seulement les poncifs (ce dernier quart d’heures en pilote automatique!), mais annihile tout vrai suspense.
Un comble pour un thriller high-concept, malgré l’implication de Josh Hartnett dans un rôle à multiples facettes, mais dont la dramaturgie ne permet pas d’ériger le personnage vers les cimes de caractérisation voulue. Il y a d’ailleurs volonté de regarder sous la carapace de cet anti-héros protagoniste dans un ultime élan psychanalytique tentant d’user des fantômes du passé.
Mais là encore le tout se révèlera aussi survolé que de la psychologie primaire de comptoir, faisant de Trap une vaste farce qui loupe le coche, et un thriller annihilé par une écriture malheureusement au rabais. Dommage donc, car techniquement Shyamalan est toujours un bon faiseur d’images, mais le pari est (à nouveau) loupé !
Trap sortira au cinéma le 7 août 2024
avis
Avec Trap, Shyamalan tenait un high-concept accrocheur au ludisme certain ! Et si l'exercice entre du De Palma et Hitman avait tout du bac-à-sable tenu, très vite ce qui s’apparentait à un thriller immersif vire au plantage tête la première la faute à des facilités scénaristiques complètement grossières, et un fil rouge narratif perdant de vue ses personnages. Dommage, car techniquement le tout est propre, et Josh Hartnett se débrouille comme il faut. Mais le constat est là : Shyamalan accouche à nouveau d'un pari manqué !